Guide de pro­non­cia­tion française pour apprenants finnophones
20a. Liste complète des types de liaison

Pour les explications générales sur la liaison, se reporter à la page 20.

Liaisons obligatoires

en /z/ avec les déterminants les, des, aux, ces, mes, tes, ses, nos, vos, leurs ; quelques, certains, différents, plusieurs, divers, quels ; deux, trois, six, dix
en /t/ avec les déterminants cet, tout (tout un)
en /n/ avec les déterminants un, aucun, mon, ton, son
en /v/ avec neuf devant ans et heures ;
devant les autres mots, f se pro­non­ce f
19 ans diznœvɑ̃ , à 9 h anœvœʁ
le 9 avril lɶnœfavʁil, neuf enfants nœfɑ̃fɑ̃
en /n/ avec en préposition et/ou pronom devant le verbe en‿Espagne, en‿un‿an, en‿allant, en‿en‿achetant
en /z/ et /n/ avec les formes faibles des pronoms personnels sujet nous, vous, ils, elles, on
nous‿y penserons, elles‿écoutent, on‿y va,
en /z/ et /n/ avec les formes faibles des pronoms personnels complément du verbe nous, vous, ils, elles, en, les
Elle nous‿invite. Je vous‿ai vus. Emmène-les‿-y. On‿en‿a eu un // aussi (voir Liaison avec les nasales)
en /z/ avec les formes inversées des verbes à l’impératif prends‿-en, vas‿-y , achètes‿-en, prenons‿-en , prenez‿-en 
en /t/ avec les formes inversées des verbes répond-il ? attend-on ? chantent-elles ?
en /z/ dans le groupe adjectif + nom au pluriel de longues‿études, de grands‿efforts, ces dures‿épreuves
*en /z/ avec les prépositions sans, dans, chez, sous chez‿eux, sans‿argent, dans‿un an etc.
*en/z/avec très, plus (comparatif) suivis d’un adjectif très‿important, plus‿efficace
* en /t/avec quand et grand quand‿il a dit, un grand arbre ɛ̃gʁɑ̃taʁbʁ
* en /n/avec les adjectifs en nasale antéposés (dénasalisation de la voyelle) un bon ami, en plein air

* = liaisons théoriquement obligatoires : dans ces cas, la liaison est norma­le­ment obli­gatoire, mais, en fonction du niveau de langue, elle peut ne pas être faite. On peut entendre chez des jeunes par exemple : dans une cave dɑ̃ynkav. Le fait de ne pas respecter la liaison peut être interprété par exemple comme une volonté de se démarquer ottaa etäisyyttä d’un certain type de règles ou de mon­de des valeurs. L’apprenant de FLE doit faire ces liaisons, comme les autres liaisons obli­ga­toi­res, mais ne doit pas s’étonner que certains francophones ne les fassent pas.

Liaisons facultatives

Les liaisons sont présentées par ordre de fréquence décroissant :

Liaisons facultatives dans le groupe verbal
fréquente entre l’auxiliaire être et le participe passé il est‿arrivé, je suis‿arrivé
fréquente entre le verbe être et l’adjectif attribut c’est‿amusant, je suis‿étonné
un peu moins fréquente après avoir j’avais‿écouté, ils ont‿entendu.
mais impossible après les formes d’avoir en t (ont/avait, avaient/eut, eût, eurent) précédé du pronom te ils t’ont // entendu, elles t’avaient // attendu
(et non, *ils t’ont‿entendu, *elles t’avaient‿attendu)
possible avec as (du verbe avoir), mais rare et littéraire (poésie, opéra etc.) tu as‿appris
relativement peu fréquente entre assez et l’adjectif ou l’adverbe qu’il modifie C’est assez‿intéressant. Ce paysage est assez‿impressionant.
Mais on fait pas la liaison quand assez est complément du verbe
et on évite de la faire après pas‿assez (pour éviter les deux /z/ de liaison) : :
J’ai assez//attendu, on en sait assez // à ce sujet.

Ce n’est pas‿assez // explicite.
relativement peu fréquente après pas adverbe négatif : ce n’est pas‿efficace, elles n’ont pas‿accepté.
On la fait cependant fréquemment dans pas‿encore (notamment utilisé comme réponse).
assez peu fréquente après un semi-auxiliaire (devoir, aller etc.)  il doit‿arriver, je vais‿écouter, ils vont‿observer
assez peu fréquente après plus adverbe négatif : ce n’est plus‿efficace, ils n’ont plus‿accepté
encore moins fréquente après une forme verbale indépendante (sauf être avec attribut, voir ci-dessus)  j’avais‿un ami, ils entrent‿ici
mais dans l’expression Il était‿une fois Olipa kerran, on fait toujours la liaison  iletetynfwa (groupe figé)
La liaison en /ʁ/ après les infinitifs est revenue à la mode dans l’audiovisuel, mais dans la langue courante on ne la fait pas . aller‿au théâtre, parler‿encore
Liaisons facultatives dans le groupe nominal
entre un nom au pluriel et un adjectif postposé
(mais obligatoire quand l’adjectif est antéposé).
des livres(‿)intéressants
de grosses‿aiguilles
avec trois adjectifs en -er, liaison en /ʁ/ devant un nom : premier, dernier, léger (pas obligatoire, mais assez fréquente) : un léger‿incident ɛ̃leʒeʁɛ̃sidɑ̃
le dernier‿arrivant lɶdɛʁnjeʁaʁivɑ̃

Cas particuliers de liaisons facultatives

a. Liaison entre un nom au pluriel et un adjectif postposé

Cette liaison n’est pas obligatoire, alors qu’elle est obligatoire quand l’adjectif est antéposé. La cohérence est donc forte dans le groupe adjectif-nom, mais moins forte dans le groupe nom-adjectif :

des livres(‿)intéressants, des histoires(‿)amusantes etc.
dᴇlivʁɶzɛ̃tᴇʁᴇsɑ̃, dᴇzistwaʁzamyzɑ̃t ou dᴇlivʁɛ̃tᴇʁᴇsɑ̃, dᴇzistwaʁamyzɑ̃t

Mais : de grosses‿aiguilles, mes chers‿amis, adjectif antéposé, liaison obligatoire. Il existe cependant un certain nombre de groupes nom + adjectif postposé au pluriel qui forment une seule notion, autrement des mots composés, et dans lesquelles on fait quasi systématiquement la liaison : des huiles‿essentielles, voir liaison avec groupes figés.

b. Liaison en  /ʁ/

On peut faire la liaison en /ʁ/ avec les trois adjectifs premier, dernier, léger :

un léger‿incident ɛ̃leʒᴇʁɛ̃sidɑ̃
le dernier‿arrivant lɶdɛʁnjeʁaʁivɑ̃

Pourquoi ces trois adjectifs ? Parce que ce sont les seuls adjectifs terminés par er qui peuvent être antéposés. Les autres adjectifs en er sont postposés : du fromage fermier, un produit laitier, le revenu foncier etc. (sauf quelques rares exceptions ponctuelles comme l’entière responsabilité).

Dans le groupe nominal premierétage, on fait systématiquement la liaison, car le groupe est de­ve­nu figé et se comporte comme un mot composé : au premierétage opʁɶmjᴇʁetaʒ. Dans la liai­son après -er, l’aperture de la voyelle finale fermée /e/ devient variable devant /ʁ/ (/pʁɶ­mjᴇ­ʁe­taʒ/), puisque la voyelle n’est plus en position finale.

c. Liaison en  /z/

Comme dans le cas de la liaison en  /ʁ/ ci-dessus, on peut faire la liaison en /z/ avec des adjectifs antéposés au singulier terminés par un s ou un x, dont les plus fréquents sont gros, mau­vais, fameux, joyeux. Dans ce cas, l’adjectif se prononce de la même manière au singulier et au plu­riel :

un gros‿effort ɛ̃gʁozᴇfɔʁ / de gros‿efforts dɶgʁozᴇfɔʁ

Devant voyelle, l’adjectif mauvais antéposé se prononce de la même manière au masculin et féminin du singulier et au masculin du pluriel ; au féminin pluriel, la liaison se réalise comme/z/ long :

un mauvais‿exemple ɛ̃movᴇzᴇgzɑ̃pl
une mauvaise habitude ynmovᴇzabityd
de mauvais‿exemples movᴇzegzɑ̃pl
de mauvaises‿habitudes movᴇzːabityd

On peut considérer certains groupes nominaux comme des groupes figés, où on fait pratiquement toujours la liaison : Joyeux anniversaire !, un heureuxévènement (= une naissance, iloinen perhe­ta­pah­tu­ma), fournir un groseffort, il n’est pas mauvaishomme. Il peut y avoir des variations selon le style de langue ou les habitudes personnelles. Voir aussi d’autres cas particulier de liaisons après s au singulier ou au pluriel dans les Groupes figés.

On fait assez rarement la liaison au singulier après les adjectifs en -eux, comme fameux, joyeux, curieux. On peut dire que seul fameux peut être antéposé librement, les autres se trouvent surtout dans des groupes figés (joyeux anniversaire, un curieux homme erikoinen tyyppi).

d. Cas isolés de liaison avec adjectif au singulier

Il y a aussi d’autres cas isolés de liaison avec adjectif au singulier, comme un important‿effort /ɛ̃pɔʁtɑ̃tᴇfɔʁ/, un long‿article /lõgaʁtikl/, un gentil‿enfant /ʒɑ̃tijfɑ̃/ (on retrouve cette liaison en /j/ dans le mot gentilhomme ([aatelismies]) /ʒɑ̃tijɔm/. Ces liaisons ne sont cependant pas productives (on ne peut pas les extrapoler à d’autres noms) et de toute façon elles restent facultatives. Le plus simple est de ne pas faire la liaison dans de pareils cas.

e. Prépositions monosyllabiques

La liaison est obligatoire après les prépositions sans, dans, chez, sous ; elle est fréquente après dès, mais elle n’est pas obligatoire. Devant aujourd’hui, on la fait presque systématiqument : dès‿une heure ou dès// une heure, mais dès‿aujourd’hui.

La liaison est possible mais très rare après vers (vers eux), et il vaut mieux l’éviter ; elle est interdite devant un numéral, un article ou un nom propre. On pro­non­ce donc : vers une solution vɛʁynsolysjõ, vers huit heures vɛʁɥitøʁ, vers Annecy vɛʁansi.

f.  Prépositions plurisyllabiques

Après les prépositions de plus d’une syllabe, la liaison est facultative. Dans la langue courante, on la fait rarement (sauf après après et devant), et il vaut mieux l’éviter en dehors d’une pro­non­cia­tion soutenue :

après‿un échec, devant‿eux (liaisons relativement fréquentes)
d’après‿eux, depuis‿un an, à travers‿eux (liaisons rares)
pendant‿une heure, envers‿eux (liaison encore plus rares ou littéraires)
hormis//un seul cas (liaison interdite).

g.  Liaison après mais

La liaison (en /z/) après mais est relativement fréquente dans la pro­non­cia­tion soignée, mais elle est plutôt aléatoire. Dans la langue parlée courante, on ne la fait pas (sauf dans le groupe figé mais encore) :

Mais‿il est impossible de prédire quand on fait la liaison après mais.
On est // allés faire du shopping, mais // on a rien // acheté. (pro­non­cia­tion courante).

Groupes figés

Certains groupes de mots forment un ensemble ou une expression figée dans lesquels la consonne finale pro­non­cée anciennement s’est conservée et continue de se pro­non­cer systématiquement. On trouve des cas où il y a une liaison entre un nom au singulier et un autre élément (liaison au­jour­d’hui normalement interdite), ou des groupes nominaux dans lesquels on fait ré­gu­liè­re­ment la liai­son avec l’adjectif postoposé au pluriel (liaison aujourd’hui normalement facultative) :

de bas‿étage alhainen
le tiers-‿état tjɛʁzeta kolmas sääty
de temps‿à autre silloin tällöin
de temps‿en temps silloin tällöin
de plus‿en plus yhä enemmän
qui mieux‿est mikä parasta
de mieux‿en mieux aina vain paremmin
doux-‿amer duzamɛʁ suloisen katkera
(féminin douce-amère dusamɛʁ)
au premier‿étage toisessa kerroksessa
avant-‿hier avɑ̃tjɛʁ toissapäivänä
d’un bout‿à l’autre läpikotaisin
de haut‿en bas ylhäältä alas
de part‿et d’autre molemmin puolin
tout‿au moins ainakin
tout‿à fait aivan
tout‿au plus korkeintaan
un accent‿aigu akuutti
petit‿à petit ptitapti vähitellen
un petit‿ins­tant hetkinen
un petit‿ami poikaystävä
nuit‿et jour yötä päivää
bout‿à bout peräkkäin
mot‿à mot sanasta sanaan
mais‿encore mutta lisäksi; entäs mitä vielä?
pot‿à eau vesikannu
pot-‿au-feu lihakeitto
du tout‿au tout perustavalla tavalla
pont‿aux‿ânes helppo kysymys
soit dit‿en passant muuten
j’en suis fort‿aise kaikin mokomin!
trop‿aimable expression de politesse

Liaison avec -d pro­non­cé t :

de pied‿en cap dɶpjetɑ̃kap kiireestä kantapäähän
un pied-à-terre pjetɑ̃tɛʁ tilapäisasunto, kakkosasunto
grand‿ouvert gʁɑ̃tuvɛʁ ammollaan
de fond‿en comble dɶfõtɑ̃kõbl perusteellisesti

Groupes nominaux au pluriel où on fait toujours la liaison :

corps‿et biens kɔʁzebjɛ̃ miehineen päivineen (liaison normalement interdite)
promettre monts‿et merveilles luvata kuu taivaalta (liaison normalement interdite)
les huiles‿essentielles eteeriset öljyt -zesɑ̃- (liaison normalement facultative)
les Nations‿-Unies -zy (liaison normalement facultative)
les Champs‿-Élysées -zeli- (liaison normalement facultative) etc.

Au cas où… On trouve également un groupe « semi-figé », au cas où. Quand cette locution s’utilise comme locution conjonctionnelle introduisant une proposition subordonnée, la liaison est possible, mais facultative (et très peu fréquente dans la langue courante) : Vous nous préviendrez au cas où il y aurait des retards peut être pro­non­cé okazu, mais plus fréquemment okau.

Cependant, cette locution est aussi employée comme locution adverbiale qu’on ajoute en fin de phrase (comme si jamais), et dans ce cas-là, on la pro­non­ce assez fréquemment avec une liaison : J’ai emporté un parapluie, au cas où... okazu, Il faudrait peut-être réserver pour ce soir, au cas où... okazu.

Liaison interdite

Quand il n’y a pas de cohérence syntagmatique, la liaison ne se fait pas. Dans tous les autres cas que ceux énumérés ci-dessus, la liaison est donc interdite, notamment dans les cas suivants :

  1. après tout nom au singulier, sauf dans le cas de groupes figés : un enfant // intelligent, un cas // intéressant, un bien // immobilier, le temps // est humide, la paix // est signée, j’ai le pied // enflé. Ce type de liaison est néanmoins possible dans la déclamation, l’opéra, la chanson etc. Et s’entend parfois dans l’audiovisuel ou ailleurs par hypercorrectisme.
  2. entre le groupe nominal sujet (terminé par un nom ou un adjectif) au pluriel et le verbe : mes amis// ont dit, des gens// attendaient, des passants intrigués// approchaient, les taxis// arrivent,ou entre le groupe nominal pluriel et un autre groupe nominal : des enfants// avec des adultes, des chiens// et des chats.
  3. après le pronom sujet d’un verbe inversé (le pronom fait partie du syntagme verbal et se rapporte au verbe qui précède) : Ont-ils // accepté ?, A-t-on // essayé ?
  4. après un et aucun en fonction de pronom (le pronom fait partie du syntagme verbal et se rapporte au verbe qui précède) : j’en ai un // aussi, n’en donne aucun // aux enfants ;
  5. après le mot un désignant le chiffre « 1 » : un // et un // égale deux (1+1=2) ɛ̃eɛ̃egaldø
  6. après quelqu’un (l’élément un est pronom) : Quelqu’un // a téléphoné, Quelqu’un // a-t-il quelque chose à ajouter ? ;
  7. après les pronoms interrogatifs sujets ou adverbes interrogatifs : Lesquels // ont accepté ? Quand // est-il arrivé ? Comment // accepter ?,Combien // en veux-tu ? Mais on entend relativement fréquemment des gens faire la liaison après comment et quand (no­tam­ment dans l’audiovisuel).
  8. dans certaines formules interrogatives figées, on fait cependant toujours la liai­son : Comment allez-vous ? komɑ̃talevu, Quand est-ce que... kɑ̃tɛskɶ ; mais on ne fait pas la liaison dans le groupe comment est-ce que : Comment est-ce qu’il a appris ça ? komɑ̃ɛskilaapʁisa. casque-audio-avec-micro 5.6, 7.11.
  9. devant h disjonctif (voir Guide de grammaire), toutes les liaisons sont supprimées, même les liaisons théoriquement obli­ga­toi­res : un // hold-up, ces // haricots, le // hall, les // Halles, des // haches, des// hors-bords, en // haut, en // hauteur, la hauteur, ces // hérissons, le premier // héros, il est // handicapé etc. (on entend souvent faire la liaison avec handicapé, l’h semble perdre progressivement sa valeur de « dis­jonc­tif »). Dans le doute, il vaut mieux se conformer à la règle et ne pas faire la liaison.) casque-audio-avec-micro 11.10, 12.7, 12.8, 12.9
  10. après la conjonction de coordination et (il n’y a absolument aucun cas où on fasse la liaison après et, c’est l’une des rares règles sans aucune exception) : un homme et // une femme, en haut et // en bas ɑ̃oeɑ̃ba.
  11. après les participes passés qui sont un élément d’un temps composé d’un verbe : Il a mis // une chemise. J’ai écrit // une lettre. J’en ai pris // une. Les formes miz et ekʁit sont les formes du féminin mise, écrite, et faire la liaison reviendrait à ac­cor­der l’adjectif au féminin, ce qui est impossible si le complément direct ne précède pas le verbe. Là encore, il convient de noter que les hypercorrectismes sont fréquents. On fait la liaison si le participe passé est employé comme adjectif : ses incomprises‿idées.
    On fait aussi la liaison dans certains groupes figés, comme soit dit‿en passant muuten, ohimennen sanottuna.
  12. avec les adverbes en -ent : vraiment, extrêmement etc. (mais on entend actuellement de plus en plus gens faire la liaison ; on a entendu (France-Inter) : ... ce qui va méca­ni­que­mententrainer une augmentation.
  13. après le déterminant numéral cent quand il est suivi d’un autre numéral : cent-un sɑ̃ɛ̃, cent-onze sɑ̃õz, trois-cent-un tʁwasɑ̃ɛ̃. Quand cent est suivi d’un nom commençant par une voyelle, on fait la liaison en t devant ans (dans cent‿ans). Dans les autres cas, il vaut mieux ne pas faire la liaison (cent // euros), bien que certains puristes la préconisent. Quand cent est multiplié, la liaison se fait avec /z/ et elle est tout à fait courante : deux-cents‿invités, trois-cents‿euros etc.
  14. quand on veut isoler un mot pour le faire ressortir du contexte ou éviter des confusions, par ex­em­ple dans un contexte pédagogique (explications données par un orateur, un enseignant) : deo des « oh » (comparer  : dezo des os), ɛ̃ɶ un « e » (comparer  : ɛ̃nø un nœud). Quand il n’y a pas de risque de confusion, on fait la liaison : L’adjectif prend un e ɛ̃nɶ au féminin, il écrivait des o dezo très petits. Dans ce cas-là, l’élision devient facultative aussi. On peut dire (ou écrire) le e lɶ|ɶ ou l’e . C’est assez souvent le cas devant le mot un, quand on veut faire ressortir sa valeur numérale et le distinguer de l’article in­dé­fini (en appuyant sur le mot un) : L’écart d’espérance de vie n’est que de un an kɶdɶ|ɛ̃nɑ̃ entre les deux pays.
  15. Normalement, on ne fait pas la liaison avec les noms propres, mais la règle n’est pas absolue et l’usage est un peu flot­tant : chez// Anne, sans// Antoine, dans// Ivry etc.

La liaison avec les voyelles nasales

Les voyelles nasales sont des voyelles

En dehors de certaines exceptions, on ne peut pas faire de « liaison » avec les voy­el­les nasales, puisque ce sont des voyelles, sans élément consonantique. Il n’y a pas de liaison avec consonne nasale dans les séquences suivantes : Christian // est parti ce matin // à sept heures, du mouton// et des haricots, Jean// a téléphoné, l’Union// européenne etc.

Une erreur qu’on entend assez souvent chez les apprenants FLE (notamment finnophones) consiste à pro­noncer un /n/ dans avons devant voyelle : Nous avons acheté : *nuzavõnaʃte. Faire la « liaison » dans ce cas est une faute de pro­non­cia­tion qu’il faut éviter.

Liaison possible après une voyelle nasale

Cependant, dans un nombre de cas limité et précis, la pro­non­cia­tion d’un /n/ de liaison après une voyelle nasale devant un mot commençant par une voyelle est obligatoire. Ce sont les cas suivants :

Liaison interdite après une voyelle nasale

Mais même dans ces cas, la liaison après voyelle nasale peut être interdite :

– on fait la liaison seulement quand un et aucun sont déterminants ; quand ce sont des pronoms, on ne fait pas la liaison (dans ce cas-là, ces mots forment un ensemble syntaxique avec le verbe qui précède, pas avec les mots qui suivent) :

J’en veux un // au moins. Il faut en acheter un // avant de partir.
Je n’en vois aucun // ici. Il n’y en avait aucun // avec eux.

Pour cette raison, on ne fait jamais la liaison après quelqu’un (erreur fréquente chez les fin­no­pho­nes), qui est un pronom : quelqu’un // a téléphoné, quelqu’un // a dit.

– on ne fait pas la liaison quand un, en ou on se trouvent après le verbe dont ils sont le sujet ou le complément (inversion) :

J’en‿ai eu un‿autre. Mais : Prends-en // un // avec un réglage automatique.
Pense-t-on // aux conséquences ? A-t-on //appris quelque chose ?
Sait-on // au moins qui l’a fait ? Prends-en //autant que tu veux. Manges-en //un //aussi.

La phrase nous, on en a eu un en un an et demi [me saatiin yksi puolessatoista vuodessa]  se pro­non­ce Nous, on‿en‿a eu un // en‿un‿an // et demi nuõnɑ̃nayɛ̃ɑ̃nɛ̃nɑ̃edmi : après un, il n’y a pas de liaison, car un est un pronom, et après an il n’y a pas de liaison non plus, car la règle générale veut qu’on ne faisse pas la liaison avec les voyelles nasales.

Liaison avec bien et rien

On fait la liaison avec le mot bien s’il est suivi d’un adjectif qu’il détermine : bien‿habillé bjɛ̃nabije, bien‿élevé bjɛ̃nelve, bien entendu ! bjɛ̃nɑ̃tɑ̃dy. Dans les autres cas, quand bien ne porte pas sur l’adjectif, on ne fait pas la liaison : On vit bien // ici [täällä elää mukavasti]. On oppose donc ils sont bien arrivés avec liaison bjɛ̃naʁive « ils sont arrivés sans problèmes/sans encombres » et ils sont bien arrivés sans liaison bjɛ̃aʁive « ils sont effectivement arrivés ». Mais ce genre de subtilité échappe sans doute à certains utilisateurs, qui auront tendance à faire la liaison par habitude ou parce qu’elle semble plus élégante. Il règne donc un certain flottement sur le respect de cette règle, qui est fondamentalement liée à la grammaire.

Après le pronom indéfini rien, on peut faire la liaison dans la construction rien + infinitif : rien‿à faire, rien‿à dire etc. Dans les autres cas, il n’y a pas de liaison : Je ne veux rien // en plastique. Ces types de liaison sont de toute façon facultatifs, et là aussi, il règne un certain flottement à ce sujet, l’usage est assez variable d’un locuteur à l’autre.

Dans la langue parlée moderne (en dehors du style soutenu qui surexploite les liaisons), la liaison se limite en pratique à rien + infinitif et elle s’est lexicalisée avec certains verbes qui forment des expressions : rien à faire ! (dans le sens de « inutile, impossible »), rien à dire (dans le sens de « sans commentaires »), rien à ajouter (dans le sens de « c’est tout »), rien à redire (dans le sens de « c’est très bien »). Sinon, dans le français parlé, on prononcera y a rien à manger jaʁjɛ̃amɑ̃ʒe, J’ai rien à faire ʒeʁjɛ̃afɛʁ, ou j’ai rien à te dire ʒeʁjɛ̃adːiʁ, parce que rien ne forme pas une expression avec l’infinitif qui suit. De plus, le fait de faire la liason entre rien et à dans ce cas, et en particulier dans des ex­pres­sions courantes très familières du type j’en ai rien à cirer/à glander/à foutre serait in­com­pa­ti­ble avec le niveau de langue, la liaison relevant du code écrit. Mais, là encore, certains peuvent la faire, par une sorte d’hypercorrectisme (le fait de faire la liaison ne rend évidemment pas l’expression plus élégante).

Pas de liaison devant h disjonctif

Un h disjonctif empêche toute liaison (voir liaison interdite). Il empêche donc aussi la liaison après nasale : en// haut, en// hauteur, en// Hongrie, un// haricot, un// Hongrois, un// hibou, ton// hachoir, aucun// hérisson, en// hochant, en// hissant etc.

La liaison avec les adjectifs terminés par une voyelle nasale

Avec les adjectifs terminés par une nasale, on fait la liaison quand ils sont antéposés (= devant le nom) devant un nom commençant par une voyelle : on pro­non­ce un /n/, mais on dénasalise la voyelle nasale. Ainsi, dans certains cas, il n’y a phonétiquement pas de différence entre le masculin et le féminin :

kɛlbɔnelɛv = quelle bonne élève ou quel bon élève
lɑ̃sjɛnami = l’ancienne amie ou l’ancien ami

Il faut remarquer que cette liaison diffère des cas précédents, parce que dans ceux-ci, on prononçait un /n/ et une voyelle nasale, alors qu’ici, on pro­non­ce un /n/ et une voyelle orale ; il ne s’agit donc pas à pro­pre­ment parler d’une liaison avec voyelle nasale. Cela concerne l’adjectif bon et un nombre limité d’adjectifs terminés par /ɛ̃/ qui peuvent être antéposés : moyen, plein, ancien etc. :

un bon ami ɛ̃bɔnami, au moyen âge omwajɛnaʒ, en plein air ɑ̃plɛnɛʁ
un certain aspect ɛ̃sɛʁtɛnaspɛ, un vilain animal ɛ̃vilɛnanimal etc.

Au pluriel, l’adjectif se termine par un s, on fait donc la liaison en /z/ comme avec n’importe quel autre ad­jec­tif pluriel, et il n’y pas de dénasalisation : quels bons élèves kɛlbõzelɛv, ses anciens amis sezɑ̃sjɛ̃zami, certains experts sɛʁtɛ̃zɛkspɛʁ

Dans le divin enfant, on dénasalise en i : lɶdivinɑ̃fɑ̃. C’est le seul cas de dénasalisation avec i.

Liaison avec plus, tout/tous et neuf

La liaison avec plus
Liaison avec tout – tous

La liaison avec les mots tous/toutes et tous est parfois source d’incertitudes. Voici un résumé des règles :

Liaison avec neuf

Cas divers

Liaison avec nous

En ce qui concerne la liaison avec nous, on a assez peu de chances de l’entendre dans la langue parlée, car on exprime généralement la 1e personne du pluriel avec on : on est inquiets. On remarquera que dans ce cas, on fait la liaison (absolument obligatoire) entre on et est, mais on négligera le plus souvent de la faire entre est et inquiets, car il y aurait une sorte de contradiction entre le fait d’utiliser on (typique de la langue parlée) et le fait de faire la liaison après est (liaison facultative, caractéristique d’une langue plus soutenue). Dans un cas de ce genre, les hypercorrectismes, autrement dit le mélange entre la pro­non­cia­tion du code de la langue parlée et celle du code de l’écrit, sont fréquents (on pour­rait entendre des gens pro­non­cer onestinquiets).

Liaison avec eux/elles

On ne fait pas la liaison après le pronom eux quand il est employé comme sujet détaché. Ha­bi­tu­el­le­ment, on fait le détachement en utilisant d’abord un pronom disjoint (eux) puis en le reprenant par un pronom faible normal (Eux, ils ont dit...). Dans ce cas, on ne fait pas la liaison après eux, car ce pronom est alors, comme son nom l’indique, détaché, « isolé » du reste de la phrase (comme le signale la virgule à l’écrit) :

Eux, // ils ont dit que cela leur convenait.

Cependant, on peut aussi utiliser le pronom détaché eux employé seul devant le verbe, sans exprimer ensuite le pronom faible ils. Dans ce cas-là non plus, on ne fait pas la liaison :

Eux // ont dit que cela leur convenait.
Eux // étaient d’accord.

La pro­non­cia­tion øzõdi ou øzetᴇdakɔʁ serait agrammaticale.

Cette particularité ne concerne pas le pronom elles. En effet, on peut théoriquement utiliser elles (ou elle au singulier) seul en position détachée, mais comme la forme est identique au pronom faible, le caractère détaché du pronom apparait difficilement, sauf si on ont fait une pause très marquée. En général, on préfère utiliser le procédé normal de reprise du pronom détaché par le pronom conjoint. On ne fait évidemment pas non plus la liaison après elles pluriel quand il est en position détachée : Elles, // elles ont dit que cela leur convenait.

Liaison avec les semi-consonnes

Quelques mots commençant par une semi-consonne (yeux, ouailles, ouate, yeuse, huitre, huile) sont traités comme si l’initiale commençait par une voyelle (ce qui est le cas historiquement) : l’ouate, l’yeuse, l’huitre, l’huile, des‿huiles, ces‿huitres, tes‿yeux, ses‿ouailles. Mais dans les mots empruntés plus récemment, avec /w/ ou j (il n’y a pas d’emprunts récents avec /ɥ/ initial), on ne fait pas l’élision, ni la liaison : le yaourt (ou le yogourt), le watt, le yacht etc.

Liaisons rares
Liaisons fautives

La liaison est un phénomène qui provoque parfois des erreurs chez les fran­co­pho­nes eux-mêmes. On peut entendre des liaisons fautives qui s’expliquent par la force du mécanisme de cohérence syntagmatique. Comme les chiffres indiquent en général un pluriel et que le pluriel comporte très souvent une liaison avec /z/, certains pro­non­cent par exemple quatre amis fautivement *katʁɶzami (réalisé couramment sous la forme /kadzami/) au lieu de katʁami. De même, il n’est pas impossible d’en­tendre dire cent euros pro­non­cé *sɑ̃zøʁo Autre faute (assez fréquente) : il faudra étudier pro­non­cé *ilfodʁatetydje avec une liaison en t par analogie avec les formes ils pourront‿étudier etc. On a même relevé à la télévision suisse (mais cela aurait très bien pu être en France) *la décision a ététacceptée. Ces liaisons fautives peuvent s’en­ten­dre même chez des gens habitués à soigner leur langage. Il ne faut bien sûr pas les imiter, mais il peut être utile de savoir les reconnaitre (pour les éviter, justement) et d’en comprendre le mécanisme.

Il existe même des noms pour ces erreurs : la liaison fautive en /z/ s’appelle un « velours » et la liaison fautive en t un « cuir ». On rencontre également le « pataquès », qui est une confusion entre les consonnes de liaison : ce n’est pas à moi pro­non­cé *sɶnepatamwa au lieu de sɶnepazamwa (liaison facultative).

ISBN 978-951-39-7388-9 © Jean-Michel Kalmbach 2018-2022 | Version 1.0 | Mod. 27.5.2022