Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones
En finnois, la place des pronoms est plus ou moins fixe par rapport au verbe. En français, les formes pleines des pronoms personnels se placent généralement au même endroit qu’un groupe nominal (prépositionnel, détaché etc.). Mais les formes faibles sont mobiles. Elles se placent généralement devant le verbe ; aux temps composés des verbes, elles se placent devant l’auxiliaire (avoir ou être).
Dans certains cas, les formes faibles sont rejetées après le verbe (impératif, interrogation). Dans certains cas enfin, elles se placent devant l’infinitif quand celui-ci dépend d’un autre verbe. Cette mobilité s’oppose à la stabilité du finnois, où les pronoms complément se placent habituellement après le verbe :
Je le prends. | Otan sen. |
Prends-le ! | Ota se ! |
Ne le prends pas ! | Älä ota sitä. |
Il ne voulait pas le prendre. | Hän ei halunnut ottaa sitä. |
Tu le leur envoies. | Lähetät sen heille. |
Envoie-le-leur ! | Lähetä se heille. |
Ne le leur envoie pas ! | Älä lähetä sitä heille. |
Tu n’aurais pas dû le leur envoyer. | Sinun ei olisi pitänyt lähettää sitä heille. |
Malgré les apparences, en français la place des pronoms devant le verbe obéit à des règles relativement simples. Dans la réalisation orale, ces règles nécessitent cependant un certain entrainement, car les pronoms se réduisent à des groupes rythmiques caractéristiques qui ne s’apprennent que par la pratique.
Les pronoms personnels en fonction de sujet se placent devant le verbe, à la forme faible :
je chante, tu lis, nous faisons, elles reviennent, ils sont repartis, c’est utile etc.
Aux formes interrogatives inversées, c’est aussi la forme faible qui est employée. Cela concerne également la forme faible ce du pronom ÇA utilisée comme sujet devant certaines formes du verbe être :
Puis-je téléphoner ? ■ Voulez-vous qu’une infirmière vous accompagne ? ■ Ferez-vous une nouvelle offre ? ■ Aura-t-on assez de temps ? ■ Est-ce nécessaire ?
Entre la forme faible sujet et le verbe, on ne peut placer que l’adverbe négatif ne et/ou une forme faible complément :
Je ne te le dirai pas. ■ Nous ne voulions pas le lui dire.
Contrairement au finnois, on ne peut pas placer un adverbe comme souvent, déjà entre la forme faible sujet et le verbe (Erreur à éviter).
Les formes faibles des pronoms personnels en fonction de complément (direct et prépositionnel) du verbe se placent habituellement après le sujet (qui peut être lui-même un pronom personnel) et l’adverbe négatif ne, et immédiatement avant le verbe dont ils dépendent. Aux temps composés, ils se placent devant l’auxiliaire, selon le schéma suivant :
sujet (ne) pronom1 pronom2 verbe (pas) | |
sujet (ne) pronom1 pronom2 auxiliaire (pas) participe |
Les pronoms faibles compléments devant le verbe se placent selon un ordre régulier. Il y a une règle très simple à retenir : les pronoms me te se nous vous sont toujours en première position, avant les formes du pronom IL le, la, les, lui, leur, en, y ou du pronom ÇA le y en. Quand on a retenu cette règle, il n’y a plus beaucoup de possibilités de se tromper en plaçant plusieurs pronoms devant le verbe : des suites comme *le me ou *les te etc. sont donc impossibles :
Je te le donnerai. ■ Elles me les ont envoyées. ■ On nous y a amenés en car. ■ Le directeur vous l’expliquera. ■ On n’aura pas le temps de vous les montrer. ■ Je me le demande. ■ Elles s’y sont rendues. ■ On nous en a parlé. ■ Personne ne vous les avait montrés. ■ Il pourrait vous en prêter une. ■ Il me l’a appris. ■ Je te l’offre. ■ Tu ne le leur montreras pas. ■ Nous vous les présenterons. ■ Je ne le leur ai pas demandé.
Les autres pronoms se placent après les pronoms mentionnés ci-dessus, dans l’ordre suivant (à l’impératif affirmatif, l’ordre est différent) :
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | ||
---|---|---|---|---|---|---|
sujet (+ne) | me te nous vous se | le la les | lui leur | y | en | VERBE |
On peut utiliser comme moyen mnémotechnique la forme du triangle : les pronoms, dans l’ordre, rentrent exactement dans un triangle couché pointu, avec le mot le plus « petit », en, dans l’espace le plus réduit (la règle mnémotechnique est de se rappeler qu’il est impossible de mettre y dans la pointe, car le jambage dépasserait du triangle) :
On peut placer au maximum deux pronoms compléments devant le verbe. De plus :
a) on ne peut placer devant le verbe qu’un seul pronom complément de la série me te se nous vous et
b) on ne peut pas utiliser les pronoms lui /leur en même temps qu’un pronom de la série me te se nous vous.
c) on ne peut pas placer devant le verbe deux pronoms identiques *me me , *y y, *la la, *en en etc. La suite en en est possible (en en achetant), mais dans ce cas ce sont des mots de nature grammaticale différente (préposition + pronom), voir ci-dessous.
Ces pronoms personnels ne peuvent pas se placer en même temps devant le verbe parce que les formes me te se nous vous sont à la fois des formes CVD et CVP. Dans une phrase comme *il nous vous présentera (qui ressemblerait au finnois hän esittelee meidät teille), il serait impossible de décider laquelle des deux formes est le complément direct et laquelle est le complément prépositionnel (il présentera « vous à nous » ou « nous à vous » ?). Pour la même raison, une phrase comme *il lui nous présentera pourrait signifier *hän esittelee meille hänelle. S’il y a deux pronoms devant le verbe, on ne peut utiliser qu’une seule forme de pronom CVP (sauf dans le cas de y en).
Pour la même raison, on ne peut pas non plus utiliser simultanément les formes me te se nous vous lui leur avec des verbes à pronom réfléchi, puisque les formes des pronoms à sens réfléchi sont les mêmes (me te se nous vous). Il ne peut donc y avoir en même temps devant le verbe qu’un pronom personnel complément prépositionnel et une forme du pronom IL complément direct (je te le dis) :
sujet [me te se nous vous] [le la les en y] verbe :
sujet [le la les] [lui leur en y] verbe :
Le voisin nous appelle. ■ Nous y sommes allés ensemble. ■ Je ne les ai pas invités. ■ Nous nous le demandons. ■ Jean vous y emmènera. ■ Il ne nous en a pas parlé. ■ Je le leur ai déjà montré. ■ Ne le leur annonce pas encore ■ Est-ce que tu m’aimes ? – Oui, je t’aime. ■ Je lui ai recommandé la prudence. Elle ne m’a pas écouté. ■ Nous vous croyons. ■ Essaye de me comprendre. ■ Ce livre m’appartient. [appartenir à] ■ Je te téléphonerai ce soir. [téléphoner à] ■ Ils nous ont appris beaucoup de choses [apprendre à] Opimme heiltä paljon. ■ Nous ne vous demandons rien. [demander à] Emme pyydä teiltä mitään. ■ Des amis nous l’ont proposé. [proposer à] ■ M. le Maire vous l’avait présenté [présenter à]
Si le verbe a à la fois un complément de verbe direct (CVD) et un complément prépositionnel (CVP), le CVP est exprimé à la forme pleine avec préposition :
Il nous présentera à vous. [et non pas : *Il nous vous présentera.] ■ Ils m’ont confiée à vous. [et non pas : *Ils m’ont vous confiée.] ■ On m’avait recommandé à eux. [et non pas : *On me leur avait recommandé.] ■ Je me souviens de toi. [et non pas : *Je me te rappelle.] ■ Il s’est adressé à moi. [et non pas : *Il se m’est adressé.] ■ Nous nous intéressons à vous. [et non pas : *Nous nous vous intéressons].
À l’infinitif négatif, le groupe ne + négation est soudé devant le verbe. Dans ce cas, les pronoms se mettent entre ne pas (ne plus, ne jamais)… et le verbe :
ne pas le lui dire ■ ne pas s’en faire ■ ne pas y être allé. ■ ne pas y avoir été obligé. ■ ne jamais en avoir parlé ■ ne plus y penser
Dans la question avec inversion (interrogation directe), la place et l’ordre des pronoms ne changent pas par rapport à la phrase affirmative. Le cas échéant, le premier pronom complément, qui se retrouve en tête de phrase à cause de l’inversion du sujet, prend une majuscule :
Tu | le leur | as déjà dit. |
Le leur | as-tu déjà dit ? | |
On | y | pense encore. |
Y | pense-t-on encore ? | |
Il ne | vous en | a pas parlé. |
Ne | vous en | a-t-il pas parlé ? |
Elles | s’y | sont habituées. |
S’y | sont-elles habituées ? | |
Ne | s’y | sont-elles pas habituées ? |
me le | me les | m’y | m’en | le lui |
te le | te les | t’y | t’en | le leur |
se le | se les | s’y | s’en | la lui |
nous le | nous les | nous y | nous en | la leur |
vous le | vous les | vous y | vous en | les lui |
me la | l’y (le + y) | l’en (le + en) | les leur | |
te la | l’y (la + y) | l’en (la + en) | ||
se la | les y | les en | ||
nous la | lui en | vous la | leur en |
Exemples de combinaisons possibles :
Vous avez essayé de me le cacher. ■ Elles n’ont pas osé nous l’avouer. ■ Il faudra qu’il s’y habitue. ■ Je vous en reparlerai plus tard. ■ Il s’en est débarrassé. ■ Ce n’est pas moi qui le leur ai demandé. ■ Je la lui rendrai. ■ Il est difficile de ne pas le lui dire. ■ C’est moi qui les y ai mis. ■ On pourra l’y habituer peu à peu. ■ Nous avions essayé de l’en prévenir. ■ Je lui en parlerai quand j’aurai le temps. ■ Il leur en faudra encore. ■ Il y en a un, et il y en a même un beau. ■ Il y en aurait plusieurs.
1. La combinaison y + en est possible si en est complément direct du verbe (c’est le cas fréquemment dans l’expression il y a) :
Il y a encore de la tarte ? – Non, il n’y en a plus, Laure a tout mangé. ■ Nous avons trouvé de très bons vins bios dans ce petit magasin. Nous y en avons acheté deux cartons au total. ■ Tu voulais voir plus de photos sur l’Islande sur mon blog, et j’y en ai rajouté d’autres. ■ Tu as viré de l’argent sur le compte ? – Oui, j’y en mis hier. ■ Il y avait beaucoup de problèmes résolus, mais il y en avait encore beaucoup d’autres à résoudre. ■ Il y a assez de sel dans la sauce ? – Oui, j’y en ai rajouté un peu pour être sûr.
Excepté le cas courant et habituel de il y en a, l’utilisation de y en est cependant assez peu fréquent ; on utilise y ou en seul (avec éventuellement un adverbe comme là ou autre).
Nous avons trouvé de très bons vins bios dans ce petit magasin. Nous en avons acheté deux cartons au total. ■ Tu voulais voir plus de photos sur l’Islande sur mon blog, et j’en ai rajouté d’autres. ■ Tu as viré de l’argent sur le compte ? – Oui, j’en mis hier. ■ Il y a assez de sel dans la sauce ? – Oui, j’en ai rajouté un peu pour être sûr.
Si y et en sont tous les deux des compléments prépositionnels (CVP), il est impossible de les utiliser ensemble. Exemple de phrase erronée (authentique) relevée sur Internet :
Nous avons séjourné une semaine dans le logis du petit château. Nous *y en avons gardé un très bon souvenir (y = dans le logis CVP, en = [gardé un souvenir] de la semaine CVP).
2. On ne peut pas ajouter un y supplémentaire devant celui du verbe il y a pour renvoyer à un complément de phrase indiquant le lieu : on ne pas traduire siellä on, siinä on par *il y y a :
Siinä on paljon sokeria. *Il y (=siinä) y a beaucoup de sucre. → Il y a beaucoup de sucre dans ça / là-dedans. ou Ça contient beaucoup de sucre.
3. On ne peut pas faire coexister deux pronoms en devant le verbe, dont l’un serait une particule verbale et le second exprimerait la cause, *je n’en en peux plus, *j’en en ai marre, ou bien dont l’un serait un complément direct et et l’autre un complément prépositionnel :
Toin niitä sieltä. *J’en en ai rapporté. → J’en ai rapporté de là-bas.
Mais on peut utiliser le pronom en devant le verbe après la préposition en qui exprime le lieu ou sert à former un gérondif :
en en achetant ostamalla sitä/niitä (en = préposition, en = pronom CVD)
en en parlant puhumalla siitä/niistä (en = préposition, en = pronom CVP)
en en ajoutant, en en apprenant, en en écoutant souvent etc.
Quand le pronom faible est le complément d’un infinitif dépendant d’un autre verbe, il se place immédiatement devant l’infinitif, c’est-à-dire à la place où il se mettrait si l’infinitif était un verbe conjugué indépendant, et la place respective (keskinäinen) des pronoms ne change pas :
Il | le leur | donne. |
Il ne | le leur | donne pas. |
J’aurais voulu | le leur | donner. |
Il ne veut pas | le leur | donner. |
Il hésite à | le leur | donner. |
Il vient de | le leur | donner. |
Il va | le leur | donner. |
Je suis impatiente de pouvoir | le leur | donner. |
Ne faudrait-il pas | le leur | donner ? |
Je | vous y | aurais emmené. |
Je ne | vous y | aurais pas emmené. |
Il faudrait | vous y | emmener. |
Je n’aurais pas eu besoin de | vous y | emmener. |
Il n’aurait pas fallu | vous y | emmener. |
Il me semble inutile de | vous y | emmener. |
Il | y en | a beaucoup. |
Il n’ | y en | a pas beaucoup. |
Il n’ | y en | a pas eu beaucoup. |
Il doit | y en | avoir beaucoup. |
Il commence à | y en | avoir beaucoup. |
Il ne va bientôt plus | y en | avoir beaucoup. |
Il ne devrait pas | y en | avoir beaucoup. |
Il doit bien | y en | avoir un quelque part. |
Il ne peut pas ne pas | y en | avoir. |
Étudiants finnophones : malgré la régularité et la simplicité de cette règle, on constate souvent des erreurs : les apprenants de français langue étrangère (de toutes origines linguistiques) semblent s’affoler quand ils rencontrent une construction de ce type et éparpillent les pronoms n’importe où. Comme on le voit dans l’agencement des pronoms présenté ici, leur place ne varie absolument pas par rapport au verbe dont ils dépendent. Fondamentalement, le problème est plus d’ordre phonique et rythmique. En effet, les locuteurs « natifs » ne réfléchissent pas à la place et à l’ordre des pronoms : ils utilisent des séquences phoniques qui forment des blocs caractéristiques que l’usager a répété des milliers et des milliers de fois tels que /imlapadi/
(il ne me l’a pas dit), /ipøtlɶdiʁ/
(il peut te le dire), etc. Ces blocs sont fixes et immuables et l’usager natif n’a pas besoin de réfléchir à l’enchainement des pronoms.
Locuteurs natifs : quand le locuteur natif est confronté à une suite phonique moins fréquente, il est lui aussi obligé de réfléchir, ou bien il hésite. C’est ainsi que dans la langue courante, il est fréquent d’entendre utiliser la suite donne-moi-le au lieu de donne-le-moi, d’autant plus que la variante donne-moi-le est parallèle à la forme français parlé donne-moi-s-en. C’est aussi, au moins partiellement, pour ces mêmes raisons de schéma rythmique que les formes d’impératif terminées en ‑t’en ou en ‑m’y sont pratiquement inusitées (voir ci-dessous).
La règle concernant la place des pronoms faibles devant un infinitif dépendant d’un autre verbe n’a que peu d’exceptions :
a. Dans les propositions infinitives dépendant de verbes de perception, quand l’infinitif fonctionne comme verbe principal d’une complétive, le pronom se place devant le verbe dont dépend l’infinitif (et non pas devant l’infinitif, voir description détaillée) :
J’entends les enfants chuchoter. → Je les entends chuchoter. ■ [et non pas : *j’entends les chuchoter, qui serait l’équivalent du finnois kuulen heidän supattavan.] ■ Il regardait l’eau couler du toit. → Il la regardait couler du toit. ■ Tu ne sens pas le sol bouger ? → Tu ne le sens pas bouger ?
b. Faire + infinitif, laisser + infinitif : le pronom se place devant le verbe principal faire ou laisser :
Il a laissé tomber le vase. → Il l’a laissé tomber. ■ Je lui ai fait apprendre le texte par cœur. → Je le lui ai fait apprendre par cœur. ■ Je laisse les enfants jouer seuls. → Je les laisse jouer seuls. ■ Il faut laisser le produit agir. → Il faut le laisser agir. ■ Pour la réception, elle compte se faire faire une nouvelle robe chez une couturière. → Elle compte s’en faire faire une chez une couturière.
c. Dans la langue classique, les pronoms le la les complément direct d’un infinitif dépendant d’un verbe principal se placent devant le verbe principal :
J’ai seulement compris que la vie que je mène à Paris est encore plus agréable que je ne le pouvais croire. [Mme du Deffand] ■ On dit qu’il y a des gens fort polis dans cette ville-là ; je le veux croire. [Voltaire]
Les formes correspondantes en français standard seraient : je ne pouvais le croire, je veux le croire. Certains écrivains d’aujourd’hui écrivent encore de cette façon un peu archaïque, qui est tout à fait admise dans le style soutenu. Mais dans la langue courante, cela passe pour affecté ou franchement fautif. On en trouve cependant des emplois épisodiques dans la langue courante, par ignorance, hypercorrectisme ou inadvertance.
L’ordre des pronoms dans la phrase impérative négative est exactement le même que dans la phrase assertive :
Tu ne me le dis pas → Ne me le dis pas. ■ Tu ne l’y emmène pas → Ne l’y emmène pas. ■ Vous ne vous en débarrassez pas. → Ne vous en débarrassez pas. ■ Tu ne le lui rends pas. → Ne le lui rends pas. ■ Nous ne leur en donnons pas trop. → Ne leur en donnons pas trop. ■ Vous n’y penserez plus. → N’y pensez plus. ■ Ajouter le sucre. Le verser lentement. → Ajouter le sucre. Ne pas le verser trop vite.
Dans la phrase impérative affirmative, on fait l’inversion, autrement dit le pronom faible sujet se place après le verbe et est relié à celui-ci par un trait d’union :
Tu le fais. → Fais-le ! ■ Tu en prends encore ? → Prends-en encore ! ■ Est-ce que vous l’attendez ? → Attendez-le ! ■ Tu lui pardonnes ? → Pardonne-lui !
Ceci ne concerne cependant pas l’infinitif utilisé comme impératif. Le pronom complément d’un infinitif à valeur d’impératif se place devant l’infinitif, même à la forme affirmative. On trouve ces cas fréquemment, par exemple dans des recettes de cuisines :
Faire revenir les noix de saint Jacques sur feu vif. Les retourner avec une spatule. ■ Travailler la pâte avec une spatule. La laisser reposer une heure au réfrigérateur. En réserver la moitié. ■ Mettre les lentilles dans une casserole d’eau froide et les faire cuire 40 min avec le thym et le laurier. Lorsqu’elles sont cuites mais encore croquantes, les mélanger à la vinaigrette.
Les pronoms personnels et réfléchis me et te se mettent à la forme pleine moi et toi :
Vous me regardez. → Regardez-moi ! ■ Tu te calmes. → Calme-toi ! ■ Tu t’achètes une nouvelle voiture. → Achète-toi une nouvelle voiture !
Après les formes d’impératif en -e des verbes du 1er groupe et les formes va (d’aller) et aie (d’avoir), on ajoute un s de liaison devant en et y :
Mange un biscuit ! → Manges-en un ! ■ Pense au concert ! → Penses-y ! ■ Va au marché ! → Vas-y ! ■ Emporte de l’argent. → Aies-en toujours sur toi ! [forme rare] ■ Il n’y a pas que toi qui aimes le chocolat, laisses-en aux autres.
Remarque : en règle générale, la forme de personne 2 de l’impératif des verbes du 1er groupe n’a pas d’s.
Si le verbe a deux compléments qui sont des pronoms faibles, ces pronoms se placent également après le verbe. Ils sont reliés au verbe et entre eux par un trait d’union, selon un ordre particulier : après le verbe vient d’abord le complément direct, puis vient le complément prépositionnel (moi, lui, en, y, etc.) :
Dis-le-lui ! ■ Rends-le-nous ! ■ Donne-le-moi ! ■ Montre-les-leur ! ■ Apporte-les-leur.
Les pronoms y et en ne peuvent cependant pas se combiner aussi facilement avec les autres pronoms :
a. Pronom y : on peut appliquer la règle habituelle et combiner les pronoms personnels CVD avec le CVP y, selon le même ordre que ci-dessus (CVD + CVP) :
Emmène-nous-y ! ■ Apporte-les-y ! ■ Amène-l’y.
Mais dans la pratique, ces formes sont plutôt rares. On préfère dire par exemple emmène-moi là-bas ! ou utiliser une interrogation : est-ce que tu pourrais m’y emmener ? Dans la langue courante, on omet (jättää pois) tout simplement y :
Emmène-moi ! ■ Amène-la ! ■ Emmène-nous ! ■ Emmène-nous là-bas !
b. Pronom en : le pronom en peut être CVD (prends-en) ou CVP (parles-en). Quelle que soit sa fonction, il se place en deuxième position après le premier pronom :
Donne-m’en un peu ! ■ Voici des livres. Choisissez-vous-en deux. Occupez-vous-en ! ■ Prenez-vous-en autant que vous voulez ! Mais gardez-nous-en un. ■ Attention au mal des montagnes, prenez garde et méfiez-vous-en!
La forme verbe-t’en est pratiquement inusitée. De même, la combinaison verbe-lui-en est peu usitée. Le plus souvent, on formule l’ordre avec d’autres moyens ou on répète le nom au lieu de le remplacer par en : donne-lui un peu d’eau.
CVD | CVP | |
---|---|---|
VERBE | -le-, la-, -les- | moi, toi, lui nous, vous, leur |
CVD | CVP | |
VERBE | -m’, -t’, -l’- nous-, -vous-, -les- | y |
CVD/CVP | CVP/CVD | |
VERBE | -m’, -t’,-l’, -les- -nous-, -vous-, -lui-, -leur- | en |
Dans le français parlé, on utilise la forme faible du pronom en intercalant un s (comme dans chantes-en ou vas-y) après les pronoms qui ne sont pas terminés par s (donc après tous les pronoms sauf nous et vous), ce qui donne une série régulière par le rythme (le nombre de syllabes est le même) et la structure phonique :
garde-moi-s-en /-mwazɑ̃/
[français parlé]
prends-toi-s-en /-twazɑ̃/
[français parlé]
donne-lui-s-en /-lųizɑ̃/
[français parlé]
garde-nous-en /-nuzɑ̃/
[forme normale code écrit et français parlé]
prenez-vous-en /-vuzɑ̃/
[forme normale code écrit et français parlé]
donne-leur-s-en /-lœʁzɑ̃/
[français parlé]
Bien que les grammaires ignorent en général ces formes, pratiquement tous les francophones disent au moins occasionnellement de cette façon, et on peut sans problème utiliser ces formes dans le français parlé. Mais elles ne s’emploient pas à l’écrit ni dans un discours où on utilise le code écrit strict (par exemple conférence, présentation, etc., où l’utilisation de l’impératif est de toute façon assez limitée. Sur le même modèle, le français parlé utilise aussi des constructions expansées avec y :
Emmène-m’y. = français parlé : Emmène-moi-s-y.
Mais en général dans le français parlé, on utilise moins souvent le pronom y et on n’a donc pas besoin de ces formes. On dira simplement : emmène-moi.
ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 35. La place des pronoms faibles. Dernière mise à jour : 9.7.2022
Mises à jour après le 15.8.2022