Guide de grammaire française
pour étudiants finnophones
Les déterminants indéfinis sont nombreux et de forme variée. Ils peuvent être composés d’un seul ou plusieurs mots (groupes déterminants ou déterminants composés).
Les déterminants formés avec la préposition de peuvent être suivis d’un déterminant défini, mais les formes simples (plusieurs, différents etc.) et les déterminants composés ne peuvent être suivis d’aucun autre déterminant.
En général, les déterminants au singulier expriment une nature indéfinie (comme l’article un). Les déterminants simples au pluriel et les formes composées de plusieurs éléments expriment à la fois une nature indéfinie et une quantité indéfinie (comptable ou massive).
Certains déterminants indéfinis ont un sens différent au singulier et au pluriel : par exemple quelques n’est (sémantiquement) pas le pluriel de quelque.
Les déterminants sont présentés ici du point de vue de l’étudiant finnophone : quel est le sens exact ou l’équivalent du déterminant en finnois, quelles sont les différences ou limitations d’emploi par rapport à l’équivalent finnois du déterminant concerné ?
Déterminants simples | ||
un, une | jokin, joku, eräs, yksi | |
des | jotkut, jotkin, eräät, yhdet, joitakin | |
aucun | ei mikään | |
nul | ei mikään | code écrit |
chaque (→ tous les) | jokainen | |
tel | tietty, se ja se | code écrit |
divers | eri, erilaiset | |
différents | eri, erilaiset | |
quelque | muuan, jokin | code écrit |
quelques | muutama(t), hieman | |
certains | jotkin, jotkut | |
plusieurs | usea(mpi), moni | |
maint(s) | moni, monet, eräänkin | code écrit |
force | melko paljon, melkoisesti, aika lailla | |
Groupes déterminants | ||
n’importe quel(les) | mikä tahansa… | |
un quelconque | jokin, joku… | |
bien des | monikin | |
un certain | eräs, muuan, tietynlainen | |
tel et tel (→ tel) | se ja se | |
tous les | joka | |
Déterminants composés | ||
nombre de | monet, paljon, lukuisat | code écrit |
quantité de | monet, paljon, lukuisat | code écrit |
la plupart de | useammat | |
peu de | vähän | |
un peu de | hieman, jonkin verran | |
un certain nombre de | jonkin verran | |
pas mal de | aika paljon, melkoisesti, melko lailla | français parlé |
beaucoup de | moni, monet, monta, paljon | |
trop de (→ beaucoup de) | liikaa, liian paljon | |
autant de (→ beaucoup de) | yhtä paljon, niin paljon | |
tellement de, tant de (→ beaucoup de) | niin paljon |
Les déterminants indéfinis de forme simple expriment généralement une nature indéfinie : on ne peut pas ou ne veut pas préciser le référent du nom. Certains de ces déterminants ont une forme plurielle, qui exprime les mêmes valeurs sémantiques que le singulier, mais en y ajoutant l’information du nombre.
Parmi ses différentes valeurs, l’article un(e) peut marquer l’indéfinition : la nature sémantique du référent du nom est connue, par exemple j’ai acheté un livre, mais cela ne suffit pas à l’identifier de façon précise (j’ai acheté un livre / un livre sur les volcans / un livre sur les volcans d’Asie vs le livre sur les volcans dont on a parlé hier). En même temps, la forme un/une indique une quantité précise. Pour plus d’exemples, voir l’article indéfini.
Le déterminant aucun ne s’utilise que dans les phrases négatives. Il s’accorde seulement en genre, il a une forme féminine (aucune), mais pas de pluriel :
À cause de la grève, aucun autobus n’a circulé. ■ Il n’y a aucune raison pour ne pas y aller. ■ Vous n’avez aucune chance de réussir. ■ sans aucun doute iman epäilystäkään [ne pas confondre avec sans doute]
Rem. Il existe cependant un pronom indéfini de forme plurielle, d’aucuns, utilisé dans le style soutenu.
Le mot nul peut s’utiliser comme déterminant ; dans ce cas, nul est synonyme d’aucun et ne s’utilise que dans une phrase négative, surtout dans le code écrit. Nul s’accorde en genre (il s’utilise toujours au singulier) :
Nulle autre personne n’aurait pu faire cela. ■ Sans nul doute. Siitä ei ole epäilystäkään. ■ Il n’y a nul besoin de s’inscrire à l’avance. Ei ole mitään tarvetta ilmoittautua etukäteen. ■ Vous n’aviez nulle raison de ne pas participer à ce concours.
Remarque : nul peut aussi être un adjectif, qui s’accorde en genre et en nombre :
une valeur nulle nolla-arvo ■ un film complètement nul aivan mitätön elokuva
Nul peut aussi être un pronom indéfini ; dans ce cas, il est sans genre et invariable.
Le mot tel peut être adjectif ou déterminant. Comme adjectif, il peut faire partie du groupe nominal, antéposé ou postposé au nom, ou être attribut du sujet. Comme déterminant, il est en tête du groupe nominal. Dans les deux cas, le sens de tel est parfois difficile à saisir pour les finnophones à cause des similarités et aussi des différences de ce mot avec le finnois sellainen.
Tel peut dans certains cas être un déterminant indéfini. Dans ce cas, il n’a pas d’équivalent exact en finnois. Cette valeur peut se rendre en finnois par la répétition d’un déterminant ou d’adverbe sur la base se- (se ja se, voir VISK), ou, parfois, tietty :
Tel élève préfère les maths, tel autre la chimie. Jotkut oppilaat pitävät matematiikasta, toiset kemiasta. ■ Il a dit qu’il viendrait à telle heure. Hän sanoi saapuvansa silloin ja silloin. ■ Nous nous trouvions à telle hauteur. Olimme sillä ja sillä korkeudella. ■ Vous pouvez régler le système de telle sorte que l’alimentation électrique est coupée à telle heure chaque jour de la semaine. Voit määrittää asetuksen niin, että virta katkaistaan automaattisesti tiettyyn aikaan jokaisena viikonpäivänä.
On peut souvent répéter tel pour former le déterminant composé tel et tel, qui a le même sens et qui est plus fréquent que la forme simple :
Nous étions à telle et telle hauteur. Olimme sillä ja sillä korkeudella ■ dans tel et tel cas tietyissä tapauksissa ■ Une certaine situation de départ mène avec telle et telle probabilité à l’univers actuel. Tietty alkutilanne johtaa sillä ja sillä todennäköisyydellä nykyuniversumiin. ■ Il se contente de répéter que selon telle et telle personne il en est ainsi. Hän sanoo vain aina, että sen ja sen henkilön mukaan asia on näin.
Quand il est adjectif, tel signifie « de ce genre », en finnois sellainen, surtout dans le code écrit :
J’ai retrouvé la maison de mon enfance telle qu’elle était. ■ dans de telles circonstances sellaisissa olosuhteissa, näin ollen ■ de telle manière täten, näin ollen ■ dans un tel cas sellaisessa tapauksessa
Dans la langue courante, l’adjectif tel a en général une valeur emphatique (« si grand », « si grave » etc.) :
As-tu déjà entendu un tel mensonge ? Oletko koskaan kuullut moista valhetta ? ■ Je n’ai jamais vu une telle effronterie. En ole koskaan nähnyt noin röyhkeää ihmistä. ■ Les dégâts étaient tels qu’il a fallu refaire toute la cave. Vahingot olivat niin vakavia, että kellari oli remontoitava täysin.
Pour cette raison, si on veut éviter la valeur emphatique, il vaut mieux utiliser de ce genre ou pareil (postposés). Comparer :
Je n’ai jamais vu une voiture de ce genre/une voiture pareille. En ole koskaan nähnyt tällaista autoa. vs. ■ Je n’ai jamais vu une telle voiture. En ole koskaan nähnyt noin mahtavaa autoa.
Avec certains noms ou dans certains contextes, tel n’a pas de valeur emphatique :
dans un tel cas ■ dans de telles circonstances ■ Nouvelles aires protégées : de telles annonces doivent se multiplier ! ■ Avec de telles directives, comment réconcilier les citoyens avec l’Europe ? ■ Nous resterons attentifs à de telles situations.
Dans le français parlé, à la place de tel, on utilise en général comme ça, de valeur plus neutre (pas forcément emphatique) :
Je n’ai jamais vu une voiture comme ça. ■ On ne trouve pas des lacs comme ça en France. ■ Il préfèrerait une cravate comme ça. ■ Tiens, où est-ce que tu as trouvé ce bracelet ? J’en ai jamais vu un comme ça. ■ Qu’est-ce que tu veux comme pommes ? Des comme ça, ou des comme ça ?
Mais comme ça est trop familier pour pouvoir être utilisé par exemple dans une lettre officielle.
La structure sellainen… joka correspond en français à un … qui. Quand sellainen a cette valeur cataphorique, il est impossible de le traduire par tel :
Etsin sellaista kirjaa, joka sopisi hyvin aloittelijoille. Je cherche un livre qui convienne bien aux débutants.
Ne pas dire je cherche un *tel livre qui convienne, qui est agrammatical.
Ces deux déterminants sont des adjectifs équivalant au finnois eri, erilainen, mais ils peuvent aussi être utilisés comme déterminants, qui s’accordent en genre et en nombre :
Lors de sa visite, le président a rencontré différentes personnalités politiques. ■ Divers problèmes se posent à nous. ■ Mon oncle m’a offert différents jeux vidéo.
Comme divers et différents sont des déterminants indéfinis, ils ne peuvent pas être précédés d’un autre déterminant indéfini. C’est pourquoi on ne peut pas les employer après de (forme de l’article indéfini pluriel devant un adjectif antéposé), ni après plusieurs, certains, quelques etc. :
Antoine a acheté différents/ divers vins. [et non : *de différents ou *de divers] ■ Le reporter a interviewé différents spécialistes. [et non : *de différents ou *de divers]
Éviter l’erreur fréquente qui consiste à dire j’ai vu *de différents films, ou il a parlé avec *de différentes personnes ou nous sommes allés dans *plusieurs différents pays etc. Ainsi cet exemple authentique :
Le caractère d’un manuel scolaire est pédagogique, mais en réalité sa naissance est le résultat de *plusieurs différents facteurs. [forme correcte : est le résultat de plusieurs facteurs différents.]
De même, on ne peut pas utiliser de déterminant numéral (indéfini par nature) devant différent : *trois différents films, il faut dire trois films différents. Ou, dans la rédaction scientifique :
Nous avons trouvé des mentions de cette règle dans quatre manuels différents. [et non : *quatre différents manuels].
En revanche, devant divers et différents, on peut utiliser des déterminants définis (différents et divers redeviennent alors de simples adjectifs) :
dans ces différents cas näissä erilaisissa tapauksissa ■ les différentes personnes que j’ai vues ne eri ihmiset, joita tapasin ■ ses diverses connaissances hänen eri tuttavansa
Quand il est postposé, différent prend sa pleine valeur d’adjectif, qui signifie « pas le même que » :
Il a lu différents livres sur l’environnement. Hän luki eri kirjoja ympäristöstä. ■ Moi j’ai lu des livres différents. Minä en lukenut samoja kirjoja.
Morphologiquement, quelques est la forme du pluriel de quelque. Mais le sens et l’utilisation de la forme plurielle sont très différents. malgré les apparences et malgré ce qui existe en finnois (joku/ jotkut/ jokin), en français moderne quelques n’est pas le pluriel de quelque, et quelque n’est pas le singulier de quelques. Le tableau suivant résume les équivalences entre le français et le finnois :
pronom | masculin | féminin |
---|---|---|
joku sanoi | quelqu’un a dit [pronom sans genre grammatical, pas de féminin ! ] | |
jotkut sanovat | certains disent il y en a qui disent | certaines disent il y en a qui disent |
jokin putosi jotain on tapahtunut söin jotain |
quelque chose est tombé [pronom sans genre grammatical, pas de féminin !] quelque chose est arrivé j’ai mangé quelque chose | |
déterminant | masculin | féminin |
joku mies / nainen | un homme | une femme |
jokin ongelma / syy | un problème | une cause |
jotkut miehet / naiset | des hommes | des femmes |
jotkut kirjat / kupit | des livres | des tasses |
joitain kirjoja / kuppeja | des livres | des tasses |
À cause de la ressemblance phonétique, certains mots commençant par quelque ne peuvent pas s’utiliser pour exprimer une faible quantité :
a) la suite phonique /kɛlkɶʃoz/
s’interprète automatiquement comme le pronom indéfini quelque chose, et jamais comme « quelques choses ». Même à l’écrit, quelques choses ne s’utilise guère. Si on veut exprimer l’idée du finnois muutama asia (quelques + choses), il faut dire :
muutama asia
certaines choses, un certain nombre de choses, deux ou trois choses (ou éventuellement plusieurs choses) [mais pas *quelques choses]
Hän kertoi meille muutaman asian.
Il nous a révélé certaines choses / un certain nombre de choses / deux ou trois choses. [mais pas : Il nous a révélé *quelques choses.]
b) quelquefois signifie « de temps en temps », « à certaines occasions » (joskus, silloin tällöin). Si on veut rendre l’idée du finnois muutaman kerran, il faut dire :
muutaman kerran un certain nombre de fois
(ou éventuellement plusieurs fois, ou en quelques occasions). [et non pas : *quelques fois]
On peut utiliser la combinaison certaines fois, mais ce groupe indique une indétermination de la date des évènements (joillakin kerroilla, silloin tällöin), plutôt qu’une quantité (muutaman kerran).
Morphologiquement, quelques est la forme du pluriel de quelque. Mais le sens et l’utilisation de la forme plurielle sont très différents, si bien qu’on peut dire qu’il s’agit de deux mots différents. De plus, devant certains mots, quelques ne peut pas s’employer comme déterminant de quantité.
a) quelques (au pluriel) indique une faible quantité :
Dans la salle, il n’y avait que quelques spectateurs. ■ J’ai vu quelques skieurs et deux motoneiges. Näin muutaman hiihtäjän ja kaksi moottorikelkkaa. ■ dans quelques instants muutaman hetken kuluttua
b) quelques est plus précis que joitakin (vain joitain). Il ne faut donc pas traduire joitakin par quelques, mais par des :
J’ai acheté des livres. Ostin (joitakin) kirjoja. [quantité indéfinie]
J’ai acheté quelques livres. Ostin muutaman kirjan. [petite quantité]
Je n’ai acheté que des livres. Ostin vain kirjoja. [enkä mitään muutas]
Je n’ai acheté que quelques livres. Ostin vain muutaman kirjan. [enkä paljon]
Quelques peut se combiner avec des déterminants définis :
Je vous ai apporté ces quelques fleurs. ■ Les quelques personnes que j’ai vues avaient toutes l’air pressées.
Règle à retenir : malgré les apparences et malgré les formes qui existent en finnois (joku, jotkut, jokin, jotkin), en français moderne quelques n’est pas le pluriel de quelque, et, inversement, quelque n’est pas le singulier de quelques. De plus, on ne peut pas utiliser quelques au pluriel devant les noms choses et fois (voir ci-dessus).
Quand il est adjectif, certain signifie « sûr, incontestable » (varma, taattu, kiistämätön) :
Le résultat n’est pas encore certain. ■ Elles ne sont pas certaines de partir.
L’adjectif certain peut être employé comme déterminant au pluriel. Certain(e)s peut alors se traduire en finnois eräät ou tietyt/tietynlaiset. Mais souvent il exprime aussi simplement une quantité indéfinie et correspond à jotkin/jotkut/joitakin :
Il me faut certains renseignements. Tarvitsen eräitä/joitain tietoja. ■ J’ai décelé certaines erreurs. Löysin eräitä / tiettyjä / joitain virheitä. ■ Les procédés présentent certaines similitudes. Menetelmissä on tietynlaisia samankaltaisuuksia. ■ Certains jours, on n’a pas envie de travailler. Joskus työnteko ei maistu.
Plusieurs exprime aussi une assez faible quantité. En finnois, il a plusieurs équivalents, dont le meilleur serait monikin (exprimé en général par usea(mpi) ou moni). Plusieurs est toujours invariable :
La voiture restera plusieurs jours chez le garagiste. ■ Le mot plusieurs a plusieurs équivalents en finnois. Sanalla plusieurs on suomessa useampi vastine / monta vastinetta.
Anciennement, plusieurs s’accordait en genre (plusieures heures), mais dans le français moderne, la forme *plusieures que les apprenants de français langue étrangère créent parfois est agrammaticale. Dans le français du Québec, plusieurs est aussi fréquemment employé dans le sens de « beaucoup de », « de nombreux » : Plusieurs consommateurs ont protesté contre cette tarification. = de nombreux consommateurs.
Le déterminant maint s’utilise essentiellement dans le code écrit et il correspond au finnois moni ou monikin. Dans la langue courante, son équivalent est bien des. On l’utilise cepen-dant aussi dans la langue courante dans des expressions figées, par exemple en maint endroit.
Particularité : on peut l’utiliser au pluriel ou au singulier, le sens est le même. L’expression maintes fois est cependant utilisée pratiquement toujours au pluriel (cette expression lexicalisée est aussi relativement fréquente dans le français parlé) :
En maint endroit / en maints endroits Monessa paikassa ■ Pendant le voyage, nous devrons affronter maint(s) danger(s). Matkan aikana joudumme kohtaamaan monia vaaroja. ■ Je le lui ai pourtant dit maintes fois. Olen sanonut sen hänelle eräänkin kerran. ■ L’enquête a soulevé mainte(s) question(s) restée(s) sans réponse(s). Tutkinnassa nousi esille monta vaille vastausta jäänyttä kysymystä.
Le mot force est un déterminant de quantité moins fréquent, mais qu’on rencontre relativement souvent. On le qualifie souvent de « littéraire », mais en réalité il s’emploie aussi dans la langue courante. Il a plus ou moins le même sens que maint, mais souvent avec une nuance descriptive un peu ironique ou comique. Il correspond au finnois aika lailla (on pourrait le paraphraser par la forme ”aikamoisesti”). Il détermine normalement un pluriel (comptable) :
Pour avoir bu force verres de vin blanc avant le concert, le musicien commençait à avoir du mal à tenir le rythme. ■ Autant il y a des films où il faut pincer les spectateurs pour qu’ils s’expriment, autant celui-ci suscita force questions, commentaires et témoignages dans l’assistance. ■ Dans les bistrots à côté, on voyait des clients vidant des canettes de bière et ingurgitant force brochettes de mouton. ■ Surtout, la baronne de la Tronche-en-biais, personnage burlesque qu’il [Pierre Desproges] incarne travesti en femme et avec force mimiques, faisait se tordre de rire les téléspectateurs.
Ce déterminant indéfini singulier n’est pas à confondre avec la forme plurielle quelques et c’est en fait un mot différent de quelques. On l’utilise surtout dans le code écrit strict ou, dans la langue courante, dans certaines expressions figées.
Dans le code écrit strict (style soutenu ou littéraire), on utilise parfois quelque comme équivalent de un. Il correspond donc au finnois jokin, dont l’équivalent est un. Dans les phrases suivantes, on pourrait le remplacer par un sans que le sens de la phrase change :
J’ai entendu du bruit dans le jardin. Ce sera quelque chat. ■ Cherchons quelque endroit pour nous reposer.
Dans le code écrit courant, on utilise aussi quelque comme déterminant de quantité équivalent de un(e) certain(e), le plus souvent devant des noms qui expriment une difficulté ou un sentiment négatif. Il correspond alors au finnois jokin verran, jonkinlainen :
Il a eu quelque peine à comprendre. ■ La vanité fondamentale de l’homme m’inspire à ce propos quelque scepticisme. ■ Nous avions quelque peine à croire que ce soit possible. ■ Malgré la tempête, le bateau réussit à entrer dans le port, non sans quelque difficulté.
Le sens originel d’indéfini de quelque au singulier correspondant au finnois jokin se retrouve dans des expressions qui sont devenues figées et grammaticalisées (les usagers n’ont plus conscience du sens de quelque) :
quelque chose jokin/jotakin ■ quelque part jossakin ■ quelquefois joskus ■ en quelque sorte tavallaan ■ Il restera quelque temps chez nous. Hän jää meille joksikin aikaa. ■ à quelque distance jonkin matkan päässä
Le mot quelque a aussi gardé ce sens quand il est utilisé comme déterminant à valeur concessive.
Le déterminant singulier quelque s’utilise donc dans des cas relativement limités. Il vaut mieux ne pas l’utiliser trop souvent (sauf dans les expressions quelque chose, quelque temps etc.). Bien que le sens corresponde exactement à celui du déterminant indéfini finnois jokin, on l’utilise, dans ce sens-là, surtout dans le code écrit strict. Dans la langue courante, l’équivalent de jokin est un (voir tableau). Sous l’influence du finnois, beaucoup de finnophones, qui croient bien faire, mettent la forme quelque (au singulier) partout, ce qui semble très étrange à un locuteur francophone dans la langue courante.
Quelque est aussi un adverbe, qui a deux emplois principaux :
a) devant une expression de quantité (nombre) il a le sens d’« environ » :
Ce guide très complet présente quelque six mille sites touristiques. ■ Le zoo abrite quelque deux cent cinquante animaux d’une cinquantaine d’espèces différentes.
b) utilisé devant un adjectif, il exprime la concession.
L’élément n’importe correspond au finnois …tahansa, …hyvänsä. N’importe est invariable, l’élément quel s’accorde en genre et en nombre.
singulier | pluriel | |
---|---|---|
masculin | n’importe quel | n’importe quels |
féminin | n’importe quelle | n’importe quelles |
Pour venir, tu peux prendre n’importe quelle ligne de bus. ■ Avec cette neige, on ne peut pas utiliser n’importe quel fart.Tällaisella kelillä ei voi käyttää mitä tahansa suksivoidetta. ■ Pour une bonne tarte aux pommes, on ne peut pas prendre n’importe quelles pommes. ■ à n’importe quelle heure
Erreur fréquente à éviter : ne pas confondre le déterminant indéfini n’importe quel avec le pronom indéfini n’importe lequel et ne pas dire *n’importe lequel livre, *tu peux venir à n’importe laquelle heure etc., qui sont des formes tout à fait agrammaticales.
Dans la langue courante (code écrit et français parlé), on utilise habituellement le déterminant singulier certain précédé de l’article indéfini, qui forme alors groupe déterminant un(e) certain(e). Il signifie eräs, tietty. Le groupe s’accorde en genre (mais il ne s’utilise jamais au pluriel dans la langue moderne) :
J’ai rencontré une certaine personne que tu connais aussi. ■ Cette information concerne un certain groupe de personnes, qui seront avisées en temps voulu. ■ d’une certaine manière jollakin tavalla
Devant un nom abstrait singulier, un certain exprime une faible quantité, en finnois jonkinlainen, tietynlainen, jonkin verran :
Elle montrait une certaine irritation. ■ un homme d’un certain âge vanhahko mies ■ Ce village a un certain charme. Siinä kylässä on tiettyä viehätystä. ■ Il lui faudra un certain temps. Hän tarvitsee jonkin verran aikaa.
L’adjectif certain(e) peut être employé comme déterminant seul dans le style soutenu avec le sens de « eräs », « muuan », mais on dit rarement ainsi dans la langue courante : J’ai rencontré certaine personne qui m’a dit que Mathieu et Alice allaient divorcer.Tapasin erään henkilön, joka kertoi, että Mathieu ja Alice ovat eroamassa.
Le déterminant chaque équivaut au finnois joka(inen) + nom. le plus souvent, chaque peut être remplacé par tous les :
Chaque jour, Marc se lève à 6 heures. ■ Chaque passager reçoit une carte d’embarquement. Jokainen matkustaja saa maihinnousukortin. ■ Tous les jours, Marc se lève à 6 heures. ■ Tous les passagers reçoivent une carte d’embarquement. ■
Il existe cependant des expressions figées comme à chaque instant, chaque fois, en chaque occasion, où on utilise habituellement la forme chaque. Certaines de ces expressions ont une variante avec tout, soit au pluriel soit au singulier, d’autres non :
à chaque instant / à tout instant (plutôt style soutenu) ■ chaque fois joka kerta / toutes les fois kaikilla kerroilla, aina ■ à chaque occasion / en toute occasion
Comme il existe en finnois deux mots différents qui peuvent se traduire par chaque, joka et kaikki, les finnophones sont tentés d’établir la correspondance suivante : joka = chaque / kaikki = tous les.
Cette correspondance est cependant trompeuse. tout d’abord, le groupe déterminant tous les est nettement plus fréquent que chaque et peut toujours s’utiliser à la place de chaque. L’inverse n’est pas toujours vrai : on ne peut pas toujours utiliser chaque à la place de tous les. Il y a en effet une (légère) nuance : chaque renvoie normalement aux éléments d’une série (explicite ou implicite) :
Tous les étés, je vais en France, et chaque année on a un temps misérable ! Käyn Ranskassa joka kesä, ja joka ikinen vuosi on kurja sää. ■ Quand nous étions à Paris, nous allions au restaurant chaque jour. Kun olimme Pariisissa, kävimme ravintolassa joka päivä. [chaque jour de notre séjour]. ■ Il se levait chaque jour à 6 heures. Hän nousi joka päivä kuudelta. [chaque jour de sa vie].
La correspondance à établir par les finnophones est la suivante :
joka = tous les (et éventuellement chaque)
kaikki = tous les
Dans le doute, il vaut donc mieux toujours utiliser tous les, et les finnophones ont de toute façon intérêt à s’habituer à utiliser tous les nettement plus fréquemment que chaque.
De nombreuses grammaires incluent quelconque (en finnois jokin, jonkinlainen) parmi les déterminants indéfinis. En français moderne, quelconque n’est plus utilisé qu’en fonction d’adjectif (il est impossible de dire par exemple *je cite quelconque exemple). On retrouve dans le code écrit son ancien caractère de déterminant, dans une expression comme dans un quelconque cas de figure jossakin muodossa, mais dans ce cas aussi, il est précédé d’un article avec lequel il forme un groupe déterminant et ne peut pas être utilisé seul.
Le plus fréquemment, quelconque s’utilise comme adjectif postposé ou attribut du sujet, et signifie « banal, sans grand intérêt » :
un livre quelconque ei kovin erikoinen kirja ■ Le film était quelconque. Elokuva ei ollut kummoinenkaan.
Les déterminants composés les plus fréquents sont les déterminants indéfinis formés d’un adverbe (beaucoup, peu, tellement) ou d’un nom ou groupe nominal auquel on ajoute le mot de :
adverbe + de : beaucoup de, tant de, trop de, peu de, énormément de, plus de, moins de, guère de, infiniment plus de, pas mal de…
nom / groupe nominal + de : quantité de, nombre de, un certain nombre de, une espèce de, une sorte de, toute sorte de, un tas de, un kilo de, une foule de, un paquet de, une dose de…
Les déterminants composés indéfinis peuvent se combiner avec un déterminant défini :
mes amis : beaucoup de + mes amis → beaucoup de mes amis monet ystävistäni ■ ces exemples : nombre de + ces exemples → nombre de ces exemples monet niistä esimerkeistä ■ la fin : beaucoup de + la fin → Je n’ai pas vu beaucoup de la fin du film. En nähnyt paljoakaan elokuvan lopusta.
Quand un déterminant indéfini composé avec de se combine avec l’article défini, il peut se contracter avec l’article :
les amis : beaucoup de + les amis → Beaucoup des amis que j’ai vus étaient bronzés. Monet tapaamani ystävät olivat ruskettuneita. [de + les donne la forme contracte des]. ■ Beaucoup du temps qu’on perd à faire la queue dans une banque pourrait être évité avec une meilleure gestion de l’espace. ■ L’opinion ne perçoit pas l’utilité de beaucoup des réformes entreprises, qui sont couteuses et engendrent la pagaille.
Il est donc tout à fait possible de dire beaucoup du, beaucoup des malgré ce que divers manuels finlandais enseignent et de nombreux apprenants s’imaginent (voir aussi ci-dessous).
De nombreux noms ou adverbes peuvent se combiner à la préposition de pour former des déterminants composés, et on peut former des déterminants composés de quantité assez librement (voir ci-dessous).
Dans les tournures exclamatives, le déterminant composé dont le dernier élément est de peut être séparé en deux parties. Le mot de reste à sa place normale devant le nom, mais le premier élément du déterminant se place au début de la proposition :
On n’a pas réussi à avoir de billets, tant il y avait de monde ! (< Il y avait tant de monde.) ■ L’inventivité des annonceurs pour drainer les foules vers leurs services parait illimitée, tant la technologie offre de possibilités nouvelles (< offre tant de possibilités). ■ Cette rencontre avec mes anciens amis m’a déçu, si peu on a eu de temps pour se voir (< on a eu si peu de temps).
Beaucoup de est l’un des déterminants indéfinis composés les plus fréquents et les plus utilisés. Voir ci-dessus l’utilisation des déterminants composés et la combinaison de ceux-ci avec des déterminants définis.
À l’origine, beaucoup est un groupe nominal : un beau coup de quelque chose signifie « une belle quantité ». Il existe aujourd’hui encore une expression qui y ressemble : un bon coup de quelque chose, par exemple : J’ai bu un bon coup d’eau gazeuse et je maintenant me sens mieux. (join kunnon kulauksen vichyvettä ja nyt on parempi olo). Au cours du temps, le groupe beau + coup s’est grammaticalisé, ce qui signifie qu’il n’est plus interprété comme un groupe adjectif + nom, mais qu’il forme un mot indépendant, avec un sens différent. Dans ce processus, il a perdu son article et l’adjectif s’est soudé au nom pour former un seul mot.
En finnois, paljon utilisé comme déterminant peut être modifié par un adverbe comme melko, hyvin, liian, niin : melko paljon, hyvin paljon, liian paljon, niin paljon. En français, beaucoup ne peut pas être précédé par assez, très, trop, si (*trop beaucoup,*si beaucoup, *assez beaucoup de etc. sont agrammaticaux). En revanche, on peut dire assez de, mais cette expression a un sens différent, « suffisamment de » (tarpeeksi). Comparer :
Il y a assez de beurre. On tarpeeksi voita. ■ Il y a une assez grande quantité de beurre. On melko paljon voita.
Pour rendre l’idée de aika paljon, melko paljon hyvin paljon, il faut utiliser en français des constructions relativement compliquées (en comparaison avec la simplicité du finnois). Dans les listes ci-dessous, les abréviations suivantes ont été utilisées : CE code écrit, LC langue courante, FP français parlé.
CE/LC un assez grand nombre de [comptable]
CE/LC une assez grande quantité de [comptable et massif]
LC pas mal de [comptable et massif]
suhteellisen paljon
CE/LC un nombre relativement important/élevé de [comptable]
CE/LC une quantité relativement importante/élevée de [comptable et massif]
FP pas mal de [comptable et massif]
hyvin paljon
CE un très grand nombre de [comptable]
CE une très grande quantité de [comptable et massif]
LC énormément de [comptable et massif]
FP un tas de, une masse de, plein de [comptable et massif], une foule de [comptable]
liian paljon
CE/LC trop de [comptable et massif]
un trop grand nombre de [comptable]
une trop grande quantité de [comptable et massif]
niin paljon
CE/LC tellement de / tant de [comptable et massif]
un si grand nombre de [comptable]
une si grande quantité de [comptable et massif]
yhtä paljon
CE/LC autant de [comptable et massif]
un aussi grand nombre de [comptable]
une aussi grande quantité de [comptable et massif]
Il existe aussi des variantes exclamatives formées avec que et combien (kuinka paljon).
Dans le code écrit, devant un nom représenté comme comptable, à la place de beaucoup de ou peu de, on utilise assez fréquemment des variantes avec les adjectifs important ou grand et leur contraire peu élevé ou faible :
un assez grand nombre de = un nombre assez important de/ un nombre assez élevé de
assez peu de = un assez faible nombre de / un nombre assez faible / un nombre assez peu élevé de
trop de = un trop grand nombre de / un nombre trop important de / un nombre trop élevé de etc. ■ un assez grand nombre de livres melko paljon kirjoja ■ assez peu de gens ou un assez faible nombre de personnes aika vähän ihmisiä ■ un très grand nombre de propositions hyvin paljon ehdotuksia ■ assez peu de graisse melko vähän rasvaa ■ un assez faible nombre de cas melko vähän tapauksia
Quand en finnois on utilise un déterminant de quantité devant un nom représenté comme massif et de sens abstrait (pas une matière concrète comme eau, sable, riz etc.), on utilise en français dans le code écrit de caractère scientifique, administratif etc. de préférence une construction avec un adjectif comme faible, grand etc. :
une trop grande prudence liikaa varovaisuutta, liiallinen varovaisuus ■ une trop grande bureaucratie liikaa byrokratiaa, liiallinen byrokratia ■ une certaine résistance jonkin verran vastustusta, jonkinlainen vastustus ■ une recherche trop peu importante liian vähän tutkimusta, liian vähäinen tutkimus ■ un très grand amour hyvin paljon rakkautta ■ une participation trop faible liian vähäinen osallistuminen
Dans le français courant (écrit et parlé), on peut cependant dire sans problème trop de prudence, trop de bureaucratie, un peu de résistance, trop peu de recherche etc.
Comme il est expliqué ci-dessus, beaucoup de peut se combiner avec un déterminant défini, par exemple l’article défini, pour former des suites beaucoup du / beaucoup des etc. :
Beaucoup des amies de la princesse de Parme et avec qui la duchesse de Guermantes se contentait depuis des années du même bonjour convenable […] s’en plaignaient discrètement à l’Altesse. ■ L’opinion ne perçoit pas l’utilité de beaucoup des réformes entreprises, qui sont couteuses et engendrent la pagaille. ■ Je me suis endormi et je n’ai pas vu beaucoup de la fin du film. ■ Beaucoup des amis que j’ai vus étaient bronzés.
Mais ces formes ne doivent pas systématiquement être interprétées comme un groupe [déterminant indéfini+déterminant défini]. On trouve aussi des groupes beaucoup du / beaucoup des correspondant à d’autres structures grammaticales :
a. Il peut s’agir de l’adverbe beaucoup intercalé entre un verbe construit avec de et son complément prépositionnel. Dans ce cas-là, des ou du sont des formes contractes de la préposition de et de l’article défini :
On parle des parachutes dorés. → On parle beaucoup des parachutes dorés. ■ Le système d’Aristote diffère du système de Platon. → Le système d’Aristote diffère beaucoup du système de Platon. ■ Durant la conférence de presse, le célèbre pianiste a également expliqué qu’il voyageait peu en Asie car il souffrait beaucoup du décalage horaire. ■ Les demandeurs d’emploi se plaignent beaucoup des offres portant sur de petits contrats (un jour, voire quelques heures).
b. Il peut s’agir de l’adverbe beaucoup utilisé comme nom (complément de verbe direct), notamment après des verbes comme apprendre, savoir, attendre etc. Dans ce cas-là également, des ou du sont des formes contractes de la préposition de et de l’article défini le / les :
On apprend beaucoup des autres. Muilta ihmisiltä voi oppia paljon. ■ Les PME attendent beaucoup des banques pour leurs besoins de financement. PK-yritykset odottavat paljon pankeilta rahoitustarpeidensa järjestämiseen. ■ Les soins palliatifs exigent beaucoup du personnel soignant et du médecin. Saattohoito vaatii paljon hoitohenkilökunnalta ja lääkäriltä.
À la forme négative, on pourrait trouver par exemple rien :
Il n’attendait plus rien des autres. ■ On ne savait encore rien du tremblement de terre qui s’était produit.
c. Il peut s’agir aussi de l’expression y avoir de qch ou trouver de qch dans qch/en qqn, qui signifie que quelque chose ou quelqu’un est marqué ou caractérisé par quelque chose (en finnois olla jnk ainesta jssak). Dans ce genre d’expression partitive, on utilise l’article défini, qui peut éventuellement se contracter avec la préposition de :
Il y a dans son style quelque chose du classicisme russe. Hänen tyylissään on venäläisen klassismin ainesta. → Il y a dans son style beaucoup du classicisme russe. Hänen tyylissään on paljon venäläisen klassismin ainesta. ■ Il y a en elle un peu de la bergère de Watteau.→ Il y a en elle beaucoup de la bergère de Watteau.
Dans le code écrit, on peut aussi sous-entendre quelque chose et utiliser de seul +article défini seul :
Il y a en lui du poète. Hänessä on runoilijan ainesta. → Il y a en lui beaucoup du poète. Hänessä on paljon runoilijan ainesta. Il y a en elle de la bergère de Watteau.→ Il y a en elle beaucoup de la bergère de Watteau.
Quand beaucoup est utilisé comme adverbe, il ne peut pas non plus être modifié par très, assez, si, autant (comme en finnois : melko / hyvin / liian / niin paljon). Dans ces cas également, les équivalents du finnois hyvin paljon et aika paljon sont variés en français :
hyvin paljon : vraiment beaucoup, énormément, en très grande quantité, en très grand nombre ; aika paljon : considérablement, de façon non négligeable, français parlé :pas mal
Niin paljon et yhtä paljon peuvent heureusement se traduire de façon très simple, par un seul mot : autant. Dans le code écrit, on utilise aussi d’autres variantes, qui ne se sont cependant pas obligatoires :
niin paljon : autant, dans une telle mesure, à tel point, à un tel point (siinä määrin)
yhtä paljon : autant, dans la même mesure, au même point (samassa määrin)
Un peu de (en finnois jonkin verran, hieman) s’utilise presque exclusivement avec un nom massif (un peu de vin, un peu de monde) ; pour traduire jonkin verran déterminant un nom comptable, on utilise un certain nombre de. En revanche, le déterminant peu de peut s’utiliser avec un nom comptable ou massif. En résumé :
+ nom massif | + nom comptable | |
---|---|---|
vähän | peu de | peu de |
hieman | un peu de une petite quantité de | quelques un certain nombre de |
jonkin verran | une certaine quantité de | un certain nombre de |
J’ai trouvé un certain nombre de fautes de frappe. ■ L’Agence utilise un certain nombre de programmes et d’outils d’évaluation des risques afin de vérifier les déclarations de revenus des particuliers. ■ Vous reprendrez bien un peu de café ? ■ Un certain nombre de travaux économiques récents sont consacrés à l’étude de l’influence de la colonisation sur le développement des pays. ■ J’ai trouvé peu de fautes de frappe. ■ Il a bu peu de vin. ■ Il y avait peu de monde et peu de voitures.
Contrairement à beaucoup, devant peu on peut utiliser les adverbes assez, très et si :
Il nous reste assez peu de temps, il va falloir se dépêcher. ■ Grève à la Cotra : très peu de bus circuleront, ce samedi, à Angers. ■ En, chemin, on a croisé assez peu de camions pour un jour de semaine. ■ C’est étonnant de voir si peu de monde sur la plage par cette belle journée.
Le déterminant composé pas mal de est extrêmement fréquent dans le français parlé et correspond au finnois aika paljon [jtak] :
J’ai trouvé pas mal de fautes de frappe. ■ Maintenant, on ne va pas le nier, on sait qu’il nous reste pas mal de boulot pour être prêts. ■ Depuis, ça aura été pas mal de temps passé dans ma Champagne natale. ■ Pour pas mal de pays d’Amérique, pour pas mal d’intellectuels, cette chose est en train de se réaliser. ■ L’intrigue de cet épisode va être le point de départ d’une nouvelle enquête, avec pas mal de suspects potentiels.
Le finnois aika paljon ne peut pas se traduire *assez beaucoup de, qui est agrammatical (voir ci-dessus) : l’équivalent français de aika paljon [jtak] est, dans le code écrit, un assez grand nombre de ou une assez grande quantité de. Ces groupes sont assez longs et pas mal de est une manière beaucoup plus simple d’exprimer la même idée. Mais, bien que très employé par tous les locuteurs, pas mal de reste du style familier, et ne doit pas être utilisé dans le code écrit strict.
Les deux déterminants composés nombre de et quantité de s’utilisent couramment à l’écrit à la place de beaucoup de. Ils ne sont cependant pas entièrement interchangeables, ce qui peut provoquer des difficultés :
Malheureusement, nombre d’électeurs ont fait l’erreur de croire ces promesses. ■ À signaler toutefois que dans nombre de cas une cotisation est demandée pour bénéficier des offres. ■ Cette option ayant soulevé nombre de protestations de toutes parts, il semble que l’opérateur fasse aujourd’hui marche arrière. ■ Même un site moyennement fréquenté peut tourner le dos à quantité de personnes chaque jour. ■ Toutes les initiatives de « discrimination positive » soulèveront quantité de difficultés et de débats. ■ Je peux maintenant boire n’importe quel café… en rajoutant quantité de sucre et de lait pour masquer le gout.
Attention à la forme des déterminants nombre de et quantité de : ils sont sans article. Les mots nombre et quantité peuvent s’utiliser comme noms, avec un article, mais souvent dans des contextes différents ou modifiés par un adjectif :
quantité de cas monet tapaukset /la quantité de/des cas tapausten määrä ■ quantité de sel runsaasti suolaa / la quantité de sel suolan määrä ■ nombre de participants monet osallistujat / le nombre des participants osallistujien määrä ■ dans nombre de cas monissa tapauksissa / le nombre de/des cas tapausten määrä ■ un faible nombre de participants vähäinen osallistujien määrä / un nombre limité de cas rajallinen määrä tapauksia
De même, ne pas confondre nombre de (monet), toujours sans article, avec un certain nombre de (jonkin verran).
Nombre de et quantité de sont fréquents dans le code écrit, mais d’un style légèrement plus soutenu et ne peuvent pas toujours s’employer librement. Le plus simple pour l’apprenant de français langue étrangère est d’utiliser les formes suivantes, qui peuvent s’utiliser sans aucune limitation de style :
un grand nombre de + comptable pluriel [tous référents]
une grande quantité de + comptable pluriel [référent non animé] ou massif
Pour déterminer un nom à référent animé, on utilise de préférence un grand nombre de. Dans un style soigné, on réservera une grande quantité de à des non animés. Par définition, quantité renvoie plutôt à quelque chose qui peut être perçu comme une masse :
un grand nombre de personnes / candidats / cas / problèmes
une grande quantité de blé / fautes / vin / problèmes
Le déterminant la plupart de peut déterminer un nom singulier ou pluriel.
Malgré la présence de l’article défini (contracté au masculin la plupart du, non contracté au féminin, la plupart de la), il renvoie généralement à un nom massif, envisagé comme un ensemble continu non comptable :
La plupart du conditionnement papier est recyclable. ■ Les catastrophes naturelles affectent la plupart du territoire africain. ■ Le pays exportait la plupart de sa production en France, Allemagne et Suisse. ■ La plupart du lait consommé est du lait écrémé. ■ Le Minnesota, le Montana, le Dakota du nord et du sud produisent la plupart du blé des États-Unis. ■ Dans le monde, les petits agriculteurs assurent encore la plupart de la production alimentaire.
Mais on dit plus difficilement ?la plupart du personnel (le personnel n’étant pas vu comme une masse continue comme le lait). Il règne dans ce domaine un certain flottement. L’expression la plupart du temps (useimmiten) est figée et bien établie, mais la tendance moderne est d’éviter l’utilisation de la plupart de + singulier quand le caractère défini du nom est trop évident. On préfère souvent dire la plus grande partie de la nuit plutôt que la plupart de la nuit. On constate des incertitudes chez les francophones à ce sujet et comme le montre cet exemple : Ces fréquences [acoustiques] incluent le dialogue et la plupart de la voix humaine. Il vaudrait mieux dire : la plus grande partie de la voix humaine.
De même, si le GN est déterminé par une relative, la valeur définie de l’article se trouve soulignée, et on préfère utiliser la plus grande partie de :
La plus grande partie du personnel a été mise au chômage partiel. ■ La plus grande partie du seigle qu’on consomme en Finlande est importée d’Allemagne et de Pologne. [plutôt que la plupart du seigle].
C’est pour cette raison que devant un nom au singulier, le plus simple pour l’apprenant FLE est d’utiliser systématiquement la plus grande partie de (ou, code écrit : la majeure partie de) qui peut s’employer devant tous types de noms, sauf dans le cas d’une expression figée comme la plupart du temps.
Quand la plupart de détermine un nom au pluriel, on peut utiliser tout type de noms. Si le GN déterminé par la plupart de est le sujet du verbe, le verbe s’accorde toujours au pluriel. Avec des déterminants comme la majorité de, l’usage est variable :
La plupart des étudiants étudient deux champs disciplinaires. ■ La plupart des élèves choisissent l’anglais. ■ La plupart des élèves de terminale passent le bac à la session de printemps. ■ Dans la plupart des cas, la batellerie artisanale s’exerce dans le cadre d’une entreprise familiale.
Le déterminant bien des est exceptionnel : le mot bien se comporte comme un adverbe indépendant et des comme un article indéfini ; c’est donc un groupe [bien + des], et non pas *[bien de + déterminant] : la règle d’effacement ne s’applique pas dans ce cas, puisqu’il n’y a pas de préposition de. En quelque sorte, le mot bien modifie le déterminant des/de.
Le sens exact de bien des est assez malaisé à saisir pour un non francophone, mais on peut dire que bien des équivaut assez bien au finnois monta(kin) ou jos jonkinlaista :
Avant de réussir, vous vous exposerez à bien des difficultés. ■ Bien des mariages se terminent par un divorce. ■ Bien des fois, il se demandait s’il aurait dû apprendre le français. ■ Tu as bien de la chance. Olettodella onnekas. ■ Il y a bien du monde. Onpas täällä paljon ihmisiä. ■ Il a eu bien des problèmes. Hänellä oli jos jonkinlaisia ongelmia.
Devant adjectif antéposé, des devient de, conformément à la règle :
Pour les remarques sur tes fautes d’orthographe, je dirais que bien de grands écrivains en faisaient également. ■ Nous reviendrons sur ce sujet bien d’autres fois encore. Palaamme tähän ongelmaan vielä erinäisenkin kerran.
Dans ce dernier exemple, le d’ devant autres est la forme de l’article indéfini pluriel des (bien des) devant l’adjectif antéposé autres et non le résultat de la règle d’effacement.
Bien des n’est pas un simple synonyme de beaucoup de ou quantité de. L’expression bien des introduit une nuance subjective : « plus que vous ne croyez », « plus que vous ne pouvez imaginer », « plus que je n’aurais souhaité », « plus que ce à quoi je m’attendais » etc., que rend assez bien le finnois jos jonkinlaisia. Ainsi, on peut opposer :
Ils ont eu beaucoup de malheurs. [Expression de sens neutre] ■ Ils ont eu bien des malheurs. [« plus qu’on ne pourrait imaginer / plus que ce qui est le lot commun etc. »] ■ Nous avons rencontré quantité de problèmes. [Expression de sens neutre (mais très légèrement moins neutre que beaucoup de)] ■ Nous avons rencontré bien des problèmes. [« beaucoup plus de problèmes / des problèmes bien plus graves que ce à quoi nous nous attendions etc. »]
Cette valeur « supplémentaire » dépend évidemment du contexte et ne peut pas se définir de façon unique. Il faut donc manier cette expression avec prudence. S’il est vrai que bien des n’est pas un déterminant que les apprenants de français langue étrangère ont tendance à utiliser spontanément, certains « l’adoptent » parfois comme variante systématique de beaucoup de dans le simple but d’enjoliver leur expression française, ce qui est à éviter.
Dans certains cas, le sens particulier de bien des s’est affaibli, comme dans la locution bien des fois, qui s’utilise de façon courante comme synonyme de souvent, mais ce sens subsiste toujours. Le sens de la locution bien des fois se rend assez bien en finnois par erinäisenkin kerran, useammankin kerran, montakin kertaa : le suffixe -kin exprime un peu de la même manière cette valeur subjective assez difficile à définir précisément.
Le même problème concerne l’adverbe bien modifiant un adjectif : bien difficile, bien triste, bien compliqué etc.
Les déterminants interrogatifs et les déterminants exclamatifs ont des formes identiques :
singulier | pluriel | |
---|---|---|
masculin | quel | quels |
féminin | quelle | quelles |
Ils s’utilisent devant des noms dans des constructions interrogatives ou exclamatives :
Quel jour sommes-nous ? Mikä viikonpäivä tänään on? ■ Quelle idée étrange ! Mikä kummallinen ajatus! ■ Quelles solutions s’offrent à nous ? Mitkä ovat meidän vaihtoehtomme? ■ Quels paysages magnifiques ! Kuinka upeita maisemia!
Ne pas confondre les déterminants interrogatifs de la série quel avec les pronoms interrogatifs, qui comportent toujours un élément le/la- : lequel, laquelle, desquels etc. :
Quelle voiture comptent-ils acheter ? Laquelle ont-ils achetée ? ■ Quels étudiants se sont déjà inscrits pour le stage ? /Lesquels se sont déjà inscrits ?
Le déterminant relatif s’utilise essentiellement dans le code écrit (style administratif ou juridique), comme c’est le cas en finnois. Les formes sont identiques à celles des pronoms relatifs, avec lesquels il faut se garder de les confondre. Contrairement au déterminant interrogatif ou exclamatif quel, le déterminant relatif comporte un élément initial le-/la- ; les formes du masculin singulier (le-) et du pluriel (les-) se contractent donc avec la préposition à ou de :
singulier | pluriel | |
---|---|---|
masculin | lequel | lesquels |
féminin | laquelle | lesquelles |
à + masculin | auquel | auxquels |
à + féminin | à laquelle | auxquelles |
de + masculin | duquel | desquels |
de + féminin | de laquelle | desquelles |
À la différence du pronom relatif, qui est sujet ou complément du verbe de la relative, le déterminant relatif précède toujours un nom. Les propositions relatives introduites par un déterminant relatif sont toujours des relatives non spécifiantes, qui ajoutent un complément d’information, une sorte de parenthèse (elles sont parfois entre parenthèses) :
Vos informations personnelles pourront être transférées à un autre fournisseur, dans lequel cas vous serez, au préalable, informé du transfert. ■ La cour d’appel a débouté la demanderesse de sa demande, laquelle demanderesse s’est pourvue en cassation. ■ Le tribunal a entendu en qualité de témoins MM. Chupin et Janauld, lesquels témoins ont déclaré qu’ils résidaient dans la même commune. ■ D’après les directives d’exploitation qui étaient en vigueur à l’époque (lesquelles directives ont été déposées comme pièce au cours de l’audience), les personnes concernées devaient être avisées du changement immédiatement. ■ À cause de la grève, vous aurez peut-être du retard, auquel cas vous me préviendrez.
Le déterminant relatif lequel équivaut à un déterminant démonstratif précédé de et :
laquelle demanderesse = et cette demanderesse ■ lesquelles directives = et ces directives ■ dans lequel cas = et dans ce cas ■ lesquels témoins = et ces témoins
On le trouve ainsi fréquemment aussi en début de phrase. Le groupe nominal introduit par lequel a alors un sens équivalent à ce dernier (tämä) :
Il lui aurait suffi de nommer un médecin expert. Lequel expert aurait pu alors évaluer la question de la dangerosité de la maladie. ■ Quant aux intermittents, ils gardent espoir, apaisés sans être endormis par un ministre de la Culture aux petits soins. Lequel ministre doit attendre la fin du Festival avec impatience.
En finnois aussi, le pronom relatif peut être utilisé comme déterminant, comme le montre cet exemple tiré de la base de données juridiques FINLEX
(Suomen ja Amerikan Yhdysvaltain välinen eläkesopimus - NOOTTIENVAIHTO 1. Amerikan Yhdysvaltain suurlähettiläs ulkoasiainministeri Ahti Karjalaiselle) :
Kun Teiltä on vastaanotettu vastausnootti, joka sisältää tällaisen vakuutuksen, katsotaan tämän nootin ja vastausnootin muodostavan näiden kahden hallituksen välisen sopimuksen, joka sopimus tulee voimaan sinä päivänä jona vastausnootti on päivätty.
On peut former des déterminants composés de quantité à partir de noms, d’adjectifs, d’adverbes :
énormément de touristes valtavasti matkailijoita ■ infiniment plus de possibilités äärettömän paljon enemmän mahdollisuuksia ■ un kilo de farine ■ trois mètres de tissu ■ Je voudrais deux mètres de ce tissu rouge. ■ quatre semaines de vacances ■ un demi-litre de jus. ■ registre familier ■ un (sacré) paquet de ■ une masse de/des masses de ■ un sacré paquet d’euros kasapäin euroja ■ une masse de pognon kasapäin rahaa ■ une flopée de mômes laumoittain kakaroita ■ tout plein de fautes kauheasti virheitä ■ nombre de, quantité de monet, un certain nombre de tietty määrä [jtak] ■ un kilo de kilo [jtak], une dizaine de kymmenkunta [jtak], toute sorte de kaikenlaiset, la plupart de ■ beaucoup de ■ peu de, trop de, moins de ■ tant de/tellement de niin paljon [jtak], niin moni/monet, autant de yhtä paljon [jtak] ■ guère de ei kovin[kaan] [jtak] [phrase négative] ■ énormément de valtavasti [jtak] [style très légèrement familier] ■ pas mal de aika paljon [jtak] [très fréquent dans le français parlé]
Le mot la plupart n’existe cependant pas comme nom indépendant (on ne peut pas dire *une plupart/*des pluparts), mais il existe comme pronom indéfini la plupart d’entre eux, et dans l’expression figée pour la plupart (ennimmäkseen). De même, on trouve de nombreux déterminants de quantité composés dans le le français parlé :
un tas de suurimäärä [jtak], une foule de joukko [jtak], un paquet de hirveän paljon [jtak], des masses de hirveän paljon [jtak] etc.
Exemples de déterminants de quantité formés avec de :
Il y avait plein de champignons dans la forêt. ■ Mais il y avait moins d’airelles que l’an dernier. ■ Cet hiver, il n’y a pas eu beaucoup de neige. ■ Tu es sûr que tu as mis assez de fart sur les skis ? Laitoitko varmasti tarpeeksi voidetta suksiin? ■ Beaucoup de films qui passent à la télévision sont des films tout récents. Monet televisiossa esitetyistä elokuvista ovat aivan uusia. ■ Il y avait un tas de monde à la kermesse. Myyjäisissä oli paljon väkeä. ■ Aujourd’hui, on ne trouve plus guère de fraises des bois. Nykyään ei löydä enää kovinkaan usein metsämansikoita. ■ Nombre de ses livres ont été réédités. ■ Plus tu de mets de sucre, plus le glaçage sera solide (lire…). ■ J’ai de moins en moins de temps pour faire la pâtisserie.
Dans ces déterminants, de devient un élément fixe et n’est plus une préposition indépendante. Le déterminant est donc par exemple beaucoup de, et non simplement beaucoup, qui est un adverbe équivalent au finnois hyvin», sangen, paljon : il pleut beaucoup sataa paljon. Cela se voit par exemple dans le fait qu’après ce genre de déterminant on peut mettre un pronom interrogatif :
Tu as mis trop de basilic dans la vinaigrette. ■ Trop de quoi ? Lisäsit liikaa basilikaa salaattikastikkeeseen. – Mitä liikaa?
On trouve diverses expressions de nombre qui se sont grammaticalisées : nombre de (nombre + de), quantité de (quantité + de), beaucoup de (beau coup + de) etc. L’absence d’article montre clairement qu’il y a eu un processus de grammaticalisation :
Il a rapporté quantité de cadeaux. Hän toi suuren määrään tuliaisia. ■ Nombre de gens ont protesté. Monet ihmiset valittivat.
En dehors de cet emploi, les mots nombre et quantité sont également des noms ordinaires et ils peuvent aussi être utilisés de façon indépendante :
J’ai trouvé une quantité inadmissible de coquilles [typoja] dans ce livre. Löysin kirjasta luvattoman paljon painovirheitä. ■ Il y avait un nombre énorme de participants.
Mais cela n’est plus possible avec l’élément coup (dans le sens de « määrä ») qui se trouve dans beaucoup, sauf avec des adjectifs comme bon ou sacré, qui sont essentiellement du registre parlé : Il va falloir travailler un sacré coup. (Täytyy tehdä hirveästi työtä). Certains groupes se sont donc grammaticalisés formellement (l’article a disparu), d’autres se sont grammaticalisés sémantiquement : extérieurement, un tas de ressemble à un banal GN avec de, mais c’est bien un groupe grammaticalisé comme déterminant, un tas de problèmes signifie kauhean paljon ongelmia et non pas keko ongelmia, cf. le finnois kasapäin, läjittäin.
Cependant, il ne faut pas confondre les cas où le nom est construit avec un complément introduit par de et ceux où il est seulement un élément de déterminant composé :
Devant la maison, il y avait un tas de sable. Talon edessä oli hiekkakasa. ■ J’ai un tas de sable dans les cheveux (le français parlé). Minulla on kauhean paljon hiekkaa tukassa. ■ La foule des étudiants attendant les résultats des examens d’entrée s’étirait jusque sur le trottoir. Pääsykokeiden tuloksia odottavien opiskelijoiden joukko venyi jalkakäytävälle asti. ■ Une foule d’étudiants étaient venus assister au dernier cours du professeur. Suuri joukko opiskelijoita oli tullut seuraamaan professorin viimeistä luentoa.
Un grand nombre de noms exprimant une quantité peuvent, combinés à de, devenir des éléments d’un déterminant de quantité. Cependant, il y a certaines contraintes sémantiques : tous les noms indiquant un groupe, un ensemble, ne sont pas susceptibles de former un véritable déterminant. Le test permettant de décider si un groupe de mots forme un déterminant est de remplacer le nom par le pronom de personne 3 en : si le nom forme un déterminant de quantité, il est répété après le verbe :
Il a acheté une grande quantité de bière → Il en a acheté une grande quantité. ■ Donnez-moi un petit sachet de thym → Donnez-m’en un petit sachet. ■ Achète un brick de lait UHT → Achètes-en un brick. ■ Il y avait une flopée de touristes (familier) → Il y en avait une flopée.
Mais on dira plus difficilement :
J’ai vu une équipe de hockeyeurs → ?J’en ai vu une équipe. ou Le petit musée a accueilli un autocar de touristes → ? Le petit musée en a accueilli un autocar.
En effet, sachet et carton peuvent former un déterminant de quantité, car on « mesure » couramment les marchandises sous cette forme (quand on fait des achats). En revanche, équipe et autocar sont moins perçus comme une unité de mesure. Cependant, si on ajoutait tout (kokonainen), les phrases seraient plus acceptables : le petit musée en a accueilli tout un autocar, le nom autocar devenant de ce fait un contenant, une unité de mesure.
Certains noms ne se sont pas grammaticalisés comme déterminants de quantité, mais peuvent former des expressions qui, par leur sens, sont assimilables à des expressions de quantité, signifiant « combien de » ou « la quantité de », par exemple degré, niveau, proportion, part etc. :
Assurer un degré de qualité constant pour nos clients exige un important investissement en ressources humaines et en technologie. ■ La durée de chaque segment indique le degré de complexité des processus de compréhension (ou le degré de difficulté du texte). ■ On part contester la décision de l’arbitre, scène usuelle du football où la part d’arbitraire est plus grande que dans d’autres sports. ■ Ajoutez une part de sucre pour deux parts de beurre. ■ Malgré un contexte financier très difficile en 2018, la GMF maintient un niveau de rendement de l’épargne performante. ■ Plusieurs critères servent à déterminer le niveau de complexité du cas signalé. ■ Cette technique permet d’obtenir un niveau de réalisme inégalé. ■ Le premier stade de développement de la borréliose peut être stoppé par un traitement antibiotique. ■ Le Temps nous annonce la bonne nouvelle : « La proportion de pauvres a diminué de moitié depuis 1981 ».
Avec un article défini, ces mots reprennent leur sens habituel, sans valeur « quantitative » :
le niveau de qualité laatutaso / le niveau de la qualité laadun taso ■ la part de réalisme totuudenmukaisuus / la part du réalisme realismin osa, realismin rooli ■ le premier stade de développement kehityksen ensimmäinen aste / le premier stade du développement kehityksen ensimmäinen vaihe
Comme il est expliqué ci-dessus, un grand nombre de mots (noms, adverbes) peuvent être utilisés pour former des déterminants de quantité. Cependant, ceci ne concerne pas les adverbes en ‑ment (sauf deux d’entre eux, voir ci-dessous), contrairement à l’impression que peut donner notamment le finnois : par exemple runsaasti osallistujia ne peut pas se traduire par *abondamment de participants.
En effet, énormément de et suffisamment de sont les seuls déterminants composés formés avec un adverbe en -ment. Les autres adverbes en -ment, à valeur quantitative ou autre (vraiment, rarement, réellement, amplement, largement etc.), ne peuvent pas former des déterminants composés. Il faut donc faire attention à bien interpréter le mot de après un adverbe en -ment : il peut s’agir d’un simple allomorphe de l’article indéfini. Comparer :
Je n’ai pas énormément de temps. [énormément de déterminant composé de quantité]
J’ai énormément de temps. [énormément de déterminant composé de quantité]
Je n’ai pas vraiment de temps. [de article indéfini devant CVD de phrase négative]
J’ai vraiment du temps. [forme affirmative de la phrase précédente]
Dans la phrase affirmative, on retrouve donc la forme normale du/des :
Il a rarement de bons résultats. [de article indéfini adjectif antéposé]
Il a rarement des résultats satisfaisants. [devant adjectif postposé, on retrouve la forme normale des]
Contrairement à suffisamment, l’adverbe amplement (qui est assez proche par le sens de suffisamment) ne peut pas se combiner à de pour former un déterminant composé de quantité, sur le modèle du finnois runsaasti. On ne peut pas dire *Vous trouverez amplement d’exemples (plutôt : vous trouverez des exemples en quantité /vous trouverez quantité d’exemples). De même *largement de est impossible. On dit donc : vous avez largement de l’avance (de l’ est l’article indéfini massif), et non pas vous avez *largement d’avance. En revanche, les adverbes amplement et largement peuvent modifier des déterminants composés avec un adverbe, par exemple assez de :
Vous avez amplement assez de temps. ■ Vous avez largement assez de temps.
L’erreur assez fréquente des finnophones consiste donc à appliquer le modèle énormément de/suffisamment de à d’autres adverbes et à transformer ces adverbes en éléments de déterminants composés. Cette erreur s’explique aussi par l’influence du partitiivi finnois, qui s’utilise dans chacun des exemples suivants :
1. Minulla on usein aikaa. J’ai souvent du temps.
2. Minulla on harvoin aikaa.J’ai rarement du temps [ou : le temps]
3. Minulla on vähän aikaa. J’ai peu de temps. [peu de déterminant composé]
4. Minulla on paljon aikaa. J’ai beaucoup de temps.
5. Minulla ei ole aikaa.Je n’ai pas de temps.
Dans l’exemple 5, le partitiivi est induit par la forme négative (minulla ei ole aikaa). Dans les exemples 1 et 2, le partitiivi exprime en principe le massif. Mais l’adverbe harvoin « rarement » a en finnois un sens négatif (analogue à peu de). C’est pourquoi il est fréquemment suivi du partitiivi. Avec un nom comptable, on dit ainsi
Minulla on usein flunssa. J’ai souvent la grippe.
Dans ce cas-là, le mot flunssa au nominatif. Le partitiivi « minulla on usein flunssaa » est cependant possible.
Minulla on harvoin flunssa/flunssaa. J’ai rarement la grippe.
Flunssa est au nominatif ou au partitiivi par influence de la valeur négative de harvoin. En français, ?j’ai rarement de la grippe serait inattendu, car grippe n’est pas normalement représenté comme massif (pas dans cette expression, du moins). En revanche, on peut dire j’ai rarement de la fièvre.
Au total, si on compare les différentes possibilités illustrées dans les exemples ci-dessous, on se rend compte qu’il n’est pas facile pour les finnophones de faire le partage entre massif et non massif, entre déterminant de quantité et adverbe :
Minulla on usein kuumetta. J’ai souvent de la fièvre [article indéfini massif féminin] ■ Minulla on usein flunssa. J’ai souvent la grippe.[article défini féminin] ■ Minulla on harvoin kuumetta. J’ai rarement de la fièvre. [article indéfini massif féminin] ■ Minulla on harvoin flunssaa.J’ai rarement la grippe. [article défini féminin] ■ Minulla ei ole kuumetta. J’ai n’ai pas de fièvre. [article indéfini massif devant CVD de phrase négative] ■ Minulla ei ole flunssaa. J’ai n’ai pas la grippe. [article défini féminin]
Quand un groupe nominal est position détachée dans les constructions disloquées du français langue parlé, c’est-à-dire en prolepse (dislocation à gauche) ou en rappel (dislocation à droite), la forme du déterminant peut varier. Le lien sémantique entre le GN détaché et le déterminant d’origine est marqué par un pronom : le groupe nominal en prolepse ou en rappel avec un déterminant défini est relayé par le pronom le, la, les, tandis que le groupe nominal indéfini est relayé par le pronom en, conformément aux règles d’emploi du pronom complément de verbe direct :
Je n’ai pas encore vu la nouvelle version. → La nouvelle version, je ne l’ai pas encore vue. / Je ne l’ai pas encore vue, la nouvelle version. ■ Il faut classer ces photos par année. → Ces photos, il faut les classer par année. / Il faut les classer par année, ces photos. ■ Aurélie a acheté des robes. → Des robes, Aurélie en a acheté. / Aurélie en acheté, des robes. ■ Il restait encore du vin. → Du vin, il en restait encore. / Il en restait encore, du vin.
Si le déterminant est un déterminant indéfini de forme simple (un seul mot), le nom en prolepse ou en rappel est précédé de l’article indéfini, et le déterminant est repris sous forme de pronom après le verbe (quelque devient alors quelques-un(e)s :
Cette année, on m’a offert carrément trois cravates. → Cette année, des cravates, on m’en a carrément offert trois. / Cette année, on m’en a carrément offert trois, des cravates. ■ Ils ont fait quelques propositions, mais je ne sais pas si ça vous satisfera. → Des propositions, ils en ont fait quelques-unes, mais je ne sais pas si ça vous satisfera. / Ils en ont fait quelques-unes, Des propositions, mais je ne sais pas si ça vous satisfera. ■ Deux seulement, qu’il en a mangé, des portions. (lire…) ■ Il t’en reste encore plusieurs, des cartes, ou il faut aller en acheter d’autres ? ■ Pourtant, j’avais des photos toutes prêtes. → Pourtant j’en avais des toutes prêtes, de photos ! ← [Relevé sur un forum de discussion. La forme attendue serait des photos. Attraction probable (et croisée ?) des formes j’en ai pas, de photos et/ou c’est des drôles de photos.]
Si le déterminant est un déterminant indéfini composé (forme avec de), le nom en prolepse ou en rappel est précédé de l’article indéfini, et le déterminant est repris après le verbe sans l’élément de :
On a beaucoup de temps. → Du temps, on en a beaucoup. / On en a beaucoup, du temps. ■ Il restait encore beaucoup, de vin. → Du vin, il en restait encore beaucoup. → Il en restait encore beaucoup, du vin. ■ Mais il reste très peu de tarte. → Mais de la tarte, il en reste très peu. / Mais il en reste très peu, de la tarte. ■ Ça fait beaucoup de questions, ça ! → Ça en fait beaucoup, des questions. / Des questions, ça en fait beaucoup ! ■ Il faudrait beaucoup de bonnes idées pour sauver la situation. → De [article indéfini pluriel devant adjectif antéposé] bonnes idées, il en faudrait beaucoup, pour sauver la situation. ■ Vous avez encore beaucoup de tartes comme ça ? → Vous en avez encore beaucoup, des comme ça ?
Dans une phrase négative, l’article indéfini qui détermine le nom détaché peut passer à la forme de, mais ce n’est pas systématique, parce que le rapport entre le verbe est le CVD est moins net que dans la phase normale et l’influenc ede la négation moins forte :
Je n’ai pas constaté énormément d’erreurs. → Des erreurs / D’erreurs, je n’en pas ai constaté énormément. / J’en ai pas constaté énormément, des erreurs. / d’erreurs. ■ On n’a plus beaucoup de temps. → Du temps, / de temps, on n’en a plus beaucoup. / On n’en a plus beaucoup, de temps. Il n’en restait plus beaucoup, du vin. Ou : ■ Il n’en restait plus beaucoup, de vin.
Le maintien de la forme normale du / de la est cependant majoritaire :
De l’argent, il n’y en a plus énormément. ■ Malheureusement, on n’en a pas beaucoup, des idées, ni du temps d’ailleurs. ■ De la soupe, il en a pas mangé des masses, vu qu’il aime pas ça du tout.
De toute façon, comme dans le cas de toutes les constructions typiques du français parlé, l’apprenant (finnophone ou autre) de FLE n’a pas besoin de savoir reproduire ces structures, dont la maitrise nécessite une longue pratique du français. Mais il importe de savoir les identifier, pour savoir interpréter correctement le sens de de devant un GN isolé en fin de phrase et rétablir le rapport entre le pronom en, le déterminant et le GN:
D’argent, on n’en a plus énormément. ■ Malheureusement, d’idées, on n’en a pas beaucoup, ni du temps d’ailleurs. ■ De solution, je n’en ai pas trouvé.
ISBN 978-951-39-8092-4 © Jyväskylän yliopisto 2020-2022
Page 22. Les déterminants indéfinis. Dernière mise à jour : 8.8.2022
Mises à jour après le 15.8.2022