Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones

  Index alphabétique

Partitiivi
et partitif

Le mode de représentation

Viljaa ja tietoa

Pas de partitiivi
ni de « partitif » en français

Les ex­pres­sions partitives

Le partitivi en finnois

Le mode de représentation

Les for­mes de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni dépendent de la ma­niè­re dont on représente (le « mode de représenta­tion » esitys­tapa) le si­gni­fié (tarkoite) du nom que l’ar­ti­cle dé­ter­mi­ne. Pour dé­si­gner ces for­mes, on uti­li­se dans ce Guide de gram­mai­re les termes sui­vants :

Noms complets et noms abrégés des for­mes de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni
for­menom completnom abrégé
un/unear­ti­cle in­dé­fi­ni comptable singulierar­ti­cle in­dé­fi­ni singulier
desar­ti­cle in­dé­fi­ni comptable plurielar­ti­cle in­dé­fi­ni pluriel
du/de la/de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni massifar­ti­cle massif
Représenta­tion comptable

Le signifié du nom peut être repré­sen­té com­me une entité (entiteetti) discrète (yk­sit­täi­nen, jaoton, selvärajainen), qu’on peut comp­ter. C’est la représenta­tion comp­ta­ble (en finnois jaot­to­muus). Cette entité peut être pré­sen­tée com­me unique par la for­me un/une (a) ou com­me multiple (au pluriel) par la for­me des (b) :

(a) un livre, un papier, une table, un ami, une télévision, un vin, un pain, une eau mi­né­rale, un exem­ple, une maison, un effort , une chance, un ar­ti­cle, une bière blon­de, un beurre, un homard

(b) des livres, des papiers, des amis, des vins, des maisons, des chances, des ef­forts, des pains, des eaux minérales, des bières blondes, des beurres, des homards

Représenta­tion massive

Le signifié du nom peut aus­si être repré­sen­té com­me un ensemble, une masse con­tinue (en finnois ilman selviä rajoja, jaollinen) concrète ou abstraite, qu’on ne compte pas. C’est la représenta­tion massive. Quand on divise cette masse, on ob­tient tou­jours le mê­me gen­re de masse : quand on divise un morceau de beurre en plu­sieurs morceaux ou un tas de sable en plu­sieurs tas, ces morceaux ou ces tas sont aus­si du beurre ou du sa­ble (pour cette raison, en finnois on appelle la re­pré­senta­tion massive « jaollisuus », « di­vi­si­bi­lité »). On uti­li­se alors devant le nom les for­mes de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni du/de la :

du papier, du vin, du pain, de la pomme, de la chance, du beurre, de l’eau mi­né­ra­le, de la bière blon­de, du homard, de l’argent, de l’amour, du bonheur

Le massif (non comptable) n’a pas de pluriel

Le mode de représenta­tion massif présente le signifié du nom com­me une « mas­se » continue, et non pas com­me des entités séparées qu’on peut compter. Pour cette raison, l’ar­ti­cle massif n’a pas de pluriel. La for­me des est le pluriel de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni un/une utilisé devant des noms repré­sen­tés com­me comptables : des pains, des vins, des bières, des homards, des papiers.

Il exis­te cer­tains noms au plu­riel qui ont un sens massif (des spaghettis = pastaa) ou aus­si quel­ques noms qui ne s’uti­li­sent qu’au pluriel et n’ont pas de for­me singulier pour mar­quer le massif  (des décombres). En finnois, on uti­li­se parfois des mots au singulier qui sont gé­né­ra­le­ment au pluriel en fran­çais (ou l’in­verse), par ex­em­ple viljaa/des céréales. Ces cas par­ti­cu­liers sont sou­vent des mots courants, utiles à con­naitre. Voir Viljaa ja tietoa.

Représenta­tion comptable et massive en finnois

Certaines langues, com­me l’anglais (ou l’al­le­mand, le suédois etc.), mar­quent la re­pré­sen­ta­tion mas­sive par l’absence d’ar­ti­cle : She bought a beer / She bought beer.Elle a acheté une bière / Elle a acheté de la bière.

En finnois, il n’y a pas d’ar­ti­cle. Pour ex­pri­mer la représenta­tion comp­table, on peut (dans cer­tains cas limités) uti­li­ser le cas akkusatiivi-genetiivi et le monikon par­ti­tii­vi :

Ostin maljakon. J’ai acheté un vase. / Ostin maljakkoja. J’ai acheté des vases.

Pour ex­pri­mer la re­pré­senta­tion massive, on peut uti­li­ser (dans cer­tains cas) le par­ti­tii­vi (Lattialla on hiekkaa). Mais le par­ti­tii­vi sert le plus sou­vent à ex­pri­mer l’aspect ver­bal (Odotan ys­tä­vää­ni), et non pas la représenta­tion massive.

Viljaa ja tietoa

En gé­né­ral, les noms sont repré­sen­tés comme comptables ou massifs de la mê­me ma­nière en fin­nois et en fran­çais. Mais il y a parfois des dif­fé­ren­ces.

Viljaa, pastaa, kieloja

Devant cer­tains noms d’aliments, le fran­çais uti­li­se l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni comp­ta­ble plu­riel (des) là où le fin­nois uti­li­se la représentation mas­sive, ou bien, plus ra­re­ment, l’in­verse (pluriel en fin­nois, massif en fran­çais) :

viljaa des céréales, pinaattia des épinards, parsaa des asperges
pastaa des pâtes, kesäkurpitsaa des courgettes, artisokkaa des artichauts
spagettia des spaghettis
leikkeleitä de la charcuterie, poimia kieloja cueillir du muguet

Cela ne veut pas dire que ces noms ne peu­vent pas être utilisés avec la for­me d’ar­ti­cle massif ou, in­ver­se­ment, avec une for­me d’ar­ti­cle comptable. Presque tou­te ma­tière peut être en­vi­sa­gée dans sa re­pré­sen­ta­tion soit comptable soit massive :

Sur la chemise, il y avait de l’épinard. Paidassa oli pinaattia (= pinaatin tahra).
J’ai laissé tomber un spaghetti. Pudotin yhden spagetin.
Il y a de l’artichaut dans cette soupe.

Mais dans le cas du muguet, on ne peut pas uti­li­ser l’ar­ti­cle comptable dans ce cas. Il faut dire  :

Pomin yhden kielon /kaksi kieloa. J’ai cueillit un brin de muguet / deux brins de mu­guet.

Tietoa, de l’information ?

Le pro­blè­me du mode de représenta­tion ne concerne pas seu­le­ment des noms con­crets, mais aus­si des noms abstraits, le plus typique étant information ~ tieto. En fin­nois, le mot tieto peut être repré­sen­té com­me massif, au sin­gu­lier :

antaa tietoa, esittää uutta tietoa, saada tietoa

Le fran­çais représente rarement les noms com­me information ou savoir (tieto) com­me massifs. Le mot sin­gu­lier tieto a com­me équi­va­lents en fran­çais des noms au pluriel (voir ex­em­ples ci-dessous). Le plus sou­vent, on uti­li­se d’au­tres noms que le mot in­for­mation, qui, com­me com­plé­ment du ver­be, est en gé­né­ral très concret (in­for­ma­tion dé­si­gne en premier lieu un message, une chose que quel­qu’un an­non­ce) :

Cette information-là, que je vous ai donnée, est une informa­tion nouvelle, tout à fait im­por­tan­te.

Dans l’ex­em­ple ci-dessus, on dit une information nouvelle, avec l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni comptable une qui s’uti­li­se quand on ca­ra­cté­ri­se le nom avec un adjectif. Dans la rédac­tion scientifique, on dira par ex­em­ple :

Il s’agit donc, dans cette étude, d’obtenir des informations (pluriel, saada tietoa) sur la ma­niè­re dont les lo­cu­teurs perçoivent ces stratégies langagières. Dans cet ar­ti­cle, l’auteur ne présente pas de données réellement neuves (ar­ti­cle in­dé­fi­ni pluriel des dans phra­se né­ga­ti­ve, en finnois esittää uutta tietoa). Le nouveau pro­tocole de recherche adopté ne semble pas avoir fourni de renseignements (ar­ti­cle in­dé­fi­ni pluriel des dans phra­se né­ga­ti­ve, en finnois, antaa tietoa) plus fiables que le protocole ha­bi­tu­el.

Huumorintajua ja tasapaino

Le pro­blè­me de la dif­fé­ren­ce du mode de représenta­tion entre les deux langues se re­trou­ve éga­le­ment dans l’opposi­tion entre in­dé­fi­ni massif et « dé­fi­ni ». Bien que le fin­nois n’ait pas à proprement parler d’ar­ti­cle dé­fi­ni et ne mar­que pas la dé­fi­ni­tion par opposi­tion à l’in­dé­fi­nition, cer­tains noms peu­vent être re­pré­sentés com­me mas­sifs, alors que d’au­tres, très similaires par le sens, ne le sont pas. On oppose par ex­em­ple :

Hänellä on huumorintajua.
Hänellä on hyvä tasapaino.

Ces deux mots et leur modes de représenta­tion ne sont sans doute pas in­tui­ti­ve­ment perçus comme comparables par un lo­cu­teur fin­no­pho­ne, mais ce qui les ré­u­nit est le fait qu’en fran­çais ils cor­res­pondent tous deux à une construc­tion avec un ar­ti­cle dé­fi­ni, l’une étant iden­ti­que à l’au­tre par la structure :

Elle a le sens de l’humour.
Elle a le sens de l’équilibre.

Le fait qu’on uti­li­se un ar­ti­cle dé­fi­ni dans les deux cas peut sembler surprenant à un ap­pre­nant finno­pho­ne. Cela montre que le type d’ar­ti­cle en fran­çais n’est pas en rela­tion avec les cas de déclinaison fin­nois. Les deux langues représentent le réel avec des moyens dif­fé­rents, qui peuvent parfois paraitre illogiques à l’ap­pre­nant de l’au­tre langue. Sou­vent, l’uti­li­sa­tion de telle ou telle for­me d’ar­ti­cle ou de tel ou tel cas en fin­nois dépend d’un sens par­ti­cu­lier du mot. C’est donc parfois aus­si un pro­blè­me de connaissance du vocabulaire, autant que de la gram­mai­re. Autres ex­em­ples :

Hänellä on taloudellista vaistoa, mutta hän on menettänyt todellisuudentajunsa. Il a le sens des affaires, mais il a perdu le sens des réalités.

Autres constructions de ce type :

Il a un em­ploi du [ar­ti­cle dé­fi­ni contracté] temps très chargé. avoir la nostalgie de quel­que chose

Voir aus­si « Avoir le temps ou du temps ? ».

Pas de par­ti­tii­vi ni de « par­ti­tif » en fran­çais

En fran­çais, il n’y a pas de par­ti­tii­vi.

Il peut paraitre bizarre de décrire dans un guide de grammaire une chose qui n’exis­te pas. Mais c’est né­ces­sai­re, parce que

  1. 1) il exis­te en finnois un cas nommé par­ti­tii­vi et
  2. 2) dans les manuels de grammaire fran­çaise (publiés en France ou en Finlande), on men­tionne sys­té­ma­ti­que­ment l’exis­tence d’un « ar­ti­cle par­ti­tif ».

Pour ces raisons, les ap­pre­nants fin­no­pho­nes ont ten­dan­ce à croire qu’il y a une cor­res­pon­dance entre le par­ti­tii­vi finnois et l’ar­ti­cle dit « par­ti­tif » qu’on trouve dans les ma­nuels de grammaire fran­çaise.

En finnois, il exis­te un cas de déclinaison (taivutuksen sijamuoto) nommé par­ti­tii­vi. Com­me on le sait, en fran­çais on n’uti­li­se pas de cas de déclinaison. Les fin­no­pho­nes doivent donc com­pren­dre et accepter qu’en fran­çais il n’exis­te pas de cas par­titiivi ou mê­me quel­que chose qui y ressemble (il exis­te un par­ti­tii­vi en es­to­nien).

En fran­çais, il n’y a pas d’ar­ti­cle par­ti­tif.

Dans les grammaires et les manuels scolaires fran­çais (et ceux de français langue étrangère conçus en France, en Finlande ou ailleurs), on uti­li­se sou­vent le terme d’« ar­ti­cle par­ti­tif », qui dé­crit l’ar­ti­cle du/de la. On le dé­fi­nit ha­bi­tu­el­le­ment en di­sant qu’il « ex­pri­me une par­tie de quel­que cho­se ». Ce terme traditionnel (hérité de la description de la grammaire du latin) et cette dé­fi­nition sont in­uti­les.

En effet, en fran­çais, il n’y a pas d’ar­ti­cle par­ti­tif. La for­me du/de la n’est pas un ar­ti­cle par­ti­tif, c’est la for­me de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni un qui sert à ex­pri­mer la re­pré­sen­ta­tion massive.

La célèbre et très sérieuse grammaire Le Bon usage disait déjà en 1949 (4e édition, §326) : « L’ar­ti­cle par­ti­tif n’est au­tre chose, pour le sens, qu’un ar­ti­cle in­dé­fi­ni em­ployé de­vant le nom des objets qui ne peuvent se compter. »

L’ar­ti­cle in­dé­fi­ni du/de la n’ex­pri­me pas une par­tie de quel­que chose, mais le fait que le si­gni­fié (tar­koite) du nom est pré­sen­té com­me une masse (non comptable). Le mê­me signifié peut être repré­sen­té com­me comptable ou massif, sans changer de for­me ou de nature :

Un pain, c’est du pain.
Des pains, c’est aus­si du pain.
Si on mange un pain entier, on mange certainement du pain.

Le par­ti­tii­vi finnois n’ex­pri­me pas une par­tie de quel­que chose.

En finnois, on dit sou­vent et on écrit dans cer­tai­nes grammaires que le par­ti­tii­vi ex­pri­me une par­tie de quel­que chose (« Partitiivi ilmaisee osaa jostakin »). C’est très ra­re­ment le cas. En réalité, le par­ti­tii­vi ex­pri­me prin­ci­pa­lement deux choses :

1. Il peut ex­pri­mer la représentation massive, com­me du/de la en fran­çais. On peut traduire directement les ex­em­ples pré­cé­den­ts en finnois :

Un pain, c’est du pain.
Yksi leipä on leipää.
Des pains, c’est aus­si du pain.
Monta leipää on myös leipää.
Si on mange un pain entier, on mange certainement du pain.
Jos syö kokonaisen leivän, silloin syö kieltämättä leipää
.

Au pluriel, si le nom est le su­jet, l’attribut ou le com­plé­ment direct (objekti) du ver­be, le par­ti­tii­vi peut ex­pri­mer une quantité in­dé­fi­nie et cor­res­pon­dant alors à l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni pluriel des. Dans ce cas, les noms dé­si­gnent des entités entières, pas des par­ties de quel­que chose :

Sur la table, il y avait des fleurs. Pöydällä oli [kokonaisia!] kukkia. Dans la rue, on voyait des voitures. Kadulla näkyi [kokonaisia!] autoja. Les enfants jouaient avec des ballons. [en finnois palloilla, qui n’est mê­me pas un par­ti­tii­vi].

2. En finnois, le par­ti­tii­vi sert le plus sou­vent à ex­pri­mer l’aspect imperfectif ou non ré­sul­ta­tif du ver­be. Dans les ex­em­ples sui­vants, les com­plé­ments du ver­be dé­si­gnent des entités (clients, train, paysage, personne, paquet) entières. Dans ce cas, le par­ti­tii­vi n’ex­pri­me pas du tout une « partie de quel­que chose » mais un pro­ces­sus en cours. :

Tarjous kiinnostaa asiakkaita. Odotan junaa. Hän ihaili maisemaa. Ra­kas­tan sinua. Juuri kun olin avaamassa pakettia, kuului ovelta koputus.

En savoir plus  : voir ci-des­sous.

Les ex­pres­sions par­ti­ti­ves

Com­me le montrent les explications ci-dessus, mal­gré ce que dit la tradition sco­lai­re, il n’y a pas d’ar­ti­cle par­ti­tif en fran­çais. Mais la notion et le terme de « par­ti­tif » peu­vent s’ap­pli­quer à cer­tains cas  : on peut for­mer des ex­pres­sions par­ti­ti­ves com­po­sées de de + dé­ter­mi­nant dé­fi­ni + nom (voir les déterminants dé­fi­nis) :

Je reprendrais bien de cet excellent bordeaux. Donne-moi un peu de ton vin. Il reste en­co­re de la tarte de ce matin ?

Une ex­pres­sion par­ti­ti­ve a trois ca­rac­té­ris­ti­ques :

  1. 1) elle est introduite par la pré­po­si­tion de, qui indique qu’on extrait une par­tie d’un tout, sur le mo­dè­le N de N ;
  2. 2) le tout dont on extrait une par­tie (= la par­tie introduite par de) est tou­jours exprimé ou facilement resti­tuable (tunnistettavissa, palautettavissa) dans le con­tex­te, et il peut être complété par un adjectif, un groupe préposi­tionnel… ;
  3. 3) l’ex­pres­sion par­ti­ti­ve N de N est introduite par un déterminant dé­fi­ni (dé­mons­tra­tif, possessif, plus rarement ar­ti­cle dé­fi­ni).

(1) Ressers-moi de cet excellent café.
(2) Donne-moi de tes bonbons, je n’en ai plus.
(3) Il reste dans cette villa de la beauté d’au­trefois. entisajan kauneutta.
(4) Il y a en lui du poète (= il est comme le poète, le à valeur gé­né­ri­que).
(5) Au fait, tu as en­co­re du cognac de l’au­tre jour ?

Dans les ex­em­ples (3) à (5), de la et du ne sont pas des ar­ti­cles in­dé­fi­nis exprimant le massif, mais la pré­po­si­tion de suivie de (ou contractée avec) l’ar­ti­cle dé­fi­ni la, les, le, et complétés par d’au­trefois, de l’au­tre jour. Dans ce genre d’ex­pres­sion par­ti­ti­ve, on uti­li­se l’ar­ti­cle dé­fi­ni, qui peut se contracter avec la préposition de :

Il y a dans son style quelque chose du classicisme russe. Hänen tyylissään on venäläisen klassismin ainesta.  → Il y a dans son style beau­coup du classicisme russe. Hänen tyylissään on paljon venäläisen klassismin ainesta. Il y a en elle un peu de la bergère de Watteau.→ Il y a en elle beau­coup de la bergère de Watteau.

Dans le code écrit, on peut aus­si sous-entendre quelque chose et uti­li­ser de seul +ar­ti­cle dé­fi­ni seul :

Il y a en lui du poète. Hänessä on runoilijan ainesta. → Il y a en lui beau­coup du poète. Hänessä on paljon runoilijan ainesta. Il y a en elle de la bergère de Watteau.→ Il y a en elle beau­coup de la bergère de Watteau.

Les ex­pres­sions par­ti­ti­ves sont quantifiables  :

Les enfants n’ont pas laissé beau­coup de la tarte que j’ai faite ce matin. Plusieurs des personnes interrogées ont déclaré avoir connu la mê­me situation.

Le par­ti­tif en fin­nois

L’une des plus grandes dif­fi­cul­tés de l’apprentissage de l’ar­ti­cle fran­çais par les fin­no­pho­nes est le fait qu’il exis­te en fin­nois un cas nommé par­ti­tii­vi, dont le nom est pra­ti­que­ment iden­ti­que au terme fran­çais de par­ti­tif utilisé traditionnellement dans les gram­mai­res. Cette ressemblance entraine de nom­breuses con­fu­sions et er­reurs d’interprétation. Pourtant, le « par­ti­tif » fran­çais n’a rien de commun avec le par­ti­tii­vi fin­nois :

Le nom en lui-mê­me n’est pas massif/comptable

Ce n’est pas le nom qui est comptable ou massif, ni mê­me le concept (l’objet du mon­de) qu’il dé­si­gne. C’est seu­le­ment le mode de repré­sentation, c’est-à-dire la ma­nière dont on présente le signifié du nom, qui peut varier entre le comp­ta­ble et le massif. En gé­né­ral, la plupart des objets du monde sont repré­sen­tés com­me comp­tables, plutôt que com­me mas­sifs (en fran­çais et en fin­nois). En effet, de nom­breux objets ne peu­vent (nor­ma­le­ment) pas être re­pré­sen­tés com­me des mas­ses con­ti­nues. En fran­çais com­me en fin­nois :

? Je veux du train. ? Je cherche de la voiture. ? Il donne de l’ex­em­ple. ? J’ai acheté de la télévision. ? Ostin televisiota. ? Pöydällä on kirjaa.

sont étranges parce que train, televisio ou kirja ne dé­si­gnent pas, à priori, des mas­ses, mais des objets séparés (des entités discrètes), comptables.

Certains au­tres objets du monde sont pré­sen­tés plus fré­quem­ment sous la for­me massive, par ex­em­ple de l’argent : on dit dif­fi­ci­lement un argent, tout com­me en fin­nois on dit gé­né­ra­le­ment rahaa et il est ex­cep­tion­nel de dire yksi raha. Ce­pen­dant, cer­tains noms peu­vent facilement être pré­sen­tés dans une ca­té­go­rie et dans l’au­tre (comptable/massif ou massif/comptable). Tout dépend de la ma­niè­re dont le nom est repré­sen­té (et pas du nom en lui-mê­me) ; en fran­çais, c’est justement la for­me de l’ar­ti­cle qui in­di­que le mode de représentation :

Elle achète un pain. Hän ostaa leivän. (comptable, sin­gu­lier)
Elle achète des pains. Hän ostaa leipiä. (comptable, pluriel)
Elle achète du pain. Hän ostaa leipää. (non comptable = massif)

Variation de représentation

Grâce à l’ar­ti­cle, des noms repré­sen­tés ha­bi­tu­el­le­ment com­me comp­tables peu­vent être aus­si pré­sen­tés com­me massifs, en fonc­tion de l’inten­tion du lo­cu­teur. On peut dire devant une voiture qui fonc­tionne bien :

Ça, c’est de la voiture ! Tämä on kunnon peli!

ou bien on pourrait, par ex­em­ple en sortant d’un salon de l’aé­ronautique (il­mai­lu­näyt­tely) dire en plaisantant :

Au moins, aujourd’hui, on a vu de l’avion. Kylläpä tänään nähtiin lentokonetta.

Le fonc­tionnement et la fonc­tion de la représenta­tion comptable/massive se voit très bien dans le fait que dans cer­tains cas, le signifié (tarkoite) des « objets » dé­si­gnés change parfois en fonc­tion du mode de représenta­tion (les traductions don­nées sont seu­le­ment des ex­em­ples, pas les seules traductions pos­si­bles) :

de l’amour rakkautta / un amour rakastettu, kulta / des amours rakkaussuhteita du bonheur onne(llisuutt)a / un bonheur onnellinen tunne, onnellisuus / des bonheurs onnellisia hetkiä de la chance onnea / une chance onnellinen tilaisuus, mahdollisuus / des chances mahdollisuuksia

Le par­ti­tii­vi mar­queur d’aspect ver­bal

Quand il sert de désinence casuelle (sijamuoto) à un nom com­plé­ment direct d’un ver­be, le par­ti­tii­vi fin­nois sert à apporter des informations sur la ma­niè­re dont l’ac­tion ver­bale est envisagée. Il est dans ce cas en concurrence avec les au­tres cas du com­plé­ment (akkusatiivi-genetiivi et for­me zéro). Il ne sert pas en priorité à ex­pri­mer l’idée de dé­fi­ni ou d’in­dé­fi­ni. Quand il sert de désinence casuelle à un nom com­plé­ment direct ou su­jet d’un ver­be, le par­ti­tii­vi peut ac­ces­soi­rement ex­pri­mer une quan­ti­té in­dé­fi­nie (un sens équi­va­lent à l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni pluriel fran­çais) dans deux cas uni­que­ment :

  1. 1) quand le nom est com­plé­ment direct d’un ver­be perfectif à la for­me af­fir­ma­ti­ve : hän osti kirjoja (qui s’op­po­se à hän osti kirjat) ;
  2. 2) quand le nom est le su­jet d’un ver­be de for­me imper­son­nelle (e-subjekti) à la for­me af­fir­ma­ti­ve : pöydällä oli kukkia ou museosta tuli ihmisiä. Et dans ce dernier cas, l’opposi­tion ne repose pas uni­que­ment sur la désinence (pääte), car c’est aus­si tou­te la structure de la phra­se qui est dif­fé­ren­te. Com­pa­rer :

Pöydällä oli kukkia. / Kukat olivat pöydällä.
Museosta tuli ihmisiä. / Ihmiset tulivat museosta.

Dans les au­tres cas, le par­ti­tii­vi ex­pri­me d’abord et avant tout l’aspect, et l’idée de quan­ti­té in­dé­fi­nie est effacée :

Kauppias odottaa asiakkaita. → Le com­merçant attend les clients / des clients. 

Le par­ti­tii­vi n’ex­pri­me pas une par­tie

Contrairement à ce qu’écrivent cer­tains manuels finlandais, le par­ti­tii­vi fin­nois n’ex­pri­me pas une « partie » de quel­que chose. Sa fonc­tion est avant tout as­pec­tuel­le :

Kauppias odottaa asiakasta. → Le com­merçant attend le client / un client.

Dans cette phra­se, le par­ti­tii­vi est la mar­que d’une ac­tion ver­bale non achevée (im­per­fec­ti­ve ou ir­ré­sul­tative). Le com­merçant attend, évi­dem­ment, un client entier, et non pas des par­ties du client. Il peut s’agir d’un client dé­fi­ni ou in­dé­fi­ni, ce qui peut être mar­qué en fran­çais par le choix de l’ar­ti­cle. En fin­nois, cette distinc­tion est effacée par la force du sens imperfectif du ver­be : le par­ti­tii­vi est la seule for­me pos­si­ble.

Dans les phra­ses né­ga­ti­ves

En fin­nois, dans les phra­ses né­ga­ti­ves, le com­plé­ment direct du ver­be (objekti) se met pra­ti­que­ment tou­jours au par­ti­tii­vi. Un tel phénomène n’exis­te pas en fran­çais. Quand le par­ti­tii­vi s’uti­li­se dans une phra­se né­ga­ti­ve, il ne peut pas à lui tout seul ex­pri­mer l’idée d’in­dé­fi­ni. La phra­se (a) peut donc signifier (b) ou (c) :

(a) Kauppias ei nähnyt asiakkaita.
(b) Le com­merçant n’a pas vu les clients.
(c) Le com­merçant n’a pas vu de clients.

Dans de clients, le mot de est la for­me du pluriel de l’ar­ti­cle in­dé­fi­ni comptable dans une phra­se né­ga­ti­ve et non pas un « par­ti­tif », qui n’exis­te pas en fran­çais.

Massif et aspect ver­bal

Le par­ti­tii­vi fin­nois peut aus­si ex­pri­mer l’idée de massivité : hän juo vettä (il boit de l’eau), hän syö leipää (il mange du pain). Mais il faut faire attention, car il peut aus­si ex­pri­mer dans ce cas-là l’aspect ver­bal :

Hän joi kahvia nukkumaan menoon saakka.
Elle buvait le café en attendant d’aller se coucher.
Elle buvait du café en attendant d’aller se coucher.

Il y a donc parfois des par­ti­tii­vi qui ex­pri­ment le massif (kattilassa on puuroa, dans la cas­se­ro­le, il y a du gruau), mais le plus sou­vent les par­ti­tii­vi n’ex­pri­ment pas le massif (odotan bussia j’attends le bus, le par­ti­tii­vi ex­pri­me l’imperfectif).

Voir les explications ex­trê­me­ment détaillées concernant l’aspect ver­bal dans VISK à propos des classes de noms (sé­man­ti­que, §554-559), du com­plé­ment (actance, syntaxe, §931-942), des cas (mor­pho­lo­gie §1229-1234) et de l’aspect (1498-1518). 

ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 7. Partitiivi et par­ti­tif. Dernière mise à jour : 11.8.2021
Mises à jour après le 15.8.2022