Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones
Dans la grammaire française, on considère l’infinitif (infinitiivi) et le participe (partisiippi) comme des modes (modus, tapaluokka) verbaux, contrairement finnois, où ils sont considérés comme des éléments du groupe nominal (noms ou adjectifs). En français, l’infinitif et le participe sont en principe invariables, mais ils ont un temps (aikamuoto) présent et passé, et peuvent « se conjuguer » en changeant de personne, par exemple dans le cas des verbes à pronom réfléchi, ou se mettre à la forme négative (ce qui est impossible en finnois). De plus, le participe passé peut s’accorder en genre et en nombre.
L’infinitif et le participe sont d’un emploi très souple. L’infinitif s’utilise comme complément ou sujet d’un verbe, mais aussi de façon « indépendante » comme nom, en position détachée et comme forme d’impératif.
Le participe passé est utilisé dans la formation des temps composés des verbes (passé composé, plus-que parfait, futur antérieur etc.), et il est donc utilisé très souvent. Le participe présent, au contraire, est utilisé de préférence dans le code écrit. Il est donc moins fréquent que le participe passé, mais on l’emploie tout à fait couramment à l’écrit. Le participe présent ou passé peut remplacer des propositions subordonnées adverbiales.
Le participe passé utilisé pour la formation des temps composés (temps du passé, passif) peut, selon les cas, s’accorder en genre et en nombre avec le sujet ou le complément direct du verbe. En règle générale, quand l’auxiliaire est avoir, le participe ne s’accorde pas, et quand l’auxiliaire est être, il s’accorde. Mais il y a beaucoup de cas particuliers, voir l’accord du participe passé.
Le participe présent ou passé forme composée sert aussi à former le gérondif (pré sent ou passé).
L’infinitif est traditionnellement considéré comme la forme de base du verbe et c’est celle qui est est donnée comme entrée (hakusana) dans les dictionnaires quand on présente un verbe. Il n’y a donc pas à mémoriser de forme particulière.
Le participe présent se forme sur la base de la personne 4 de l’indicatif présent :
marchons → marchant, rougissons → rougissant, rompons → rompant, mentons → mentant, paraissons → paraissant, craignons → craignant, traduisons → traduisant etc.
Les exceptions sont rares, il n’y en a que trois :
être → étant, avoir → ayant, savoir → sachant
Le participe passé est la forme verbale simple formée habituellement sur la base du passé simple (qui diffère parfois de celle du présent). Les formes du participe passé varient selon les conjugaisons :
1e conjugaison : terminaison é ;
2e conjugaison : terminaison i ;
3e conjugaison : terminaisons vocaliques (-i, -u) ou consonantiques (-s, ‑t).
Exactement comme en finnois (ou en anglais, suédois etc.) le participe passé est utilisé pour former les temps composés (liittomuoto) des verbes (passé composé, futur antérieur, plus-que-parfait etc.).
L’infinitif et le participe présent sont des formes invariables, qui ne prennent pas de marque de genre ou de nombre. Mais chacun des deux peut se conjuguer, et dans cette conjugaison, on peut utiliser des marques de personne et de genre ou de nombre :
L’infinitif passé se forme avec l’infinitif présent de l’auxiliaire et le participe passé, et, de la même manière, le participe passé forme composée se forme avec le participe présent de l’auxiliaire et le participe passé :
marcher → avoir marché / ayant marché
jouer → avoir joué / ayant joué
avoir → avoir eu / ayant eu
être → avoir été / ayant été
appeler → avoir appelé / ayant appelé
rougir → avoir rougi / ayant rougi
mentir → avoir menti / ayant menti
rendre → avoir rendu / ayant rendu
comprendre → avoir compris / ayant compris
mettre → avoir mis / ayant mis etc.
Certains verbes intransitifs se conjuguent avec l’auxiliaire être :
sortir → être sorti / étant sorti
entrer → être entré / étant entré
naitre → être né / étant né
Au passif, on utilise le passif de l’auxiliaire et le participe passé :
être imité / étant imité → avoir été imité / ayant été imité.
être suivi / étant suivi → avoir été suivi / ayant été suivi
être observé / étant observé → avoir été observé / ayant été observé.
être compris / étant compris → avoir été compris / ayant été compris
être évité / étant évité → avoir été évité / ayant été évité.
être appris / étant appris → avoir été appris / ayant été appris
Le participe de l’infinitif passé peut s’accorder en genre et en nombre :
pour être partie trop tard / étant partie trop tard ■ après avoir été découvertes / ayant été découvertes ■ faute d’avoir été observées / n’ayant pas été observées ■ sans avoir été écoutés / n’ayant pas été écoutés ■ pour avoir été apprises trop vite / ayant été apprises trop vite
Remarque : attention à ne pas confondre les participes passés formes composées de certains verbes intransitifs avec les participes présents passifs des verbes transitifs : étant parti (forme composée du participe passé) vs étant imité (participe présent passif). Dans certains cas, une même forme peut avoir deux valeurs :
étant sorti
a) présent passif de sortir « viedä ulos »
b) participe passé forme composée de sortir « mennä ulos »
Dans le cas des verbes à pronom réfléchi, le pronom varie en fonction de la personne et, au passé, le participe passé s’accorde éventuellement en genre et en nombre. C’est là qu’on voit le plus nettement que l’infinitif et le participe se conjuguent :
se lever
m’être levée, t’être levée, s’être levée, nous être levées
m’étant levée, t’étant levée, s’étant levée, nous étant levées etc.
s’habiller
m’être habillée, t’être habillée, vous être habillées, s’être habillées
m’étant habillée, t’étant habillée, vous étant habillées, s’étant habillées etc.
se demander (qch)
m’être demandé, t’être demandé, s’être demandé, nous être demandé
m’étant demandé, t’étant demandé, s’étant demandé, nous étant demandé etc.
se regarder → vous être regardés / vous étant regardés
se téléphoner → après nous être téléphoné / nous étant téléphoné.
s’endormir → après vous être endormies / vous étant endormies
se lever → après m’être levé / m’étant levée
se consulter → avant de nous être consultés / nous étant consultés
s’enfuir → après s’être enfuies / s’étant enfuies
se tromper → pour vous être trompées de date / vous étant trompées de date
se rendre compte → après m’en être rendu compte / m’en étant rendu compte
Remarque : cette particularité est source d’erreurs fréquentes chez les apprenants finnophones (et autres apprenants de français langue étrangère), qui semblent souvent considérer que le verbe à pronom réfléchi se « conjugue » toujours avec le pronom de personne 3/6 se. Exemples de formes erronées : Après *s’être levée, je suis sortie. → Après m’être levée, je suis sortie, Après *s’être arrêtés, nous avons continué le voyage. → Après nous être arrêtés… etc.
L’infinitif et le participe peuvent aussi se mettre à la forme négative. À l’infinitif présent, le groupe ne…pas (ou ne…plus etc.) est soudé (ne pas, ne plus etc.) et se place devant l’infinitif, mais au participe, on observe l’ordre des mots normal de la négation, ne précède l’auxiliaire, et le mot négatif le suit :
accepter → ne pas accepter / n’acceptant pas
refuser → ne pas refuser / ne refusant pas
remarquer → ne plus remarquer / ne remarquant plus
dire → ne jamais dire / ne disant jamais
accepter → ne pas encore accepter / n’acceptant pas encore
ajouter le sucre → ne pas encore ajouter le sucre / n’ajoutant pas encore le sucre
Cependant, l’adverbe nulle part se place après l’infinitif :
Ne stationner nulle part où il y a danger d’avalanche. ■ Il ne court pas de place en place pour se montrer partout et ne rester nulle part.
On peut aussi former des infinitifs passés (actifs, passifs ou à pronom réfléchi) à la forme négative. Aux temps composés, on met en principe le deuxième mot négatif après l’auxiliaire, contrairement au présent de l’infinitif (où ne pas se met soudé avant le verbe) :
n’avoir pas compris ■ n’avoir jamais ri ■ pour n’être jamais allé en Italie koska hän ei ollut koskaan käynyt Italiassa
L’usage est cependant un peu flottant, car la langue moderne courante préfère mettre les deux mots négatifs devant l’infinitif. Le plus simple est donc de mettre ne pas, ne jamais etc. toujours groupé devant l’infinitif, au présent comme au passé (sauf dans le cas de nulle part, qui se place toujours après le verbe), même si on rencontre de nombreux cas dans le code écrit où ces mots se placent de part et d’autre du verbe ou de l’auxiliaire.
Mais à la forme composée du participe passé, on utilise l’ordre normal des mots négatifs :
comprendre : ne pas avoir compris cette réalité / n’ayant pas compris cette réalité
s’enfuir : ne pas s’être enfuis / ne pas s’étant pas enfuis
se scandaliser : ne pas s’être scandalisée / ne s’étant pas scandalisée
accepter : ne pas encore avoir accepté / n’ayant pas encore accepté
sortir : ne pas être sorties / n’étant pas sorties
se moquer : ne pas s’être moquées / ne s’étant pas moquées
s’en aller : ne pas s’en être allés / ne s’en étant pas allés
ne rester nulle part / ne restant nulle part
n’être resté nulle part / n’étant resté nulle part
pour n’être jamais allées en Italie / n’étant jamais allées en Italie
N’ayant pas pu trouver de pharmacie ouverte le dimanche après-midi, elle a dû aller aux urgences. ■ Les jeunes ayant travaillé quelques années et ayant terminé leurs droits aux ASSEDIC n’ont pas droit au RMI, alors qu’un jeune ayant fait de longues études mais n’ayant jamais travaillé peut y avoir droit dès la sortie de l’université.
Au passif, on applique les mêmes règles :
être compris / étant compris → ne pas être compris / n’étant pas compris
être observé / étant observé → ne pas être observé / n’étant pas observé
Aux formes passées (composées), il y a donc trois éléments verbaux :
avoir été compris / ayant été compris → ne pas avoir été compris / n’ayant pas été compris
avoir été observé / ayant été observé → ne pas avoir été observé / n’ayant pas été observé
La « conjugaison » de l’infinitif est illustrée par cette liste de conditions requises pour le don du sang figurant sur le site Internet d’une commune française :
Être âgé de 18 ans à 60 ans
être en bonne santé
peser au moins 50 kg
ne pas avoir subi de soins dentaires (extraction, détartrage etc.) au cours des 3 derniers jours
ne pas avoir subi une opération chirurgicale ou une endoscopie dans les 6 derniers mois
ne pas présenter actuellement une infection aigüe
ne pas prendre des antibiotiques
ne pas être revenu d’un pays tropical (zone de paludisme) depuis moins de 4 mois
ne pas avoir d’anémie ou prendre du fer
ne pas avoir été transfusé, même il y a longtemps
ne pas avoir subi de greffe de cornée ni de dure-mère
ne pas avoir dans sa famille de personne souffrant de la maladie de Kreutzfeld-Jakob
ne pas avoir reçu un traitement par l’hormone de croissance
Avec les pronoms indéfinis semi-négatifs, l’ordre des mots pose certains problèmes. Rien se met normalement avant l’infinitif (groupé avec ne comme dans le cas de ne pas), alors que personne, aucun et nul se placent après l’infinitif ; au participe, on observe la règle normale :
ne rien révéler / ne révélant rien
ne voir personne / ne voyant personne
ne prendre aucun rendez-vous / ne prenant aucun rendez-vous
ne se donner nulle peine / ne se donnant nulle peine
Au passé, à l’infinitif et au participe, rien se place entre l’auxiliaire et le participe passé, tandis que personne, aucun et nul se placent après tout le groupe infinitif (code écrit et français parlé) :
n’avoir rien vu / n’ayant rien vu
n’avoir rien dit / n’ayant rien dit
n’avoir jamais rien tenté / n’ayant jamais rien tenté
n’avoir vu personne /n’ayant vu personne
n’avoir essayé aucune autre solution / n’ayant essayé aucune autre solution
n’être tombé sur aucune erreur / n’étant tombé sur aucune erreur
L’infinitif peut être utilisé comme noyau verbal d’une proposition complétive sujet, attribut ou complément d’une autre proposition. Dans ce cas, il est en général précédé de la conjonction de :
Nos voisins ont décidé de déménager. ■ Il est normal de s’inquiéter un peu de l’avenir de ses enfants. ■ Il devient de plus en plus difficile d’acheter un appartement à Paris. ■ Ça serait sympa de sortir ensemble un de ces soirs.
sauf dans certaines constructions : complétive sujet antéposé au verbe de la principale (a) complétive complément de verbes de perception (b), ou complétive complément de verbes déclaratifs (c) :
(a) Ne pas assez dormir nuit à la santé.
(b) J’entends les enfants se disputer.
(c) Nous estimons ne pas avoir à vous répondre.
L’infinitif peut aussi former une subordonnée adverbiale :
Faute d’avoir réservé à temps, nous avons dû payer le prix fort. ■ Après avoir obtenu son bac, elle a passé un an en Inde. ■ Il est parti dans sa maison de campagne afin d’être plus tranquille pour terminer son livre. ■ Après avoir obtenu des crédits supplémentaires, la bibliothèque a pu acheter de nouveaux ordinateurs.
Dans le français parlé, on peut utiliser l’infinitif seul en position détachée en tête de phrase, autrement dit en prolepse, avec dislocation à gauche. Il est aussi souvent utilisé en position de rappel, par dislocation à droite. Il est alors systématiquement précédé de la conjonction de :
Annuler, c’est impossible maintenant. ■ Ça te dirait, de partir dès demain ? ■ Mais jça m’intéresse pas, moi, de partir trois mois au bout du monde !
En français, l’infinitif est parfois utilisé comme un nom. Il est alors sans genre grammatical. Dans cet emploi, il correspond à l’infinitif finnois en -minen. La plupart du temps, les infinitifs utilisés comme noms sont cependant devenus des noms à part entière, qui ne sont plus sentis comme des infinitifs :
le rire, le souvenir, le souper, le devenir ( = l’évolution), le lever du soleil, le boire et le manger etc.
D’autres infinitifs nominalisés ne peuvent s’employer que dans certains contextes ou dans un emploi figé, par exemple l’expression le sortir de / au sortir de, où sortir est synonyme de sortie :
Malgré tout, quels sont les nouveaux rapports de force au sortir de la guerre ? [ = à la sortie] ■ Sa Troisième symphonie à l’héroïsme triomphant marque le sortir de la crise de 1802. [ = la sortie]
En français moderne, on utilise typiquement l’infinitif nominalisé dans le discours de type philosophique :
le non croire, le renaitre ■ Exposé sur La mort et le mourir chez Montaigne [Dans la langue courante, on dirait le fait de ne pas croire, le fait de renaitre etc.]
En français, l’infinitif est couramment utilisé comme impératif pour donner des instructions ou, à la forme négative, des interdictions diverses. À la forme affirmative, il correspond en finnois au passiivi à valeur prescriptive, tandis qu’à la forme négative, il se rend souvent en finnois par ei saa + infinitif ou gn+ kielletty :
Danger : ne pas manier l’équipement ou les câbles pendant les périodes d’activité orageuse ■ Ne pas parler au conducteur pendant la marche. Ne pas se pencher dehors, s’appuyer contre les portes ou s’assoir le long du pare-brise [règlement d’une compagnie de transports] ■ Dimanche 28 décembre, dans le sens des retours, éviter les grands axes (A11, A10, A71, A13, A6) convergeant vers Paris de 15 à 20 heures [conseils de Bison futé] ■ Service minimum dans les transports : ne pas toucher à la loi de 2007, dit le rapport de la mission de l’Assemblée nationale. ■ Ne pas abuser de quelque au singulier !
Il est utilisé par exemple dans des textes sur des emballages d’aliments, de médicaments ou d’autres modes d’emploi, et notamment souvent dans des recettes de cuisine (en finnois, on utilise en général l’impératif ou le passiivi) :
Bien agiter avant usage ■ Ne pas dépasser la dose prescrite ■ Ne pas laisser à la portée des enfants ■ Lire les précautions d’emploi ■ Conserver au frais après ouverture ■ Ne pas recongeler ■ Bien mélanger la pâte, puis la placer une heure au réfrigérateur.
Recette de terrine de saumon :
Faire chauffer le lait et le verser sur le pain pour en faire une panade.
Dans un mixer : mettre les filets de merlan, la panade, le beurre et mixer.
Ajouter le jaune d’œuf, les deux œufs entiers et mixer à nouveau.
Ajouter la crème fraiche, le poivre et la muscade.
Beurrer un moule à cake ou une terrine.
Tapisser le fond du moule de saumon fumé.
Verser la moitié de la préparation précédente, déposer les filets de sole préalablement passés à la poêle, puis recouvrir avec le reste de préparation.
Faire cuire une heure au bain-marie.
Laisser au réfrigérateur jusqu’au lendemain.
Le pronom complément d’un infinitif à valeur d’impératif se place devant l’infinitif, même à la forme affirmative. Il ne suit donc pas les règles particulières concernant la place des pronoms à l’impératif affirmatif :
Faire revenir les noix de saint Jacques sur feu vif. Les retourner avec une spatule.
Travailler la pâte avec une spatule. La laisser reposer une heure au réfrigérateur.
Couper les fanes des carottes et en réserver la moitié.
Mettre les lentilles dans une casserole d’eau froide et les faire cuire 40 min avec le thym et le laurier.
Lorsqu’elles sont cuites mais encore croquantes, les mélanger à la vinaigrette.
Avec un impératif conjugué, les formes en italiques seraient respectivement :
Faites revenir les noix de saint Jacques sur feu vif. Retournez-les avec une spatule.
Travaillez la pâte avec une spatule. Laissez-la reposer une heure au réfrigérateur.
Coupez les fanes des carottes et réservez-en la moitié.
Mettez les lentilles dans une casserole d’eau froide et faites-les cuire 40 min avec le thym et le laurier.
Lorsqu’elles sont cuites mais encore croquantes, mélangez-les à la vinaigrette.
Avec un verbe ou une construction prépositionnelle suivis de l’infinitif, on peut former des périphrases verbales, très employées dans la langue de tous les jours.
Cette périphrase verbale exprime qu’une action est en cours et n’est pas terminée. Elle peut correspondre par exemple au finnois olla + infinitif en -mA à l’inessiivi, olla tekemässä, olla katsomassa. Plus fréquemment, quand en finnois le verbe a un complément direct (finnois objekti) l’idée que l’action du verbe n’est pas achevée est exprimée par l’utilisation du partitiivi :
Je suis en train de lire un nouveau roman absolument passionnant. ■ Où est Papa ? – Il est en train de laver la voiture.
On qualifie parfois la périphrase être en train de + infinitif de « présent progressif » (comme en anglais). Mais le français n’accorde pas une très grande importance à cet aspect. L’utilisation de la périphrase en train de + infinitif n’est pas obligatoire ni systématique, à la place on utilise souvent simplement le présent ou bien un adverbe comme actuellement, en ce moment :
Où est Maman ? – Elle gare la voiture. ■ Mes amis vont aller en Islande et en ce moment ils apprennent l’islandais.
Les constructions olla + -mAssA se traduisent en français par un présent simple ou par d’autres périphrases verbales :
Missä viivyt? – Olen tulossa! Mais qu’est-ce que tu fais ? – J’arrive ! ■ He ovat eroamassa. Ils sont sur le point de divorcer. ■ Olin juuri sanomassa, että konsertti on peruutettu. J’allais justement dire que le concert est annulé.
Cette périphrase exprime qu’une action est presque en train de se réaliser ou qu’elle se réalisera dans très peu de temps :
Nous sommes sur le point de partir en vacances. ■ Ma fille est sur le point de terminer ses études.
On l’utilise assez souvent à l’imparfait pour indiquer une action qui a été interrompue :
On était sur le point de sortir quand il a commencé à pleuvoir.
Le verbe aller suivi d’un infinitif sert à former une périphrase qui exprime une intention, un projet :
Cet été, je vais aller en France. ■ Tu n’as pas compris ? Alors je vais t’expliquer.
Cette périphrase sert aussi à exprimer un évènement immédiat, très proche dans le futur :
Dépêchez-vous, l’embarquement va commencer ! ■ Attention, tu vas tomber !
Dans la terminologie grammaticale traditionnelle, on appelle la périphrase aller + infinitif « futur proche ». Cette appellation est doublement trompeuse, car quand la périphrase exprime le futur, c’est un futur très proche, quasi immédiat. D’autre part, le plus souvent, aller + infinitif exprime une intention (dont la réalisation, par définition, se situe évidemment dans l’avenir). La phrase
Qu’est-ce que tu vas faire ce soir ?
signifie en substance « est-ce que tu as décidé ce que tu vas faire ce soir ? ». Si on voulait exprimer le futur, on utiliserait simplement le présent, qui est le temps le plus fréquent en français pour indiquer une action située dans l’avenir :
Qu’est-ce que tu fais ce soir ?
Il faut donc éviter de présenter la périphrase aller + infinitif comme une sorte de futur « facile » qui permet de remplacer le futur en -r. Fondamentalement, aller + infinitif n’exprime pas le futur. Comparer :
Je vais en France cet été. (futur)
Je vais aller en France cet été. (intention)
La périphrase formée de venir de + infinitif exprime une action qui s’est achevée récemment. Pour cette raison, dans la terminologie grammaticale traditionnelle, on l’appelle souvent « passé récent », mais, contrairement au passé simple ou au passé antérieur, ce n’est pas à proprement parler un temps de la conjugaison. En finnois, la même idée est exprimée par l’adverbe juuri utilisé avec un perfekti (quand venir est au présent) ou un pluskvamperfekti (quand venir est à l’imparfait) :
Le dernier train de la journée vient de partir (viimeinen juna on juuri lähtenyt), pas de chance ! ■ Nous venions justement de rentrer (olimme juuri palanneet) de promenade quand nous avons appris la naissance de notre petite-fille.
On peut aussi exprimer cette idée par des adverbes comme à l’instant :
J’ai terminé le livre à l’instant.
Nous sommes rentrés à l’instant.
Dans sa forme simple chanté, écrit, vu, donné, noirci, attendu etc., le participe passé d’un verbe transitif direct (se construisant avec complément de verbe direct) a toujours une valeur passive :
chanté laulettu ■ écrit kirjoitettu ■ vérifié tarkistettu ■ exclu poissuljettu ■ les personnes invitées kutsutut henkilöt ■ mal compris väärin ymmärretty ■ tout compris kaikki mukaanluettu
En revanche, le participe passé d’un verbe intransitif a un sens « actif », comme en finnois :
revenu palannut, parti lähtenyt, tombé pudonnut, disparus kadonneet etc.
Pour traduire des formes actives comme pitkään laulanut ou ranskaa opiskellut, il faut utiliser la forme composée du participe, ayant longtemps chanté, ayant étudié le français (voir ci-dessous).
De nombreux participes passés s’emploient comme adjectifs : surpris, énervé, étonné, déçu etc. Un participe peut donc être un élément d'une forme verbale ou un adjectif. Comparer :
Les cyclistes étaient énervés par le bruit des camions qui passaient tout près. [imparfait passif de énerver]
Les cyclistes étaient énervés à cause des spectateurs qui se pressaient sur le bord de la route. [adjectif énervé]
Les randonneurs avaient été surpris par la pluie et avaient dû se réfugier sous un rocher. [plus-que-parfait passif du verbe surprendre]
Les randonneurs avaient été surpris de découvrir des moutons à cette altitude élevée. [adjectif]
Ces différences sont en général faciles à identifier, mais certaines expressions idiomatiques peuvent poser plus de problèmes :
adjectif
J’aimerais bien m’acheter ce portable, mais vraiment, ce n’est pas donné !
[la locution signifie : se maksaa melkoisesti]
passif
Ce n’est pas donné à tout le monde de savoir faire la cuisine comme ça.
[passif impersonnel de donner].
passif
Mademoiselle Victoire a été bien fatiguée par une vilaine angine, mais sa forme olympique revient à grand pas.
adjectif
Gersande, qui a été bien fatiguée deux jours avant, a participé à la journée avec sa bonne humeur habituelle et a gouté à la joie de revoir ses cousines ! [voir le sens de bien].
La même différence se retrouve dans l’interprétation de la valeur temporelle du passif, surtout dans l’opposition entre présent et passé. La distinction entre être + participe passé et être + adjectif peut parfois être floue. Dans l’exemple suivant, interdit est un adjectif :
Le port d’arme est interdit. Aseen kantaminen on kielletty [nykyään].
Avec un temps composé, il peut y avoir confusion, car le temps composé (par exemple passé composé ou plus-que-parfait) peut avoir deux valeurs : évènement passé (verbe passif) ou état passé (verbe être + adjectif). Comparer :
La vente des pétards a été autorisée. Paukkupommien myynti sallittiin [esim. eilen].
La vente des pétards a été autorisée. Paukkupommien myynti on ollut sallittu [mutta on nykyään kielletty].
Dans la plupart des cas, le contexte permet de trancher, car il y a un complément de phrase qui précise le sens :
La France est divisée [présent] en départements. Ranska on jaettu departementteihin.
La France a été divisée [passé composé passif] en départements à la Révolution. Ranska jaettiin departementteihin vallankumouksen aikana.
La différence est parfois moins facile à saisir avec certains adjectifs :
Le crime était prémédité. Murha oli harkittu. adjectif.
Le crime avait été prémédité. Murha oli ollut harkittu. adjectif.
Le crime avait été prémédité depuis longtemps. Murhaa oli kauan harkittu. construction passive
Le participe passé forme simple est un adjectif. Le participe passé forme composée est une forme verbale et un temps verbal : c’est en quelque sorte le « passé composé » du participe. Il se forme et se conjugue avec le participe présent de l’auxiliaire (avoir ou être) et le participe passé du verbe.
La forme composée du participe passé s’emploie principalement pour exprimer le passé du participe d’un verbe transitif actif. En effet, comme le participe passé d’un verbe transitif direct a toujours un sens passif (chanté = laulettu, voir ci-dessus), la forme composée fournit le moyen former un participe de sens passé ayant une valeur active, qui peut être employé par exemple dans les propositions participiales :
chanté = laulettu
ayant chanté = laulanut
On peut également utiliser une forme composée quand le verbe est au passif, mais elle a le même sens que la forme simple (chanté = ayant été chanté), et le plus souvent on utilise la forme simple. On obtient donc les correspondances suivantes entre le finnois et le français :
Verbes transitifs
chanté ou ayant été chanté laulettu ~ ayant chanté laulanut
vu ou ayant été vu nähty ~ ayant vu nähnyt
compris ou ayant été compris ymmärretty ~ ayant compris ymmärtänyt
refusé ou ayant été refusé hylätty ~ ayant refusé hylännyt
Verbes intransitifs
parti ou étant parti lähtenyt
tombé ou étant tombé pudonnut
Le participe passé forme composée permet d’utiliser par exemple des adverbes négatifs ou des pronoms avec le verbe, ce qui serait impossible avec la forme simple (qui se comporte comme un adjectif) :
Ayant rapidement gagné en popularité cette année après avoir été révélée par un magazine, la chanteuse se retrouve en première position dans les palmarès. ■ Les ayant finalement retrouvées, il mit ses lunettes sur le siège… et s’assit dessus. ■ Ayant enfin pu leur téléphoner, nous avons prévenu nos parents de notre retard. ■ M’étant longuement demandé ce qui avait motivé sa réaction, j’en conclus qu’il devait être un peu jaloux. ■ N’ayant pas pu me libérer, j’ai dû renoncer à aller à ce colloque.
Le participe passé forme simple (donc de sens passif ou intransitif) utilisé dans une proposition participiale peut cependant être modifié par un adverbe, comme tous les adjectifs :
Bien respectées, ces quelques règles vous permettront de comprendre l’essentiel. ■ Mal réveillé, l’étudiant ne comprenait rien à ce que le professeur disait. ■ Arrivés tard, nous n’avons plus trouvé de restaurant ouvert. ■ Respectées scrupuleusement, ces instructions donnent un résultat garanti.
Utilisé dans une subordonnée participiale, le participe passé forme simple (c’est-à-dire le participe passé d’un verbe intransitif comme revenu, ou le participe passé d’un verbe transitif utilisé au passif comme examiné) ne peut pas se mettre seul à la forme négative ; il faut dans ce cas utiliser la forme composée. Comparer :
Les vacanciers partis, le village était redevenu silencieux.
Les vacanciers n’étant pas partis, l’animation régnait encore.
Ses malheurs oubliés, il commençait à reprendre gout à la vie.
Ses malheurs n’étant pas oubliés (participe présent passif), il avait du mal à reprendre gout à la vie.
Sa thèse terminée, il put enfin se consacrer à autre chose.
Sa thèse n’étant pas terminée, il était de plus en plus stressé.
■ Règles orthographiques : dans certains cas, le participe présent a une forme écrite différente selon qu’il est utilisé comme adjectif ou comme nom.
■ Valeur temporelle et concordance des temps : le mode participe n’a que deux temps (présent et passé). Si on remplace le participe par une forme conjuguée, il faut faire attention au choix de la forme verbale.
Le mode participe n’a que deux temps (présent et passé). Le présent indique que l’action exprimée par le verbe au participe est simultanée à celle exprimée par le verbe conjugué principal, tandis que le participe passé marque l’antériorité par rapport à celle-ci. Le participe passé est à la forme composée quand il s’agit d’un verbe transitif direct ; s’il s’agit d’un verbe intransitif ou passif, il peut être à la forme composée ou, tout seul, à la forme simple :
Comme il n’avait [imparfait] plus assez de temps pour y aller en métro, il prit un taxi. → N’ayant plus assez de temps pour y aller en métro, il prit un taxi. ■ Il oublia [passé simple] sa peur et se précipita au secours de son ami. → Oubliant sa peur, il se précipita au secours de son ami. ■ Quand il eut découvert [passé antérieur] la trahison du prince, le roi le fit couvrir de chaines. → Ayant découvert la trahison du prince, le roi le fit couvrir de chaines. ■ Comme il avait été condamné à une peine de prison, il ne pouvait plus se présenter aux élections. → Ayant été condamné à une peine de prison / Condamné à une peine de prison, il ne pouvait plus se présenter aux élections.
Quand le participe a une valeur de futur (futur antérieur) exprimée par le verbe de la principale, on évite d’utiliser la forme composée, de sens trop nettement passé (exemple c ci-dessous). L’utilisation de la forme simple, quand elle est possible (par exemple avec un verbe intransitif) permet d’éviter ce problème (exemple b). Si la forme simple ne peut pas être utilisée, la seule solution est d’utiliser une subordonnée avec conjonction (d) :
(a) Quand il sera rentré de l’étranger, il pourra s’atteler à son nouveau roman. =
(b) Rentré de l’étranger, il pourra s’atteler à nouveau roman.
(c) ? Étant rentré de l’étranger, il pourra s’atteler à son nouveau roman.
(d) Quand il aura retrouvé son bureau familier, il pourra s’atteler à son nouveau roman. (et non pas ? Ayant retrouvé son bureau familier, il pourra …)
Quand le participe remplace une subordonnée relative ou adverbiale, le temps précis de la subordonnée d’origine est « effacé », il n’y a plus que le présent ou le passé. Dans ces exemples avec un verbe au passif, les participes passés passifs démontrée correspondent à des temps différents si on utilise des subordonnées temporelles :
Démontrée par l’expérience, cette théorie aura des conséquences incalculables.
Quand elle aura été démontrée [futur antérieur passif] par l’expérience, cette théorie aura des conséquences incalculables. =
Démontrée par l’expérience, cette théorie eut des conséquences incalculables.
Quand elle eut été démontrée [passé antérieur passif] par l’expérience, cette théorie eut des conséquences incalculables.
Si on veut transformer une construction participiale en subordonnée relative ou adverbiale, il faut penser à rétablir le temps qui convient :
Les candidats retenus seront avisés par lettre. =
Les candidats qui seront retenus (ou : auront été retenus) seront avisés par lettre.
N’ayant pas réservé à temps, ils ne purent pas trouver de chambre d’hôtel. =
Comme ils n’avaient pas réservé à temps, ils ne purent pas trouver de chambre d’hôtel.
Tout comme en finnois, de nombreux participes présents ou passés sont devenus en français des adjectifs ou des noms.
Le participe présent ou passé utilisé comme adjectif s’accorde avec le nom auquel il se rapporte :
une attitude irritante ärsyttävä asenne ■ un documentaire passionnant kiehtova dokumenttielokuva ■ un roman barbant pitkästyttävä romaani ■ une maison accueillante viihtyisä koti ■ une lettre ouverte avoin kirje ■ une eau glacée jäinen vesi ■ des spectateurs émus liikuttuneita katsojia ■ les feuilles mortes kuolleet lehdet
Ne pas confondre l’adjectif et le participe présent. Le participe présent, qui est une forme verbale qui peut avoir un complément, reste invariable :
des découvertes passionnantes jännittäviä löytöjä
des découvertes passionnant les chercheurs tutkijoita kiehtovia löytöjä
une auberge accueillante vieraanvarainen majapaikka
une auberge accueillant beaucoup de touristes étrangers maaseutuhotelli, jossa käy paljon ulkomaalaisia vieraita
Les produits vieillissants doivent être remplacés. Vanhenevat tuotteet on vaihdettava uusiin.
Les produits vieillissant rapidement sont une menace pour la valeur de nos stocks. Nopeasti vanhetuvat tuotteet ovat uhka varastomme arvolle.
De nombreux participes présents ou passés sont employés comme noms :
un négociant tukkukauppias ■ des produits ■ un antioxydant ■ le fini viimeistely ■ un brillant briljantti ■ le commandant majuri ■ un commerçant kauppias
Le participe présent utilisé comme adjectif a en général la même forme que quand il est utilisé comme participe : dépendant, attachant, vacillant, brillant etc. Mais quand la base du verbe se termine ‑c ou en ‑g, le participe présent verbal a la forme du verbe conjugué avec u intercalaire (fatiguons → fatiguant, convainquons → convainquant), alors que la forme adjectif est sans u :
en convainquant vakuuttaen, vakuuttamalla ~ convaincant vakuuttava
en communiquant yhdistäen, yhdistämällä ~ communicant yhteydessä oleva, yhtyvä
en provoquant yllyttäen, yllyttämällä ~ provocant tahallisesti ärsyttävä, yllyttävä
en suffoquant tukehtuen, tukehtumalla ~ suffocant tukahduttava
en vaquant hoitaen, hoitamalla ~ vacant avoin, vapaa
en fatiguant väsyttämällä, väsyttäen ~ fatigant väsyttävä, rasittava
en intriguant kummastuttaen ~ intrigant oudoksuttava, kummastuttava
Remarque FLE : cet u intercalaire est utilisé dans la conjugaison pour maintenir la même forme graphique du radical dans tout le paradigme du verbe (fatiguer, fatigues, fatiguons, fatiguais, fatiguant etc.). Pour la prononciation, il est complètement inutile : fatiguant et fatigant se prononcent exactement de la même manière, ce qui provoque de nombreuses erreurs (des « fautes d’orthographe ») chez les francophones.
D’autres adjectifs ont une forme en ‑ent (ce sont des mots dérivés de participes latins en ‑ens), qui se prononce comme le participe, mais qu’il ne faut pas confondre avec celui-ci :
négligeant laiminlyöden ~ négligent huolimaton
précédant edeltäen ~ précédent edellinen
divergeant eroten ~ divergent erilainen
émergeant nousten pinnalle ~ émergent uusi etc.
Remarque FLE : dans ce cas également, de nombreux francophones ne comprennent pas ces règles ou ces différences, et on trouve de très nombreux cas d’erreurs.
Comme dans le cas des participes présents utilisés comme adjectifs, il existe quelques participes présents employés comme noms formés sur un verbe dont le radical est en ‑c ou en ‑g et dont la graphie est différente de la forme verbale :
en fabriquant valmistaen, valmistamalla / un fabricant valmistaja
en naviguant navigoiden, navigoimalla / un navigant lentohenkilökuntaan kuuluva henkilö
en intriguant vehkeilemällä / un intrigant vehkeilijä
Certains noms ont une terminaison en ‑ent qui se prononce de la même manière que le participe présent en ‑ant :
adhérant tarttuen /un adhérent jäsen
équivalant à qch vastaten jtak / l’équivalent de qch jnk vastine
Il faut éviter de confondre les formes verbales avec les noms :
Présidant la réunion du comité de coordination, le président du Parlement a pris connaissance des activités de l’ONG ■ Ce sondage d’opinion a été réalisé par la Commission auprès d’un échantillon de 15 000 personnes résidant dans l’UE.
De plus, il faut se rappeler que le participe est invariable. On écrira donc :
des résidents temporaires résidant en France
Attention aussi aux adjectifs ou noms qui font penser à des participes présents, mais qui n’en sont pas en français moderne (ce sont d’anciens participes latins en ‑ens) : décadent, dissident, antécédent.
Remarque FLE : de nombreux francophones ne comprennent pas ces règles ou ces différences, et on trouve de très nombreux cas d’erreurs.
ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 46. L’infinitif et le participe. Dernière mise à jour : 6.8.2022
Mises à jour après le 15.8.2022