Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones
Ce Guide est conçu pour servir de support et de référence à des cours de grammaire, de prononciation et d’expression orale et écrite donnés à des étudiants de français finnophones de l’enseignement supérieur en Finlande. Ces étudiants ont des connaissances préalables du français acquises généralement en milieu scolaire (3 à 5 ans, parfois plus) et sont familiarisés avec la doxa grammaticale du finnois et du français, c’est-à-dire avec les descriptions et la terminologie générale communément diffusées dans l’enseignement scolaire de ces deux langues.
Cet ouvrage n’est pas une grammaire descriptive générale du français, mais un guide pratique pour la compréhension et la production présentant les différences et les ressemblances entre le finnois et le français, et mettant à profit les connaissances préalables des étudiants. Les définitions des notions étudiées (verbe, adjectif, sujet, fonction etc.) sont minimales et ont essentiellement pour objet de mettre un nom sur le fait de langue examiné. De même, les rubriques du sommaire ne sont pas des prises de position théoriques sur l’appartenance de tel ou tel élément du discours à une catégorie plutôt qu’à une autre, mais de simple sous-titres de rangement.
La Finlande est un pays épargné par les élucubrations orthographiques. La grammaire tient dans l’enseignement scolaire une place modeste, et, au terme du cursus scolaire, les connaissances des élèves en matière d’analyse et de terminologie grammaticales sont le plus souvent modestes. En outre, les apprenants finlandais de français, au contraire de ceux de certains autres pays, ont une représentation de la langue française et de sa grammaire passablement éloignée de celle prévalant en France et véhiculée dans les manuels de français langue étrangère. Tout cela permet une approche plus contextualisée de la description des faits de langue et de leur place dans l’ordre des priorités. L’utilisation de l’article en français est ainsi surexpliquée, et l’accord du participe passé, relégué au rôle d’accessoire et de curiosité.
Pour la description des faits de langue, on utilise la plupart du temps les termes de la nomenclature grammaticale finnoise et française, en y ajoutant au besoin des termes plus « techniques » (anaphore, adposition…) qui n’y figurent habituellement pas. Pour le finnois, on renvoie à l’excellent lexique grammatical Sananselityksiä, liste de définitions simplifiées de la monumentale grammaire VISK.
Quand cela peut éclairer les convergences ou divergences entre le français et le finnois ou des faits de langue représentant des zones de fossilisation potentielle (opposition IL-ÇA, « partitif » etc.), on utilise des descriptions ou des termes non conventionnels. On a aussi négligé ou traité sommairement des difficultés décrites dans les grammaires de français langue étrangère qui n’en sont pas pour les finnophones.
Le contenu des pages est agencé dans un ordre qui va du plus général (et du plus immédiatement utile aux étudiants de niveau moyen B1/B2) au plus spécifique (niveau C1), en fin de page. Si besoin est, certaines explications approfondies et remarques diverses figurent parfois immédiatement après des descriptions de niveau moyen.
Le retour des lecteurs au cours des années montre que cette grammaire est aussi consultée par des locuteurs de français L2 de niveau avancé, d’origine linguistique très diverse, qui recherchent des explications détaillées sur des faits de langue qui ne sont pas mentionnés ou décrits suffisamment dans les grammaires françaises, ou qui le sont dans des contenus non publiés en ligne et donc difficilement accessibles pour eux. C’est à leur intention et en réponse à des questions récurrentes que sont données parfois des explications dont la finalité ou le niveau de détail pourront sembler en contradiction avec l’objectif utilitaire affiché plus haut. Mais les grammaires servent souvent aussi aux spécialistes, qui y cherchent des réponses à des questions très spécifiques.
Toute grammaire contextualisée se doit par essence d’accorder une large place à la description des variations du français (écrit/parlé etc.), car les apprenants allophones n’ont pas grandi dans le contexte linguistique ni reçu de formation scolaire suffisamment longue leur permettant de distinguer entre les règles du code écrit et les pratiques langagières du français parlé ou entre les différents styles (écrit strict, français courant, familier, très familier etc.).
Bien plus que par un séjour dans un pays francophone, c’est par l’intermédiaire d’Internet et des réseaux sociaux, réservoirs inépuisables de variation, que les étudiants sont confrontés aux pratiques quotidiennes du français. Il est donc indispensable de leur fournir un minimum de repères concernant la norme et la contre-norme, les usages et les contre-usages (ce qu’on qualifie de fautes dans la représentation de la grammaire par les francophones). Pour cette raison, le français parlé et non conventionnel tient dans ce guide une place importante, de même que les remarques sur les écarts courants à la doxa grammaticale (plutôt qu’à la grammaire), ou même les écarts non recevables mais néanmoins fréquents.
De nombreux étudiants finlandais de français au niveau universitaire effectuent en temps normal un long séjour, inscrit dans leur cursus, en France ou en Belgique, dans le cadre du programme Erasmus notamment. Comme tous les apprenants de français langue étrangère, ils sont généralement confrontés au choc linguistique du contact avec la réalisation orale du français. Plus, ou au moins autant qu’à des divergences grammaticales ou lexicales entre norme du code écrit et pratiques du français parlé, ce choc est dû à l’impréparation à la réalisation phonique des séquences graphiques des mots appris « dans les livres » (la correspondance ou plutôt la non-correspondance graphie-phonie).
Dans le passage de l’écrit à l’oral, des lettres disparaissent (le l de il ou de quelque chose), des formes réputés non élidées le sont fréquemment (qui, tu), des mots « disparaissent » également (ne négatif, il devant faut ou y a, que dans qu’est-ce que tu dis). Ces modifications ou disparitions mettent en contact des phonèmes qui ne le sont pas dans la représentation graphique de la séquence, et peuvent déclencher des réactions en chaine dues à l’assimilation de sonorité, qui ont aussi des répercussions importantes sur le schéma rythmique des séquences. L’appropriation de ces mécanismes passe évidemment par une exposition prolongée au français parlé in situ, mais on peut au moins y préparer les étudiants par une explication des faits grammaticaux qu’elles recouvrent, et aussi par des exercices de prononciation qui les illustrent.
Le Guide de prononciation française pour apprenants finnophones, qui est un complément important au présent Guide de grammaire, propose de tels exercices, signalés aux points de grammaire concernés par le symbole cliquable . Ces exercices portent également sur des structures grammaticales de base, notamment l’ordre et la place des pronoms faibles devant le verbe, qui sont une pierre d’achoppement traditionnelle pour tous les apprenants de français langue étrangère.
L’apprentissage de l’ordre des pronoms peut être facilité par la répétition de séquences phoniques, plutôt ou au moins autant que par l’approche traditionnelle d’exercices de transformation. Il en va de même, l’expérience le prouve, pour la production, la compréhension et l’acquisition des modifications résultant de l’effacement de l’article indéfini après de (/imfodetomat/
vs /ʒebzwɛ̃tːomat/
).
En plus de ces exercices de grammaire-prononciation, d’autres exercices de grammaire, plus traditionnels, sont également proposés en rapport avec certaines descriptions, sur une page dédiée.
Comme mentionné ci-dessus, ce Guide de grammaire a été conçu et est utilisé comme support de cours de grammaire du français donnés à l’université de Jyväskylä. Il est hébergée sur un serveur de cette université, en libre accès. Testé dans la pratique de l’enseignement aux étudiants de français, il a été mis à jour régulièrement, à quoi a contribué également le retour de lecteurs en ligne de divers pays. Pour des raisons techniques de maintenance, le contenu, toujours en libre accès, migrera progressivement au cours de l’automne 2022 sur le site du Réseau international Grammaires et contextualisation (GreC), dans une section dédiée, Grammaire du francais pour finnophones. Il continuera de servir comme support de cours de grammaire et d’être mis à jour régulièrement. La présente version restera disponible après cette migration, mais elle ne sera plus mise à jour sur ce site après le 15.8.2022. Une fois installée, c’est la nouvelle version en ligne sur le site de GreC qui fera foi. Pour savoir quand le contenu aura entièrement migré sur son nouveau site et sera disponible dans son nouveau format, veuillez consulter le site du GreC.
ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 1. Présentation. Dernière mise à jour : 13.8.2022