Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones
Dans la conjugaison des verbes, on distingue deux « voix » (pääluokka) : la voix active et la voix passive. On dit aussi couramment « l’actif » et « le passif » (au masculin).
Le passiivi finnois n’est pas une forme verbale similaire au passif en français ou en anglais. Les deux grandes différences sont que le passiivi n’a pas de sujet exprimé (le sujet est impersonnel) et pas de complément d’agent (agenttiadverbiaali).
En français, le passif présente beaucoup de similitudes avec le passif en anglais (ou en allemand, italien, espagnol…) et n’est donc pas une nouveauté ni une très grande difficulté pour les étudiants finnophones. Il y a cependant certaines différences entre le passif en français et en anglais, et l’influence de l’anglais provoque assez souvent des erreurs chez les finnophones dans l’expression écrite.
Une phrase avec un verbe au passif est habituellement le résultat de la transformation d’une phrase avec un verbe à la forme active. Dans la transformation passive :
1) le complément direct du verbe (CVD) actif devient le sujet du verbe à la forme passive ;
2) le sujet du verbe actif devient le complément d’agent (agenttiadverbiaali) du verbe à la forme passive (voir ci-dessous) :
Rossini (sujet) a composé le Barbier de Séville (CVD). →
Le Barbier de Séville (sujet) a été composé par Rossini (Agent).
De ces deux transformations découlent deux règles importantes à retenir :
1) Le complément du verbe actif qui devient le sujet du verbe passif ne peut être que le complément direct du verbe, pas un complément prépositionnel ;
2) comme le complément d’agent est introduit par une préposition (par), ce complément d’agent peut être seulement un groupe nominal ou un pronom à la forme pleine (moi, lui, elle, nous, eux etc.), et pas un pronom faible (je, tu, il, on, ils).
Le passif est toujours formé avec l’auxiliaire être et le participe passé, qui s’accorde en genre et en nombre. L’auxiliaire est au même temps que serait le verbe correspondant à la forme active : si le verbe actif est par exemple à l’imparfait (imitait), l’auxiliaire être est à l’imparfait (était imité) :
verbe actif au présent → auxiliaire être au présent + participe passé = présent du passif
verbe actif au futur → auxiliaire être au futur + participe passé = futur du passif
verbe actif au passé composé → auxiliaire être au passé composé + participe passé = passé composé du passif
Le tableau suivant présente la manière dont les différents temps de l’auxiliaire être sont utilisés pour former les différents temps du passif.
indicatif | ||||
---|---|---|---|---|
présent | elle aime | → | elle est | aimé |
elle aime | elle est | aimée | ||
elles aiment | elles sont | aimées | ||
imparfait | elle aimait | elle était | aimé | |
passé simple | elle aima | elle fut | aimé | |
plus-que-parfait | elle avait aimé | elle avait été | aimé | |
passé composé | elle a aimé | elle a été | aimé | |
passé antérieur | elle eut aimé | elle eut été | aimé | |
passé surcomposé | elle a eu aimé | elle a eu été | aimé | |
futur simple | elle aimera | elle sera | aimé | |
futur antérieur | elle aura aimé | elle aura été | aimé | |
conditionnel présent | elle aimerait | elle serait | aimé | |
conditionnel passé | elle aurait aimé | elle aurait été | aimé | |
subjonctif | ||||
présent | qu’elle aime | → | qu’elle soit | aimée |
imparfait | qu’elle aimât | qu’elle fût | aimée | |
passé | qu’elle ait aimé | qu’elle ait été | aimée | |
plus-que-parfait | qu’elle eût aimé | qu’elle eût été | aimée | |
infinitif | ||||
présent | aimer | → | être | aimé |
passé | avoir aimé | avoir été | aimé | |
participe | ||||
présent | aimant | étant | aimé | |
passé | aimé | aimé | ||
forme composée | ayant aimé | ayant été | aimé |
Le passif se forme avec le verbe être, mais les temps composés du verbe être sont formés avec l’auxiliaire avoir : j’ai été, elle avait été. Le conditionnel passif de respecter est donc elle aurait été respectée, où le seul élément qui représente le verbe être est le participe été.
L’utilisation du verbe avoir (ici : aurait) dans une forme qui est censée se former avec le verbe être peut paraitre dérangeante pour les apprenants finnophones, qui ont fortement tendance à dire dans ce cas *elle serait été respectée. Cette erreur est aussi favorisée par le fait qu’en finnois on utilise uniquement l’auxiliaire être (olla) dans la conjugaison de tous les temps composés. Voir un exemple de conjugaison complète d’un verbe au passif (admettre) en bas de page.
L’auxiliaire être sert à former les temps du passif, mais il sert également pour former les temps composés de verbes actifs intransitifs (sortir, monter, descendre, retourner…) :
ils sont partis : passé composé actif de partir = he ovat lähteneet
ils sont examinés : présent du passif d’examiner = heitä tutkitaan
ils étaient partis : plus-que-parfait actif de partir = he olivat lähteneet
ils étaient examinés : imparfait du passif d’examiner = heitä tutkittiin
Il faut donc éviter de confondre les formes de l’actif et du passif. En comparant les deux tableaux suivants, on constate que les temps composés des certains verbes (peu nombreux) qui peuvent être intransitifs ou transitifs comme entrer, sortir, descendre, monter etc. (voir La conjugaison des verbes) peuvent être identiques ; mais l’un est un verbe actif, l’autre un verbe passif :
infinitif | actif | passif |
---|---|---|
présent | sortir | être sorti |
passé | être sorti | avoir été sorti |
forme conjuguée | actif | passif |
présent | elle sort | elle est sortie hänet viedään ulos |
passé composé | elle est sortie hän meni ulos |
elle a été sortie hänet vietiin ulos |
Une telle identité n’existe pas dans le cas des verbes se conjuguant avec avoir, dont toutes les formes du passif sont différentes de celles de la voie active :
infinitif | actif | passif |
---|---|---|
présent | apporter | être apporté |
passé | avoir apporté | avoir été apporté |
forme conjuguée | actif | passif |
présent | elle apporte | elle est apportée |
passé composé | elle a apporté | elle a été apportée |
Contrairement au passiivi en finnois, en français, les temps du passif sont toujours des temps composés, formés de l’auxiliaire être et d’un participe passé. Le présent est aussi un temps composé. Aux temps simples du passif (présent, imparfait, etc.), le verbe comporte donc toujours au moins deux éléments, et aux temps composés (passé composé, futur antérieur etc.), il y a au moins trois éléments. Attention aux différences avec le finnois :
häntä tarkkaillaan | 1 élément | il est observé | 2 éléments |
häntä tarkkailtiin | 1 élément | il était observé | 2 éléments |
häntä tarkkailtiin | 1 élément | il a été observé | 3 éléments |
häntä on tarkkailtu | 2 éléments | il a été observé | 3 éléments |
häntä oli tarkkailtu | 2 éléments | il avait été observé | 3 éléments |
Sous l’influence du passiivi finnois, l’erreur fréquente est d’oublier un (ou deux) élément(s) « supplémentaire(s) » par rapport à la forme finnoise, et, notamment, d’utiliser un présent du passif à la place d’un passé composé :
Kuninkaallinen Turun Akatemia perustettiin vuonna 1640.
L’Académie royale de Turku a été fondée en 1640.
[et non pas : *est fondée, qui signifierait perustetaan]
Kartano myytiin viime vuonna yksityishenkilölle.
Le manoir a été vendu l’an dernier à un particulier.
[et non pas : *est vendu, qui signifierait myydään]
Apuraha on myönnetty vain kahdelle tutkijalle.
La bourse a été accordée à deux chercheurs seulement.
[et non pas : *est accordée, qui signifierait myönnetään]
Exemple authentique relevé dans… une grammaire finlandaise : *Ce tableau est peint par Degas, ce qui signifie « Degas maalaa tätä taulua » alors que l’auteur voulait dire « Tämä taulu on Degas’n maalaama ». La forme correcte est : Ce tableau a été peint par Degas. Autre exemple typique d’erreurs de ce genre relevées dans des travaux d’étudiants : Le manuel J’aime 4 *est édité [forme correcte : a été édité] en 2016 et notre exemplaire est sorti en 2018.
Les temps simples du passiivi finnois correspondent donc toujours en français à un temps composé de deux ou de trois éléments :
Taloa maalataan. La maison est repeinte.
Talo maalattiin joka vuosi. La maison était repeinte tous les ans.
Talo maalattiin eilen. La maison a été repeinte hier.
Un temps composé du passiivi finnois, en deux éléments, correspond en général en français à un temps composé de trois éléments, ou même quatre éléments (au passé surcomposé) :
Talo on maalattu punaiseksi. La maison a été repeinte en rouge.
Talo olisi maalattu keltaiseksi. La maison aurait été repeinte en jaune.
Quand la maison a eu été repeinte [passé surcomposé du passif de peindre] en jaune canari, les voisins se sont déchainés sur Facebook.
En anglais, on trouve également des formes de passif avec quatre éléments : would have been painted, the matter will have been settled then.
Les infinitifs ou participes passés passifs (négatifs ou affirmatifs) sont également fréquents :
63% des personnes interrogées estiment ne pas avoir été formées à une utilisation économe des ressources. ■ Ces conseils de prudence semblent bien ne pas avoir été entendus. ■ N’ayant pas été détectée à temps, la fraude a fait perdre des millions à l’entreprise.
C’est également le cas en anglais avec des participes ou des infinitifs : without having been notified, ou it could not have been done.
Dans les constructions infinitives avec semi-auxiliaires du type devoir, pouvoir, c’est l’infinitif qui se met au passif, et non pas le semi-auxiliaire :
Cependant, certaines données ou informations présentes sur notre site peuvent ne pas avoir été créées ou structurées dans des fichiers ou des formats spécifiques. ■ En cas de suspension critique, l’état du système peut ne pas avoir été complètement sauvegardé à cause d’un arrêt d’urgence. ■ Pour obtenir qualité d’associé, la personne physique doit ne pas avoir été déclarée, selon la loi, incapable.
Important : le verbe il faut ne peut pas être mis au passif, parce que dans ce cas il n’est pas le sujet sémantique du verbe. Voir ci-dessous.
On peut mettre au passif uniquement des verbes 1) qui ont un complément direct et 2) qui ne sont pas des verbes à pronom réfléchi. Ce complément direct devient le sujet du verbe au passif, et le sujet devient l’agent, introduit par la préposition par :
Les enfants prépareront le dessert. → Le dessert sera préparé par les enfants. ■ Le tremblement de terre a détruit les immeubles. → Les immeubles ont été détruits par le tremblement de terre. ■ Le pilote aurait pu éviter la catastrophe. → La catastrophe aurait pu être évitée par le pilote. ■ Le censeur remplacera le proviseur, qui est malade. → Le proviseur, qui est malade, sera remplacé par le censeur. ■ Un groupe de touristes a retenu tout le restaurant. → Le restaurant a été retenu par un groupe de touristes.
Si le verbe a un complément prépositionnel (CVP), il est impossible d’en faire le sujet d’un verbe au passif et, donc, d’utiliser le verbe au passif :
Le ministère de l’Éducation nationale réfléchit à une réforme du baccalauréat. Opetusministeriö suunnittelee ylioppilastutkinnon uudistusta.
Dans cette phrase, il est impossible de mettre le verbe réfléchir à au passif (**une réforme est réfléchie par le ministère est agrammatical). Si, dans cet exemple, on veut utiliser une forme passive, la seule solution est de changer de verbe, et d’utiliser par exemple envisager (harkita, suunnitella), qui admet un complément direct :
Le ministère de l’Éducation nationale envisage une réforme du baccalauréat. → Une réforme du baccalauréat est envisagée par le ministère de l’Éducation nationale. Opetusministeriö harkitsee ylioppilastutkinnon uudistusta.
De même, il est impossible de transformer le complément direct d’un verbe à pronom réfléchi en sujet du verbe au passif, même si ce verbe a par ailleurs une forme non réfléchie qui peut recevoir un complément direct :
Les enfants se rappellent très bien leurs arrière-grands-parents. [transformation passive impossible]
La raison en est que si un verbe à pronom réfléchi a un complément direct exprimé, le pronom réfléchi ne peut renvoyer qu’à un complément prépositionnel : il se (CVP) rappelle son grand-père (CVD) serait au passif son grand-père est rappelé par lui *à lui.
Dans les exemples suivants, le passiivi ne peut pas se traduire par un passif en français, parce qu’un complément prépositionnel (introduit par une préposition, comme le complément prépositionnel du verbe) ne peut pas devenir le sujet du passif :
Ainolle annettiin lahjaksi skootteri. = On a offert un scooter à Aino.
[Et non : **Aino a été offert un scooter, ou, pire : **Aino a été offerte un scooter].
Ministeriä kehotettiin eroamaan. = On a conseillé au ministre de démissionner. [conseiller à qqn] [Et non : **Le ministre a été conseillé de démissionner.]
Häntä ajatellaan usein suurena uudistajana. = On pense souvent à lui comme un grand réformateur. [penser à] ou bien : Il est souvent vu comme un grand réformateur. [Et non : **Il est souvent pensé comme un grand réformateur]
Hänet pyydetään sisään. = On lui demande d’entrer. [demander à qqn] [Et non : *Il est demandé d’entrer.]
Ces constructions impossibles en français sont tout à fait normales en anglais également, ce qui augmente encore le risque d’erreurs chez les finnophones, vu la diffusion de l’anglais en Finlande, et cette règle est souvent oubliée par les finnophones dans l’expression écrite. Exemples d’erreurs relevées dans des travaux d’étudiants :
Dans l’exemple, les participants *sont rappelés d’utiliser des salutations d’ouverture et de clôture. → Dans l’exemple, on rappelle aux participants d’utiliser des salutations d’ouverture et de clôture.
La production orale dans l’enseignement de langues étrangères *a été accordée assez peu d’attention. → On a accordé assez peu d’attention à la production orale…
Les élèves *sont appris à respecter l’égalité entre les différentes langues. → On apprend aux élèves à respecter l’égalité entre les différentes langues.
Les élèves *ont été demandés à colorier ou dessiner des images. → On demande aux élèves de colorier ou dessiner des images.
Les élèves *sont conseillés d’utiliser les expressions listées sur les pages de couverture. → On suggère aux élèves d’utiliser les expressions listées sur les pages de couverture.
Ce manuel présente pourtant de nombreux exercices dans lesquels les élèves *sont conseillés d’utiliser les mains. → … de nombreux exercices dans lesquels on conseille aux élèves d’utiliser les mains.
Un test d’expression orale *a été essayé d’insérer dans l’examen du baccalauréat. [traduction quasi directe du finnois on pyritty sisällyttämään] → On a tenté d’inclure un test d’expression orale dans l’examen du baccalauréat.
Certaines de ces phrases pourraient également être rectifiées de façon assez simple en utilisant un passif impersonnel (voir ci-dessous).
Il faut faire attention aux verbes qui peuvent avoir plusieurs structures de complémentation et plusieurs sens. En fonction de ces différentes structures, le passif est soit possible, soit non. Le verbe demander en est un bon exemple et il provoque souvent des confusions :
■ demander + complément de verbe direct : pyytää, passif possible :
demander une autorisation pyytää lupa → L’autorisation a été demandée. Lupaa on haettu. ■ Ce produit est très demandé. Tämä tuote on hyvin kysytty.
■ demander + complément de verbe direct : pyytää jotakuta (jonnekin), passif possible avec le complément de verbe direct :
On demande M. Martin. → M. Martin est demandé à la caisse. Hra Virtasta pyydetään kassalle.
■ demander + complément de verbe direct + complément de verbe prépositionnel : kysyä joltakulta, passif possible avec le complément de verbe direct :
demander un avis à qqn → Un avis a été demandé à des spécialistes. Lausunto on pyydetty asiantuntijoilta.
■ mais passif impossible avec le complément de verbe prépositionnel :
*Les spécialistes ont été demandés un avis. Asiantuntijoilta pyydettiin lausunto.
La phrase *Le spécialiste a été demandé un avis ressemble beaucoup à l’anglais (par exemple the experts were asked a range of questions), mais elle est agrammaticale en français (et de toute façon, en finnois on ne pourrait pas dire non plus *asiantuntijat pyydettiin lausunto, en gardant asiantuntijat au nominatiivi). En revanche, dans ce cas, on peut utiliser une construction inversée : Il a été demandé un avis à un spécialiste (Lausunto on pyydetty asiantuntijalta), qui est simplement une variante avec pronom conjugateur il et sujet postposé de l’exemple de la phrase Un avis a été demandé à un spécialiste.
Cependant, le CVD du verbe prier (pyytää) dans la construction prier qqn de faire qch peut être mis au passif :
Teitä pyydetään sisään. Vous êtes prié d’entrer.
De même, le CVP des verbes obéir et pardonner (obéir à quelqu’un, pardonner à quelqu’un) peut devenir le sujet du passif :
Vous êtes pardonné. Annan teille anteeksi. ■ Le surveillant veut être obéi sans discussion.
En effet, autrefois (encore au XVIIe siècle, donc en français classique) les verbes obéir et pardonner se construisaient avec un complément direct (obéir quelqu’un). Cette construction directe survit en quelque sorte au passif, bien que, depuis cette époque, ces verbes soient devenus des verbes à complément prépositionnel (se construisant avec la préposition à).
À noter ! Il faut faire attention aux verbes qui peuvent avoir plusieurs structures de complémentation et plusieurs sens. En fonction de ces différentes structures, le passif est soit possible, soit non. Le verbe demander en est un bon exemple et il provoque souvent des confusions, voir ci-dessous .
Quand l’agent de l’action du verbe passif est exprimé, il l’est sous forme d’un complément d’agent, en finnois agenttiadverbiaali, qui est en général introduit par la préposition par :
La symphonie Kullervo a été composée par Sibelius. ■ L’attentat a été commis par des indépendantistes. ■ L’accident a été vu par deux témoins. ■ L’usine a été occupée par des manifestants.
Remarque : dans certains cas, dans le code écrit surtout, l’agent peut être introduit par la préposition de.
Un pronom personnel utilisé comme complément d’agent est à la forme pleine, comme toujours quand il est utilisé après une préposition :
J’ai écrit la lettre. → La lettre a été écrite par moi. ■ Ils nous l’ont recommandé. → Il nous a été recommandé par eux.
L’utilisation du pronom personnel comme agent est relativement rare, mais, contrairement à ce qu’affirment certains manuels de grammaire, elle est parfaitement possible et normale. Elle permet par exemple de focaliser l’agent :
La lettre a été écrite par moi [c’est-à-dire : et par personne d’autre].
Dans ce cas, on peut aussi utiliser une phrase clivée :
C’est moi qui ai écrit la lettre. ■ Ce sont eux qui nous l’ont recommandé.
Si le sujet du verbe actif est on, il n’est pas exprimé au passif, car on est un pronom faible qui peut uniquement être employé en fonction de pronom sujet (comme je et tu) :
On a interdit la vente des pétards avant le 30 décembre. → La vente des pétards a été interdite avant le 30 décembre. ■ On a retrouvé la voiture utilisée par les voleurs. → La voiture utilisée par les voleurs a été retrouvée.
Mais on peut mettre à la forme passive un verbe dont le sujet est un pronom indéfini de forme pleine (quelqu’un, personne, beaucoup etc.) :
Mon portefeuille a été retrouvé par quelqu’un dans le caniveau. ■ La salle n’a encore été réservée par personne. ■ Les syndicats sont donc toujours perçus par certains comme des « Robins des bois ». ■ Cette décision a été vue par beaucoup comme un aveu d’échec.
Dans certains cas, l’agent s’exprime avec la préposition de. En général, c’est quand l’action exprimée par le verbe n’a pas un effet direct sur « l’objet » de l’action (toiminnan kohde). Comparer :
(a) Il a été tué par son frère.
(b) Il est admiré de son frère.
Dans la phrase (b), le sujet Il n’est pas vraiment affecté (« transformé ») par l’action qu’exprime le verbe. Pour cette raison, on utilise de essentiellement après des verbes de sentiment : aimer, estimer, admirer, toucher (liikuttaa), détester, haïr, rejeter (hylätä) etc., ou qui expriment une activité intellectuelle : connaitre, oublier, accepter, ignorer etc., et ce surtout dans la langue écrite :
Il était aimé de tous. ■ Cet auteur était haï de ses contemporains. ■ Cet acteur est connu de tous. ■ Cet écrivain, célèbre autrefois, est mort oublié de tout le monde.
On emploie également la préposition de après des verbes indiquant une situation dans l’espace : précéder, suivre, entourer etc., surtout si l’agent est non animé. Dans ce cas-là, le verbe équivaut à une construction avec préposition :
En français, le nom est en général précédé d’un article = « Devant le nom, on met un article. ». ■ L’inauguration sera suivie d’une réception = « Après l’inauguration, il y aura une réception. » ■ Le hall est entouré de [de = de + des, règle d’effacement] colonnes. Aula on reunustettu pylväillä. = « Autour du hall, il y a des colonnes. » ■ Le toit est couvert de neige = « Sur le toit, il y a de la neige ».
On peut ainsi essayer d’apprécier la différence :
Ce vieux professeur était respecté de tous. (respecter kunnioittaa).
Les instructions du professeur n’ont pas été respectées par les élèves. (respecter noudattaa, toimeenpanna).
La jument était suivie par un bel étalon noir. Kaunis musta ori seurasi tammaa.
La jument était suivie d’un cheval noir. Tamman jälkeen tuli musta hevonen. [par exemple dans un concours hippique]
Après certains verbes, on utilise de quand le verbe a un sens figuré. Comparer :
Bernard a été écrasé par un autobus. Bernard jäi linja-auton alle. ■ Bernard est écrasé de soucis. Bernard on huolien murtama. ■ Le bateau a été saisi par les douanes. Tulli takavarikoi veneen. ■ Il a été saisi d’un doute. Hänet valtasi epäily.
Remarque : dans la langue courante, on utilise le plus souvent par, même dans les cas décrits ci-dessus. Pour introduire un GN complément d’agent d’un verbe passif, la préposition de s’utilise surtout dans le code écrit ou dans des cas particuliers (sens figuré).
Quand le sujet du verbe est postposé et que le verbe est précédé du sujet conjugateur il, ce pronom il ne peut pas être transformé en agent du verbe passif, puisque ce n’est pas le véritable sujet du verbe, mais un simple marqueur morphologique de conjugaison. Le verbe ne peut pas non plus être mis au passif, puisqu’il n’a pas de complément direct :
Il manque plusieurs pages (= Plusieurs pages manquent). → transformation passive impossible
Dans cette phrase, plusieurs pages est le sujet (postposé) du verbe manque. Il n’y a aucun complément direct qui puisse devenir le sujet du verbe au passif.
Pour les mêmes raisons que ci-dessus, le verbe il faut ne peut pas être mis au passif, car le mot il est un pronom conjugateur, et l’élement qui suit il faut (il faut de l’eau, il faut penser à réserver à l’avance etc.) n’est pas le CVD du verbe, mais le véritable sujet du verbe falloir.
L’erreur fréquente chez les finnophones est de construire il faut comme un auxiliaire d’un verbe passif, et de dire par exemple **Cette phrase faut être répétée, qui est agrammatical. L’erreur consiste à assimiler falloir à un auxiliaire modal comme pouvoir ou devoir et elle est due à l’influence du finnois, qui utilise des constructions identiques dans le cas de certains verbes impersonnels :
(a) Tämä lause voidaan toistaa. Cette phrase peut être répétée.
(b) Tämä lause pitää toistaa. Cette phrase doit être répétée.
(c) Tämä lause täytyy toistaa. **Cette phrase faut être répétée.
En français, les formes correctes possibles pour la phrase (c) sont :
Cette phrase doit être répétée. ou Il faut répéter cette phrase.
Dans la construction il faut aborder ce problème avec prudence, le GN ce problème est le complément direct du verbe aborder, pas de falloir. Toute la construction infinitive aborder ce problème avec prudence est le sujet de falloir. La transformation passive se fera donc par exemple avec une proposition introduite par que :
Il faut aborder ce problème avec prudence. → Il faut que ce problème soit abordé avec prudence. ■ Il faut suivre cet exemple. → Il faut que cet exemple soit suivi. ■ Il aurait fallu respecter les consignes de sécurité. → Il aurait fallu que les consignes de sécurité soient respectées. ■ Il ne faut plus retarder l’adoption de ces mesures. → Il ne faut pas que l’adoption de ces mesures soit encore retardée. ■ Il faudrait mieux aménager les pistes cyclables. → Il faudrait que les pistes cyclables soient mieux aménagées. ■ Il aurait fallu classer les données autrement. → Il aurait fallu que les données soient classées autrement.
L’autre solution, plus simple, est d’utiliser devoir, qui peut se mettre devant un infinitif passif :
Il faut aborder ce problème avec prudence. → Ce problème doit être abordé avec prudence. ■ Il faut suivre cet exemple. → Cet exemple doit être suivi. ■ Il aurait fallu respecter les consignes de sécurité. → Les consignes de sécurité auraient dû être respectées. ■ Il ne faut plus retarder l’adoption de ces mesures. → L’adoption de ces mesures ne doit plus être retardée. ■ Il faudrait mieux aménager les pistes cyclables. → Les pistes cyclables devraient être mieux aménagées. ■ Il aurait fallu classer les données autrement. → Les données auraient dû être classées autrement.
Le passif est un procédé de focalisation utilisé (préférentiellement) dans le code écrit. En règle générale, en français, l’information connue (le thème) est présentée en premier, et l’information nouvelle (le propos) apparait après le thème. Le passif permet d’intervertir la position de ces deux éléments :
(a) Qu’ont fait ses parents? / Qu’est-ce que ses parents ont racheté ?
(b) Ses parents ont racheté la maison.
(c) Qui a racheté la maison ? / Par qui la maison a-t-elle été rachetée ?
(d) La maison a été rachetée par ses parents.
Dans la phrase (a), le focus est par défaut sur le verbe ont racheté et/ou sur le CVD la maison. La phrase répond à la question (a). Si on veut mettre le focus sur le sujet, à l’oral on peut par exemple prononcer avec insistance le segment ses parents ; à l’écrit, où l’intonation ne peut pas se percevoir (sauf si on utilise par exemple des caractères gras), le même effet peut s’obtenir par l’utilisation du passif : la phrase (d) répond à la question (c).
Le passif s’utilise majoritairement (mais pas exclusivement) dans le code écrit. En effet, dans le français parlé, pour obtenir le même effet, on utilise nettement plus souvent la dislocation :
(b) Qu’ont fait ses parents? / Qu’est-ce que ses parents ont racheté ?
(e) Ses parents, ils ont racheté la maison.
(d) Qui a racheté la maison ? / Par qui la maison a-t-elle été rachetée ?
(f) La maison, c’est ses parents qui l’ont rachetée.
Les phrases (e) et (f) correspondent par le sens aux phrase (b) et (d) ci-dessus. La seule différence est dans le code (écrit vs parlé). C’est pourquoi le passif est peu utilisé dans le français parlé, parce que dans le français parlé il existe déjà d’autres moyens pour exprimer les mêmes variations de sens. Dans le code écrit, inversement, on utilise peu la dislocation, et le passif est donc utile, et parfois même indispensable, voir La focalisation plate.
Si on n’exprime pas l’agent (par un complément d’agent, voir ci-dessus), le verbe se retrouve en fin d’énoncé et le focus est mis sur celui-ci, autrement dit l’information principale est celle exprimée par le verbe. Le passif peut ainsi servir à faire disparaitre l’agent, exactement comme le passiivi en finnois. Cette suppression de l’agent peut être voulue, soit parce qu’on ne veut pas préciser l’agent, soit parce que l’information essentielle est celle contenue dans le verbe, et l’agent est une information secondaire :
La décision a été contestée. Päätöstä vastustettiin. ■ Le col a été rouvert. Sola on taas avattu liikenteelle. ■ La maison a été repeinte. Talo on maalattu.
Dans ce cas-là, la question à laquelle pourrait répondre la phrase au passif dépend des cas :
La décision a été contestée. répond par exemple à la question Comment a-t-on réagi à la décision ? Miten päätökseen reagoitiin? ■ La maison a été repeinte en bleu. répond par exemple à la question En quelle couleur la maison a-t-elle été repeinte ? Minkä väriseksi talo on maalattu?
Pour cette raison, le passif s’utilise par exemple beaucoup dans la langue juridique ou administrative, où l’indication de l’agent est inutile, parce qu’il est évident ou implicite, comme en finnois. Ainsi, dans cet extrait du règlement du Sénat de Belgique, l’agent des verbes est adopté ou sont rejetés est « les sénateurs », mais celui du verbe est soumis est sous-entendu (et difficile à définir: le gouvernement ? l’administration ?) :
Si un amendement est adopté ou que des articles sont rejetés lors de l’examen en séance plénière de la proposition […], le texte adopté en première lecture est soumis à nouveau aux gouvernements de communauté ou de région concernés pour avis conforme, accord, approbation ou commun accord.
Le passif avec pronom conjugateur sert de variante à la construction passive normale et s’utilise quand le complément du verbe actif est un groupe nominal ou une proposition complétive. Dans ces constructions, le verbe actif est conjugué au passif, le pronom conjugateur il sert à indiquer la personne du verbe, et le complément de verbe direct (groupe nominal ou proposition complétive) devient le sujet postposé, mais reste à la même place (après le verbe) que s’il était complément d’un verbe à la voix active.
Cette transformation permet de maintenir le même ordre des idées et de conserver le focus sur le même élément que dans la forme active. En même temps, cela permet (le plus souvent) d’effacer complètement l’agent, par exemple le pronom on (parce que on représente en général « quelqu’un ») ou un autre sujet.
Quand le complément de verbe direct (CVD) est un groupe nominal, il n’y a aucune modification dans l’ordre des mots, car la construction permet de maintenir le CVD à la même place après le verbe. La seule différence est que le sujet (dans les exemples suivants on, l’administration) est effacé :
(1) On a demandé à tous les participants une petite contribution financière. →
(2) Une petite contribution financière a été demandée à tous les participants. →
(3) Il a été demandé à tous les participants une petite contribution financière.
(4) On ne fera aucune exception. →
(5) Aucune exception ne sera faite. →
(6) Il ne sera fait aucune exception.
(7 L’administration n’accordera aucune dérogation poikkeuslupa. →
(8) Aucune dérogation ne sera accordée. →
(9) Il ne sera accordé aucune dérogation.
Dans les exemples (3), (6) et (9), le pronom il est un simple pronom conjugateur sans référent. Dans ces phrases, le complément du verbe reste une petite contribution financière, aucune exception, aucune dérogation, comme dans les phrases avec un verbe actif (1), (4) et (7). Dans la phrase (6) Il ne sera fait aucune exception, l’utilisation de la construction impersonnelle évite de mettre le focus sur le verbe « vide » sera faite. Ce verbe n’a pas de sens véritable en lui-même, c’est un composant de la locution verbale faire une exception dans laquelle il fonctionne comme un auxiliaire de dérivation, et ce n’est pas le verbe faire dans son sens plein de « fabriquer », « effectuer ».
Important ! Dans la construction impersonnelle, le verbe et le participe passé ne s’accordent pas en genre et en nombre, puisque le sujet grammatical est le pronom conjugateur il, qui est sans genre :
Il sera effectué plusieurs vérifications préalables. ■ Il ne sera accordé aucune dérogation.
Exactement comme un groupe nominal complément direct de verbe (CVD), une proposition complétive en fonction de CVD (a) peut devenir sujet d’un verbe au passif (b). En général, on utilise la construction avec passif impersonnel (c), qui permet de maintenir la complétive à la même place :
(a) On admet unanimement que cette théorie a eu une influence déterminante sur l’évolution de la recherche biologique.
(b) Que cette théorie a eu une influence déterminante sur l’évolution de la recherche biologique est unanimement admis.
(c) Il est unanimement admis que cette théorie a eu une influence déterminante sur l’évolution de la recherche biologique.
Dans la phrase (c), la proposition introduite par que reste le sujet (réel) du verbe il est admis (elle n’en est pas le complément direct).
On peut utiliser le même procédé quand la proposition complétive qui est le CVD d’un verbe est une proposition infinitive (introduite par la conjonction de). La différence est que la variante (b) ci-dessus est normalement impossible : la complétive infinitive ne peut pas devenir telle quelle le sujet d’un verbe passif dans l’ordre normal sujet-verbe-complément. Seule la forme avec pronom impersonnel est possible :
(a’) On a décidé de suspendre la séance. Istunto päätettiin keskeyttää.
(b’) *Suspendre la séance a été décidé.
(c’) Il a été décidé de suspendre la séance. Istunto päätettiin keskeyttää.
Exemples :
Il fut décidé de reporter le vote. ■ Il lui avait été conseillé de s’orienter vers l’enseignement et une carrière artistique. ■ Il est recommandé aux secouristes de se faire vacciner. ■ Il avait aussi été envisagé de démolir le pont.
Dans certains cas, l’infinitif peut être apparemment en fonction de sujet d’un verbe au passif :
Se faire vacciner est fortement recommandé. ■ Rester trop longtemps au soleil est déconseillé.
Dans ces exemples, le participe est perçu comme un adjectif attribut du sujet (recommandé, déconseillé, similaire à nécessaire, utile etc.) et non pas comme le participe passé formant un passif avec l’auxiliaire être. Cette construction devient moins acceptable si le verbe a un complément : ?Se faire vacciner est recommandé aux touristes (pluôt : Il est recommandé aux touristes de se faire vacciner.)
L’équivalent de ces constructions avec le pronom on serait :
On recommande aux secouristes de se faire vacciner [est recommandé est un passif présent] ■ On avait aussi envisagé de démolir le pont.
Par rapport à l’utilisation de on, la construction passive permet d’effacer l’agent ou de souligner l’aspect temporel. Comparer :
Le gout est considéré comme plus résistant que l’odorat au vieillissement ; toutefois, on a constaté que la perception gustative diminue avec l’âge. ■ Le gout est considéré comme plus résistant que l’odorat au vieillissement ; toutefois, il a été constaté que la perception gustative diminue avec l’âge.
Attention à bien interpréter le temps du passif ; dans l’exemple suivant, le verbe est constaté est un présent :
S’il est constaté que la carte de vote électronique est défectueuse suite à un défaut de production manifeste, le cout de la reproduction de cette carte sera alors à charge du centre de production et non du citoyen. [< S’il est constaté = Si on constate, présent de l’indicatif, en finnois jos todetaan.]
La construction avec passif impersonnel + infinitif n’est évidemment possible qu’avec des verbes pouvant recevoir un infinitif comme complément direct, car seul un CVD peut devenir sujet d’un verbe au passif. Et parmi ces verbes, une partie seulement d’entre ceux-ici peuvent être mis à la forme passive impersonnelles.
Le verbe donner peut s’employer de façon impersonnelle dans le sens de « suoda ».Il est alors suivi soit d’un CVD GN (ce qui est possible en finnois aussi), soit d’un CVD infinitif (construction inexistante en finnois). Dans ce cas, l’infinitif CVD est précédé du subordonnant de :
Il lui a été donné un grand privilège. Hänelle suotiin suuri etuoikeus ■ Nous leur demandons beaucoup, parce qu’il leur a été donné beaucoup. Vaadimme heiltä paljon, koska heille on annettu paljon. ■ Il m’a été donné de participer à un débat très intéressant. Minulle suotiin/tarjoutui mahdollisuus osallistua hyvin mielenkiintoiseen keskusteluun. ■ Il faut savoir que la tessiture vocale moyenne se situe dans les trois octaves et il n’est pas donné à tout le monde d’en avoir plus de cinq. ■ Le concert auquel il m’a été donné d’assister ce soir-là restera gravé dans ma mémoire. ■ Il n’est pas donné à tout le monde de rester autonome jusqu’à un âge avancé.
Ces formes ressemblent de façon trompeuse aux formes erronées produites fréquemment par les apprenants finnophones. L’erreur dans ces formes est de faire de il le sujet du passif. Il ne faut pas interpréter la forme Il lui a été donné un grand privilège comme un passif de donner dont il serait le sujet. Dans les exemples ci-dessus, le sujet il est un simple pronom conjugateur, et le pronom indirect lui ou m’ (qui peuvent tous deux être aussi un féminin) ne peut pas devenir le sujet (**Elle a été donnée un grand privilège. ou **J’ai été donnée de participer à un débat très intéressant.) Voir aussi le résumé ci-dessous.
Cette construction passive impersonnelle permettrait de corriger facilement et sans grande modifications la plupart des productions erronées signalées ci-dessus, en rétablissant en même le complément de verbe prépositionnel (introduit par à) qui a été transformé par erreur en sujet :
Dans l’exemple 22, *les participants sont rappelés d’utiliser des salutations d’ouverture et de clôture. → Dans l’exemple 22, il est rappelé aux participants d’utiliser des salutations d’ouverture et de clôture.
La production orale dans l’enseignement de langues étrangères *a été accordée assez peu d’attention. → Il a été accordé assez peu d’attention à la production orale dans l’enseignement de langues étrangères.
Les élèves *ont été demandés à colorier ou dessiner des images. → Il est demandé aux élèves de colorier ou dessiner des images.
*Les élèves sont conseillés d’utiliser les expressions listées sur les pages de couverture. → Il est conseillé aux élèves d’utiliser les expressions listées sur les pages de couverture.
Remarque : à la forme négative, comme passif impersonnel du verbe donner, on trouve une variante avec pronom conjugateur ce :
Ce n’est pas donné à tout le monde de faire un swing à la Tiger ! ■ Ce n’est pas donné à n’importe qui de se qualifier pour une finale olympique du 800 m. ■ Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas donné à tout le monde de pouvoir comprendre une autre culture, et personne ne vous en tiendra rigueur.
Mais la forme ce ne s’emploie pas à la forme affirmative (**Ce lui a été donné de participer…), ni, semble-t-il, avec d’autres verbes que donner.
Les verbes à pronom réfléchi permettent également d’exprimer un passif. Ce passif a souvent une valeur impersonnelle exprimant une vérité générale ou un précepte. Le verbe actif se met à la forme avec pronom réfléchi et le CVD devient le sujet du verbe :
On dit ça. → Ça se dit. ■ On voit bien cette couleur. → Cette couleur se voit bien. ■ On ne fait pas ça. → Ça ne se fait pas. ■ Autrefois, la viande s’achetait chez le boucher et la saucisse et le jambon chez le charcutier. Aujourd’hui tout se vend sous le même toit dans les hypermarchés.
Dans les cas de certains verbes, la suppression de l’agent peut se réaliser par l’utilisation d’un verbe à pronom réfléchi à la forme impersonnelle, avec rejet du sujet après le verbe. La transformation est la suivante (le sujet est en couleur) :
Tant de choses ont été dites à ce sujet [passif]. ■ Tant de choses se sont dites à ce sujet [passif pronominal] ■ Il s’est dit tant de choses à ce sujet. [passif pronominal impersonnel]
Ces constructions sont nettement plus rares que celles avec passif pronominal simple (ça se voit, tout peut s’acheter en ligne etc.) et ne sont possibles qu’avec un nombre limité de verbes. En règle générale, le verbe est au passé, bien que le présent soit possible aussi :
Il s’est dit tant de choses à ce sujet qu’on ne sait plus où est la vérité. Tästä aiheesta on sanottu niin paljon asioita, että ei enää tiedä, mikä on totuus. ■ C’est une situation exceptionnelle, mais il s’est vu des cas où d’importantes sommes accumulées se trouvaient dues. Vaikka tilanne on poikkeuksellinen, on ollut tapauksia, joissa suuret kerääntyneet summat ovat langenneet maksettaviksi.
Attention à bien interpréter le sens de il s’est dit tant de choses à ce sujet et à ne pas le confondre avec le verbe se dire (ajatella) : Il s’est dit tant de choses peut signifier aussi « hän ajatteli niin paljon asioita ».
Les verbes construits avec un complément de verbe prépositionnel (CVP) ne peuvent normalement pas être mis à la forme passive. Il est cependant possible de « passiver » les verbes à deux compléments (CVD + CVP) et d’effacer l’agent en utilisant la construction avec le semi-auxiliaire se voir, grâce auquel le CVP peut être transformé en sujet d’une construction infinitive, sur le modèle de transformation suivant :
On | verbe | CVD | à | CVP | → | sujet | CVP se | voir | verbe infinitif | CVD |
On | a offert | un livre | à | Marc. | → | Marc | s’ | est vu | offrir | un livre. |
(a) Pour ses cinquante ans, on a offert à Richard une montre de sport. → Pour ses cinquante ans, Richard s’est vu offrir une montre de sport. Viisikymmentävuotispäiväksi hänelle annettiin rullaluistimia.
(b) On lui a refusé l’entrée. → Elle s’est vu refuser l’entrée. Häntä ei päästetty sisään.
(c) On leur a retiré le permis pour six mois. → Ils se sont vu retirer le permis pour six mois. Heidän ajokorttinsa pantiin hyllylle puoleksi vuodeksi.
Le pronom réfléchi se est le complément de verbe prépositionnel (offrir à, refuser à, retirer à). Dans la phrase (b), le pronom réfléchi se renvoie au sujet. On peut paraphraser la phrase en finnois ainsi : hän totesi itseltään evättävän sisäänpääsy et non « hän totesi itsensä epäävänsä… ». C’est pourquoi le participe ne s’accorde pas, car le pronom se n’est pas le sujet de l’infinitif (contrairement à ce qui se passe dans le cas des infinitives complément direct d’un verbe de perception) : il est le complément indirect. Autres exemples :
Les services médicaux de l’établissement se voient de plus en plus sollicités pour des soins en urgence. ■ Ce sont également tous les membres de cette association qui, s’ils s’étaient vu attribuer le marché en cause, auraient eu l’obligation de signer le contrat. ■ Les langues anciennes, d’abord condamnées pour avoir servi d’instrument de sélection, se sont vu reléguer depuis des lustres dans la marge de l’enseignement secondaire, comme un luxe à démocratiser si possible, comme un caviar accessible aux plus riches des pauvres.
Malgré son caractère surprenant pour l’apprenant de français langue étrangère, cette construction est très fréquente. Par rapport à on, elle souligne légèrement le caractère inattendu de l’évènement : le CVP devenu sujet se retrouve impuissant (« passif », au sens où on l’entend dans la langue courante) dans la situation exprimée par le verbe, mais le verbe voir n’y a cependant pas vraiment de valeur sémantique propre, il devient un simple auxiliaire de passivation. Ne pas traduire en utilisant nähdä !
Erreurs fréquentes : cette construction n’est pas surprenante seulement pour les apprenants de français langue étrangère. Bien des francophones ne la comprennent pas réellement, et la grande majorité d’entre eux l’assimilent probablement aux verbes de perception (elle s’est vue tomber), ou tout simplement ignorent la règle. On trouve ainsi de nombreux cas d’accord « fautif ».
On trouve aussi cette construction employée avec un agent exprimé. Elle sert alors à thématiser tel ou tel élément de l’énoncé, et l’agent est présenté comme un simple exécutant :
Trois anciens combattants se sont vu remettre des médailles par le colonel Kopp lors de la cérémonie anniversaire de la Victoire du 8 mai. [trois anciens combattants devient le thème] ■ Tous les candidats au bénéfice d’une admission provisoire (permis F) se sont vu accorder par l’Office des migrations l’autorisation de solliciter, auprès des autorités cantonales compétentes, un visa de retour [Tous les candidats… devient le thème].
Comparer avec les phrases à structure active normale :
Le colonel Kopp a remis des médailles à trois anciens combattants lors de la cérémonie anniversaire de la Victoire du 8 mai. [on soulignerait ainsi le rôle du colonel Kopp] ■ L’Office des migrations (ODM) a accordé à tous les candidats au bénéfice d’une admission provisoire (permis F) l’autorisation de solliciter, auprès des autorités cantonales compétentes, un visa de retour. [Le thème de la phrase serait ainsi le rôle de l’ODM.]
On peut donc traduire la phrase Osallistujille suotiin suuri etuoikeus/Heille suotiin suuri etuoikeus (voir ci-dessus) de quatre manières différentes : (a) avec on et un verbe actif ; (b) avec un passif normal ; (c) avec un passif impersonnel ; (d) avec l’auxiliaire se voir :
(a) On a accordé un grand privilège aux participants. On leur a accordé un grand privilège.
(b) Un grand privilège a été accordé aux participants. Un grand privilège leur a été accordé.
(c) Il a été accordé un grand privilège aux participants. Il leur a été accordé un grand privilège.
(d) Les participants se sont vu accorder un grand privilège. Ils se sont vu accorder un grand privilège.
(a) il y a plusieurs focus possibles (grand privilège, participants) mais la « visibilité » de l’agent exprimé par on donne à celui-ci un certain poids dans l’énoncé par rapport à des phrases où il est effacé ; le sujet on suggère une instance (taho) qui a décidé d’accorder ce privilège (et à qui les participants pourraient ou devraient par exemple être reconnaissants) ;
(b) le focus est sur les participants ;
(c) l’« agent » est complètement effacé et le focus est sur le verbe il a été accordé, qui prend plus de poids ;
(d) les participants sont « passifs », le focus est sur le grand privilège qui leur a été accordé.
La manière de percevoir le focus dans ces quatre variantes peut dépendre évidemment du contexte, du type de privilège (un privilège concret — par exemple financier — ou une occasion inattendue et rare de faire/voir quelque chose), ou d’autres aspects liées à la situation.
Le verbe faire s’utilise assez fréquemment pour exprimer un passif, notamment dans le cas de verbes indiquant un évènement fâcheux dont on est victime involontairement (vol, agression, contrôle de police, etc.). Ce genre de passif peut correspondre par exemple au finnois joutua (jnk kohteeksi) sans qu’il y ait toutefois toujours cette nuance :
À l’issue d’une soirée […], la chanteuse s’est fait insulter par des gens qui avaient trop bu. ■ Mon ami s’est fait flasher avec ma voiture. Suis-je responsable ? ■ L’orateur s’est fait huer par la foule. ■ Microsoft s’est fait pirater son réseau interne. ■ L’équipe locale s’est fait humilier par les visiteurs. ■ Je me suis fait voler mon bike. ■ Le musée s’est fait voler un tableau de Picasso. ■ Le petit garçon s’est fait renverser par une voiture. ■ Les voisins se sont fait mordre par leur chien. ■ En arrivant sur place pour éteindre l’incendie, les pompiers se sont fait tirer dessus. ■ Tu t’es bien gardé de raconter comment tu t’es fait casser la figure l’autre soir. ■ Le chanteur a révélé s’être fait tirer dessus une fois à la sortie d’un restaurant dans le Sud de la France
Se faire avoir est une construction passive de ce type extrêmement fréquente dans le français parlé. C’est la forme passive d’avoir dans le sens familier de « tromper, berner » (petkuttaa, Je t’ai bien eu Menit lankaan) et aussi dans le sens d’« attraper » (saada kiinni). Par plaisanterie, avoir peut d’ailleur s’utiliser dans ce sens au passif : On a été eus ! Meidät on petetty! Les exemples d’emploi d’avoir utilisé après se faire sont très nombreux :
On veut pas critiquer pour critiquer, c’est simplement pour aider les gens à ne pas se faire avoir en allant voir des films nuls. ■ À ce prix-là, tu te fais carrément avoir. ■ N’exagère pas trop avec la vitesse, sinon tu vas finir par te faire avoir. ■ Si le « grand public » préfère payer 30 ou 50 € pour se faire avoir au final par le fournisseur d’accès, c’est qu’il est plutôt mal informé. ■ J’ai acheté un nouvel ordi, mais je me suis fait avoir, il est plus bruyant qu’un moulin à café !
Dans cet emploi passif, il ne faut pas interpréter le verbe faire comme un factitif (comme teettää, rakennuttaa etc. en finnois). Tous les exemples ci-dessus doivent se rendre en finnois par un verbe équivalent à joutua ou par une construction non passive.
Cette valeur de faire ne doit donc pas être confondue avec les cas où le verbe faire s’emploie de façon réfléchie :
Il s’est fait couper les cheveux. Hän on leikkauttanut tukkansa. ■ Elle s’est fait teindre en noir. Hän on värjäyttänyt tukkansa mustaksi. ■ Il s’est fait connaitre par ses déclarations racistes. Hän on niittänyt mainetta [tehnyt itsensä tunnetuksi] rasistisilla kannanotoillaan. ■ Les réparations se font attendre. Korjaustyöt antavat odottaa itseään.
L’exemple suivant présente les deux emplois (verbe 1 valeur passive, verbe 2 valeur réfléchie) :
Ils (1) s’étaient fait arrêter par des policiers de Detroit qui (2) s’étaient fait passer pour de possibles acheteurs. Heidät pidättivät detroitilaiset poliisit, jotka ensiintyivät mahdollisina ostajina.
INDICATIF | |||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
présent | imparfait | passé simple | futur simple | ||||
je | suis admis(e) | j’ | étais admis(e) | je | fus admis(e) | je | serai admis(e) |
tu | es admis(e) | tu | étais admis(e) | tu | fus admis(e) | tu | seras admis(e) |
il | est admis | il | était admis | il | fut admis | il | sera admis |
elle | est admise | elle | était admise | elle | fut admise | elle | sera admise |
nous | sommes admis(es) | nous | étions admis(es) | nous | fûmes admis(es) | nous | serons admis(es) |
vous | êtes admis(es) | vous | étiez admis(es) | vous | fûtes admis(es) | vous | serez admis(es) |
ils | sont admis | ils | étaient admis | ils | furent admis | ils | seront admis |
elles | sont admises | elles | étaient admises | elles | furent admises | elles | seront admises |
passé composé | plus-que-parfait | passé antérieur | futur antérieur | ||||
j’ | ai été admis(e) | j’ | avais été admis(e) | j’ | eus été admis(e) | j’ | aurai été admis(e) |
tu | as été admis(e) | tu | avais été admis(e) | tu | eus été admis(e) | tu | auras été admis(e) |
il | a été admis | il | avait été admis | il | eut été admis | il | aura été admis |
elle | a été admise | elle | avait été admise | elle | eut été admise | elle | aura été admise |
nous | avons été admis(es) | nous | avions été admis(es) | nous | eûmes été admis(es) | nous | aurons été admis(es) |
vous | avez été admis(es) | vous | aviez été admis(es) | vous | eûtes été admis(es) | vous | aurez été admis(es) |
ils | ont été admis | ils | avaient été admis | ils | eurent été admis | ils | auront été admis |
elles | ont été admises | elles | avaient été admises | elles | eurent été admises | elles | auront été admises |
passé surcomposé | conditionnel présent | conditionnel passé 1 | conditionnel passé 2 | ||||
j’ | ai eu été admis(e) | je | serais admis(e) | j’ | aurais été admis(e) | j’ | eusse été admis(e) |
tu | as eu été admis(e) | tu | serais admis(e) | tu | aurais été admis(e) | tu | eusses été admis(e) |
il | a eu été admis | il | serait admis | il | aurait été admis | il | eût été admis |
elle | a eu été admise | elle | serait admise | elle | aurait été admise | elle | eût été admise |
nous | avons eu été admis(es) | nous | serions admis(es) | nous | aurions été admis(es) | nous | eussions été admis(es) |
vous | avez eu été admis(es) | vous | seriez admis(es) | vous | auriez été admis(es) | vous | eussiez été admis(es) |
ils | ont eu été admis | ils | seraient admis | ils | auraient été admis | ils | eussent été admis |
elles | ont eu été admises | elles | seraient admises | elles | auraient été admises | elles | eussent été admises |
SUBJONCTIF | |||||||
présent | imparfait | passé | plus-que-parfait | ||||
je | sois admis(e) | je | fusse admis(e) | j’ | aie été admis(e) | j’ | eusse été admis(e) |
tu | sois admis(e) | tu | fusse admis(e) | tu | aies été admis(e) | tu | eusses été admis(e) |
il | soit admis | il | fût admis | il | ait été admis | il | eût été admis |
elle | soit admise | elle | fût admise | elle | ait été admise | elle | eût été admise |
nous | soyons admis(es) | nous | fussions admis(es) | nous | ayons été admis(es) | nous | eussions été admis(es) |
vous | soyez admis(es) | vous | fussiez admis(es) | vous | ayiez été admis(es) | vous | eussiez été admis(es) |
ils | soient admis | ils | fussent admis | ils | aient été admis | ils | eussent été admis |
elles | soient admises | elles | fussent admises | elles | aient été admises | elles | eussent été admises | IMPÉRATIF | PARTICIPE | INFINITIF |
présent | présent | passé | présent | ||||
sois admis(e) | étant admis(es) | admis(es) | être admis(es) | ||||
soyons admis(es) | passé forme composée | passé | |||||
soyez admis(es) | ayant été admis(es) | avoir été admis(es) |
ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 45. Le passif. Dernière mise à jour : 12.6.2022
Mises à jour après le 15.8.2022